BAPE : un rapport secret pour les promoteurs 21 octobre 2013 | - TopicsExpress



          

BAPE : un rapport secret pour les promoteurs 21 octobre 2013 | Jessica Nadeau | Québec Les promoteurs qui déposent des projets devant le BAPE sont souvent invités, par le ministère de l’Environnement, à déposer un rapport secret pour commenter les avis contenus dans le rapport du BAPE. Il s’agit d’une technique utilisée régulièrement, mais jamais rendue publique, a appris Le Devoir. « C’est une demande du ministère de commenter l’ensemble des avis qui nous concernent dans le rapport du BAPE », explique Guy Ouellet, directeur général de la Régie des matières résiduelles du Lac-Saint-Jean, qui était promoteur dans le projet d’aménagement d’un lieu d’enfouissement technique à Hébertville-Station. Dans son rapport, rendu public il y a quelques semaines, le commissaire du BAPE Louis-Gilles Francoeur concluait que la création d’un lieu d’enfouissement était « justifiée ». Il émettait toutefois une quarantaine d’avis, dont la moitié s’adresse au ministère et l’autre moitié au promoteur, recommandant notamment de réduire le tonnage autorisé. Le promoteur, la Régie des matières résiduelles (RMR) du Lac-Saint-Jean, s’est dit satisfait du rapport, bien qu’il ait certaines réserves concernant quelques avis. C’est donc pour connaître la suite des démarches que la RMR a téléphoné au ministère de l’Environnement à la fin septembre. « On voulait savoir quelle était la suite des choses et le ministère nous a invités à produire ces documents, explique le directeur général, Guy Ouellet. Au lieu de passer des heures et des heures avec eux, ils nous ont dit : “envoyez-nous un rapport, on propose souvent cette façon de faire au promoteur”. » Continuité de l’évaluation Au ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs (MDDEFP), on confirme qu’il s’agit d’une façon de faire habituelle « lorsque le rapport de la commission du BAPE contient de nombreux avis qui concernent l’initiateur et son projet ». Par courriel, la porte-parole du MDDEFP Geneviève Lebel explique que « ces commentaires seront utiles au MDDEFP dans la continuité de l’évaluation environnementale du projet et dans la recommandation qui sera faite par le ministre au Conseil des ministres ». En effet, c’est le gouvernement qui, par décret, décidera si le projet peut aller de l’avant et, si oui, dans quelles conditions. Du côté du promoteur, on travaille donc « ardemment » sur ce document qui devrait être acheminé au ministère dans les prochains jours. Le document n’est toutefois pas public, précise-t-on. Et c’est là que le bât blesse, selon Jean Baril, avocat et administrateur du Centre québécois du droit de l’Environnement. « Qu’il y ait un canal de communications entre le ministère et le promoteur à la suite de la publication du rapport du BAPE, je ne trouve pas cela néfaste en soi. Ce qui est néfaste, c’est que tout cela se passe à huis clos […] C’est de le faire en secret qui est grave, que ce ne soit pas accessible, connu et encadré légalement. » Le spécialiste du BAPE, qui n’avait jamais entendu parler de cette pratique dans le passé, rappelle que l’organisme public n’a aucun pouvoir décisionnel et, qu’en vertu de la loi, le ministre peut, à tout moment, aller chercher des informations supplémentaires pour l’aider à prendre une décision éclairée. Il estime toutefois que toute information recueillie en marge des audiences du BAPE - dont l’avis des promoteurs - devrait être déposée dans un registre afin de permettre à tout un chacun d’y avoir accès et de mieux comprendre la décision finale du ministre. « Lorsqu’il rend sa décision d’autoriser ou non le projet et de suivre ou non les avis du BAPE, le ministre n’a pas à se justifier ou à donner ses motivations. Il peut décider d’écarter complètement le rapport du BAPE et cela peut se faire à la suite de discussions internes entre ministères, mais aussi, peut-être, suite à des discussions avec le promoteur. Et ça, ce n’est pas normal non plus, c’est une des lacunes de notre procédure. » Jean Baril rappelle également que l’avis du promoteur n’est pas le seul rapport gardé confidentiel. En effet, le ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs produit également sa propre analyse en marge des audiences publiques, ce que plusieurs appellent « le rapport parallèle », un document qui devrait être rendu public selon M. Baril. Dérive Pour Christian Simard, directeur général de Nature Québec, qui a participé à de nombreuses audiences publiques, le rapport secret des promoteurs est clairement d’une « dérive » du processus qui entache la crédibilité du BAPE. « On savait déjà que le ministère faisait sa propre analyse, mais qu’il demande au promoteur de donner son opinion, pour nous, ça rend une procédure publique opaque après coup et ça donne une voix prépondérante au chapitre au promoteur alors que déjà, pendant les audiences, le promoteur a une position privilégiée. » L’environnementaliste affirme que cette pratique « déséquilibre le processus », ce qui n’est pas souhaitable dans un tel exercice public. « C’est un peu comme si on permettait à un témoin dans un procès de revoir son témoignage une fois que le jugement est sorti, ça ne m’apparaît pas sain. » ledevoir/politique/quebec/390481/bape-un-rapport-secret-pour-les-promoteurs
Posted on: Tue, 22 Oct 2013 01:09:20 +0000

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