CHAPITRE 1 FATALITÉ Colombe a été soufflée tel un château - TopicsExpress



          

CHAPITRE 1 FATALITÉ Colombe a été soufflée tel un château de cartes. Elle a du mal à encaisser le coup. La nouvelle l’a frappée de plein fouet. Elle croyait avoir pris ses distances vis-à-vis Bertrand, mais d’apprendre là, comme ça, qu’il s’est enlevé la vie la bouleverse profondément. Il lui passe plein d’idées par la tête; une vraie rafale qui la bouleverse. Il lui remonte plein de souvenirs à l’esprit. C’est fou comme la vie bascule subitement. Colombe est submergée d’une peine profonde. Que c’est triste d’en finir ainsi! Bertrand n’aura donc jamais su se donner le droit au bonheur. Il n’aura pas su s’accrocher au beau de sa vie, vacillant constamment pour sombrer dans le gris de son existence. Le pire n’aura pas été d’avoir eu un parcours tortueux, mais de ne pas avoir su s’accrocher à ce que la vie lui aura offert de plus beau. Cela n’aura peut-être jamais été le grand amour-passion entre lui et sa Colombe. Pourtant celle-ci lui aurait toujours accordé son amour s’il avait su être un peu moins invivable. Elle en a enduré pas mal à ses côtés. Par contre elle avait déjà vécu pire. Pour elle, son mariage avec Bertrand aura été le prix à payer pour se libérer de sa situation familiale infernale. Puis vint le point de non-retour où Colombe n’aurait plus su se pardonner d’entraîner ses deux filles là-dedans. Le problème de Bertrand est qu’il n’a jamais su s’arrêter, finissant toujours par outrepasser les limites. Quand il perdait la maîtrise de lui-même, il ne faisait pas que se fâcher, il se mettait en colère. Il pouvait piquer des crises terribles quand il voyait noir. Combien de fois il s’est retrouvé dans le trouble pour avoir perdu la carte! Sa descente aux enfers a commencé quand Colombe en a eu assez de ses sautes d’humeur. Tant qu’elle en était la seule victime, elle a enduré. Il est allé trop loin quand il s’est mis à s’en prendre aux filles. Ouf! Là, ça en était trop. Le Bertrand a vite réalisé que sa Colombe pouvait avoir du caractère. Qui a connu sa mère Rose-Aimée sait qu’elle a de qui retenir. Quoi qu’il en soit, l’homme s’est fait mettre à la porte illico presto. Il n’en revenait pas de voir sa frêle épouse réagir aussi promptement, elle qui avait toujours tout enduré en pliant l’échine. La grande Colombe ne s’était jamais rebiffée et avait toujours enduré son sale caractère. À partir de là, tout a dégénéré. Sur le coup Bertrand est allé se saouler la gueule. On en parle encore à l’hôtel de Saint-Rédempteur. Il s’était offert la cuite du siècle. S’il avait su fermer sa grande gueule, il en aurait été quitte pour une mémorable gueule de bois le lendemain. À chercher le trouble comme il le faisait toujours, l’homme a heurté un mur. Il s’en est pris à plus fort que lui. En fait, presque tout le monde était plus fort que lui. Ce n’est qu’en gueule qu’il pouvait rivaliser avec quiconque. Quand c’était le temps de jouer aux bras, il se réfugiait rapidement derrière sa fanfaronnade. Ce soir-là, trop éméché pour se rendre compte qu’il aurait dû battre en retraite depuis longtemps, Bertrand a rencontré son homme; un solide gaillard aussi saoul que lui qui lui a foutu toute une raclée. Bertrand n’a jamais accepté de perdre la face. Après avoir dessaoulé et repris quelques forces, il s’était dirigé chez son agresseur pour le poivrer d’une décharge de chevrotines. Du coup, le Bertrand s’est retrouvé en taule pour un temps. Cela aurait dû lui servir de leçon. Après avoir purgé sa peine, Bertrand aurait dû rester penaud chez lui et reprendre une vie tranquille avec sa petite famille qui était prête à lui pardonner des écarts du passé. Colombe avait même mis en veilleuse son amitié avec Xavier. N’étant pas dupe de ses sentiments qui se développaient pour son ami, elle a préféré jouer franc-jeu. Quand Bertrand est débarqué à nouveau dans son quotidien, elle a repris sa vie de femme mariée avec toute sa bonne volonté. Cela a duré un temps, jusqu’à ce que la jalousie maladive de Bertrand ne vienne encore tout gâcher. Cela en était redevenu infernal. Bertrand s’est remis les pieds dans les plats. Dans une autre de ses sautes d’humeur, il est allé agresser Dave McNab, le fils de madame Ward qui employait Colombe. Bertrand a rossé l’individu, mais il en a été quitte pour une blessure par balle et un retour derrière les barreaux. Une fois de plus, l’homme a dû ronger son frein. Aurait-il compris cette fois-ci? Nul ne le saura. Par contre, il est clair qu’il a mal pris sa séparation d’avec Colombe. Il en a ragé, tant il en a vécu de la frustration. Il s’est senti trappé, pris comme un rat dans sa prison. De sa cellule, il ne pouvait plus rien faire pour tenter de se reprendre aux yeux de Colombe. En fait, nul ne sait s’il en aurait réellement fait l’effort. Par contre, des codétenus raconteraient que sa frustration a culminé, quand il est venu à ses oreilles, que Colombe vivait une nouvelle relation amoureuse avec Xavier, son ami de toujours. Est-ce cela que l’homme n’a pas pris, ou est-ce le triste bilan qu’il a dressé de son existence, qui l’a accablé au point de poser son geste fatal? Il y a de ces drames que l’on n’arrive jamais à saisir totalement. Ils nous laissent plongés dans la perplexité. C’est souvent là que se réveillent nos propres démons. Colombe est à l’aube d’une longue période de questionnement et d’incompréhension. Son désarroi est profond. Impuissant, Xavier la voit totalement décontenancée. Son réflexe est de serrer Colombe dans ses bras et de la laisser sangloter sur son épaule. Cruellement néanmoins, la vie poursuit son cours. Colombe regarde l’heure. Les filles sont chez Béatrice pour l’instant. Quelle attitude adopter face à elles? Comment leur annoncer la mort de leur père? Doit-elle les mettre au fait des circonstances du drame? Comment expliquer à des enfants que l’on puisse vouloir s’enlever délibérément la vie? Colombe se demande si elle doit les préserver ou leur dire toute la vérité. Elle a toujours été du genre à jouer franc-jeu, mais Sophie et Charlotte sont encore si jeunes. Un tel drame risque certes de les bouleverser. Déjà qu’elles n’ont pas encore saisi toutes les circonstances qui ont mené leur père en prison. La première fois, alors qu’elles étaient plus jeunes, Colombe s’était contentée de parler tout d’abord d’absence prolongée. Elle avait bien fini par leur en dire un peu plus. Les ragots ont toujours circulé allègrement dans une petite place comme ici. Il est clair que la détention de Bertrand ne pouvait passer sous silence et les pires histoires seraient venues aux oreilles des filles. Aussi bien prendre les devants dans ces circonstances. La deuxième fois, les filles étaient plus vieilles et déjà plus conscientes des troubles de comportement de leur paternel pour en avoir fait elles-mêmes les frais. Colombe a alors pu parler plus ouvertement des problèmes de Bertrand avec elles. Les réactions des deux jeunes ados furent alors mitigées. Sophie, la plus vieille, s’était braquée plus diamétralement contre son père. Celle-ci a vu plus souvent sa mère pleurer après les crises de son père. Elle lui en voulait pour cela; plus parce qu’il faisait de la peine à sa mère que parce qu’il était rude avec elle aussi. Charlotte, elle, démontrait plus d’incompréhension alors que leur mère persistait à leur dire que malgré tout leur père les aime. Colombe était bien placée pour savoir qu’il n’y avait rien de plus cruel pour un enfant de se sentir mal-aimé de ses parents. Par contre, la plus jeune avait de la difficulté à concevoir que son père puisse les rudoyer tout en les aimant comme le prétendait leur mère. C’était incompréhensible pour elle. Ce n’est pas que Colombe cherchait à excuser Bertrand à leurs yeux. Par contre, la mère est au fait des dommages que de telles situations peuvent causer à l’amour-propre de jeunes ados. C’est souvent à cet âge que la confiance en soi s’effrite. Elle est par la suite si difficile à rebâtir. _____
Posted on: Fri, 12 Jul 2013 00:01:17 +0000

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