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Après le plombier polonais, le maçon roumain ? Le nombre de « travailleurs détachés » s’envole en France, en particulier en provenance d’Europe centrale. Le sujet menace dempoisonner la campagne des élections européennes LOpinion Publié le lundi 28 octobre à 15h21 Par Olivier Auguste, Journaliste Les faits - Face aux dérives de plus en plus fréquentes, la Commission veut encadrer la pratique du détachement de travailleurs. Sous la pression de secteurs comme le BTP, particulièrement concerné, la France pousse Bruxelles à instaurer des modalités strictes de contrôle et de sanctions. Mais Paris est isolé et devra faire des concessions pour obtenir l’assentiment des autres capitales européennes. Bruxelles a-t-elle posé – malgré elle - un piège qui se refermera sur le gouvernement français lors des prochaines élections européennes, en 2014 ? La Commission a rouvert, depuis de longs mois, un dossier explosif : elle veut mieux surveiller les conditions dans lesquelles un salarié européen peut travailler temporairement dans un autre pays de l’Union. Cette possibilité - traduction concrète du principe de libre circulation des personnes et des services - est codifiée par une directive de 1996, dite « directive détachement ». Il ne s’agit pas de la réécrire mais de la compléter, face à l’explosion des dérives, abus, détournements en tous genres. Paris est non seulement favorable à la démarche mais très en pointe dans ce combat. En pointe et isolé, au point que le ministre du Travail, Michel Sapin, a dû demander à ses homologues de renoncer à trancher lors de leur dernière réunion à Luxembourg : plutôt que d’être battu, il a demandé un délai jusqu’à décembre pour proposer un compromis. C’est là que le piège risque de se refermer. Si le compromis échoue, la législation européenne restera inchangée : les eurosceptiques, de droite comme de gauche, bondiront sur l’occasion pour dénoncer l’Europe « ultralibérale », qui organise le « dumping social ». « Le secteur du BTP est paniqué, il demande des protections d’urgence. Les petits transporteurs routiers sont en train de se radicaliser, analyse le député PS Gilles Savary, coauteur d’un rapport sur le sujet et fervent partisan européen. Si on ne fait rien, on produit du FN, de l’anti-européanisme, de la xénophobie. Mais la France est aussi le troisième pays « détacheur » : nos ingénieurs vont travailler dans toute l’Europe. Et les jeunes d’aujourd’hui sont mobiles. Il serait absurde de remettre des barbelés aux frontières. Il font donc absolument réguler les pratiques d’« optimisation sociale» de plus en plus fréquentes ». Si un terrain d’entente est trouvé, cela voudra forcément dire que la France aura renoncé à certaines de ses exigences, pour obtenir le ralliement des défenseurs d’un contrôle « light », conforme à leurs intérêts économiques, comme le Royaume-Uni ou certains pays d’Europe centrale. Les mêmes eurosceptiques pourront alors dégainer les mêmes arguments et demander aux électeurs de les envoyer au Parlement européen pour y faire barrage au texte, lorsqu’il y sera débattu. A tous les coups on gagne ! La campagne européenne pourrait donc s’enflammer, et le maçon roumain connaître, en 2014, une renommé aussi forte que le plombier polonais en 2005. Pourquoi le sujet est-il si sensible ? L’arrivée de nouveaux membres de l’Union européenne, notamment la Roumanie et la Bulgarie en 2007, puis la crise économique dans les pays au Portugal ou en Espagne, ont entraîné une envolée du nombre de travailleurs détachés en France. Or, avec un niveau record de chômage, les salariés de l’Hexagone ne supportent plus de voir débarquer, pour quelques jours ou quelques mois, des ressortissants portugais ou bulgares dont ils ont le sentiment qu’ils leur « prennent leur travail ». Le cas des abattoirs Gad qui embauchaient une centaine d’intérimaires roumains dans le Morbihan, tout en annonçant la fermeture d’un site dans le Finistère, laissant 890 personnes sur le carreau, a choqué. Avec des marges et des carnets de commande au plus bas, les petits patrons, eux non plus, n’en peuvent plus de cette « concurrence déloyale ». Pourtant, la directive détachement – « grande sœur » de la fameuse directive Bolkestein et son plombier polonais - était précisément censée instaurer des règles pour éviter une concurrence sauvage. Elle stipule que le salarié européen détaché en France est soumis aux règles françaises en matière de salaire minimum, de temps de travail maximal (10 heures par jour et 48 heures par semaine), de congés payés, de convention collective ou de droit de grève. En revanche, il reste assujetti à la sécurité sociale du pays où il travaille habituellement, d’où un coût salarial, cotisations sociales incluses, qui peut être inférieur de 30% pour les salariés en provenance d’Europe centrale. « C’est l’écart entre charges sociales qui fait le succès du système, il ne faut pas l’oublier alors qu’on s’apprête à les augmenter encore avec la réforme des retraites ! », souligne François Roux, délégué général de Prism’emploi, la fédération patronale de l’interim. Mais le boom des travailleurs détachés tient aussi à la facilité à contourner les règles. « Les Etats coopèrent mais ont du mal à lutter face à des fraudes de plus en plus organisées, reconnaît Philippe Dingeon, de la direction générale du travail. Cela passe par la sous-traitance en cascade : difficile de remonter la filière quand une entreprise d’un pays A va chercher des salariés d’une entreprise d’un pays B pour les placer dans un pays C ». En 2011, l’inspection du travail a contrôlé moins de 1 000 entreprises étrangères proposant en France des prestations de détachement de salariés, même si le chiffre augmente et qu’il faut y ajouter les vérifications des Urssaf ou de la gendarmerie. Quand contrôle il y a, « le premier obstacle est la langue, raconte Philippe Dingeon. Les salariés ne parlent généralement pas un mot de français ni d’anglais. Ensuite, l’entreprise qui les détache n’a souvent aucune présence en France. Il faut donc réclamer les documents dans leur pays d’origine ». Pour cela, des bureaux de liaison ont été montés entre l’inspection du travail et ses équivalents en Europe. Mais, en l’absence de tout délai impératif, certains mettent des semaines à répondre… ou ne répondent jamais. Dans ce cas, impossible d’obtenir les bulletins de salaire pour vérifier que le Smic français a bien été appliqué et que les frais d’hébergement et de transports n’en ont pas été déduits – une pratique interdite mais fréquente. Impossible de s’assurer que l’entreprise qui a détaché ses salariés en France n’est pas une simple boîte aux lettres mais a bien une activité régulière dans son pays d’origine, et qu’elle employait déjà les salariés avant de les envoyer à l’étranger – conditions impératives. Au final, combien de sanctions ? Nul ne le sait car les fraudes au détachement de salariés sont noyées dans la rubrique « travail dissimulé » des statistiques. « Nous sommes partie civile dans plusieurs procédures lancées depuis trois ans mais aucune n’a encore abouti », explique François Roux, de Prism’emploi. Si le gouvernement réclame des retouches à la législation européenne, c’est avec l’espoir de remédier à cette impunité.
Posted on: Tue, 29 Oct 2013 06:51:21 +0000

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