Chape de plomb sur la Russie Par DANIEL COHN-BENDIT " Il y a un - TopicsExpress



          

Chape de plomb sur la Russie Par DANIEL COHN-BENDIT " Il y a un an, lors de la ré-ré-ré-élection de Vladimir Poutine à la tête de l’Etat russe plusieurs observateurs, dont des Français et des Allemands, avaient prédit des changements encourageants pour la Russie. Le «Poutine nouveau», comme un bon vin, aurait écouté la vague de contestation qui a traversé la Russie suite aux élections législatives de décembre 2011, largement truquées en faveur du parti au pouvoir. En bon «autocrate éclairé», Poutine s’apprêtait, nous disaient-ils, à rendre leurs droits les plus fondamentaux aux citoyens russes, à lutter vraiment contre la corruption et à garantir des élections libres et démocratiques. A l’époque, pressentant l’arnaque, j’avais déjà mis en garde certains de mes amis contre ce discours de facilité. Aujourd’hui, je me rends compte que j’étais loin d’imaginer à quel point, en un an seulement, ce «nouveau pouvoir russe» pouvait plonger la Russie dans la répression, la peur et la haine. Les arrestations d’opposants et de militants pour les droits humains ont commencé dès la fin de l’année 2011. Mais c’est l’année 2012 que les ONG indépendantes considèrent comme la pire depuis la chute de l’Union soviétique pour les libertés en Russie. Plus de 5 000 prisonniers politiques, des lois pour limiter les manifestations, censure des médias et d’Internet… et que deviennent les ONG qui dénoncent ces abus du pouvoir ? Estampillées du label «agents de l’étranger», synonyme de «traîtres», ces organisations indépendantes subissent quotidiennement attaques et perquisitions. Des ONG importantes comme Memorial, Golos ou les Mères de soldats mais aussi les grandes ONG internationales comme Amnesty ou Greenpeace risquent des condamnations. Les procès politiques se multiplient et la justice est utilisée pour museler les opposants. Les noms des «prisonniers du 6 mai» et des jeunes femmes du groupe Pussy Riot s’ajoutent à celui de Mikhaïl Khodorkovski qui fête cette année ses 50 ans dont dix ans passés derrière les barreaux. Tous dénoncent les mauvaises conditions de détention et les pressions de l’administration pénitentiaire. Les accusations se multiplient contre l’avocat et militant anticorruption Alexeï Navalny. Candidat déclaré à l’élection présidentielle de 2018, il risque aussi de se retrouver en prison et par conséquence empêché de se porter candidat. Face à cela certains choisissent l’exil. C’est le cas du célèbre économiste russe Sergueï Guriev qui a décidé de s’installer en France suite à des poursuites lancées contre lui. C’est aussi le cas de nombreux militants, dont des écologistes, qui ont immigré dans les pays Baltes ou en Ukraine. Cette vague d’exil rappellera à certains les départs de dissidents soviétiques. Je préférerais éviter ce genre de parallèles trop faciles car ils cachent une réalité du régime russe sans doute plus complexe. Alors, me direz-vous, face à cette chape de plomb qui s’abat sur la Russie, que pouvons-nous faire ? Tout d’abord les Européens doivent instaurer un «langage de vérité» face à Poutine. Le dirigeant russe n’a aucun respect pour les faibles et méprise les diplomates qui se plient devant lui. Puis, l’Europe devrait augmenter le budget de la CEDH qui est souvent le seul moyen pour un citoyen russe d’accéder à une justice indépendante. Faut-il rappeler qu’en 2012 la Russie est devenue l’Etat le plus le plus condamné pour la violation des droits humains par cette Cour ? Enfin, il y a bien sûr la loi Magnitski. Adoptée en décembre 2012 aux Etats-Unis, cette loi comporte une liste noire d’officiels russes présumés responsables de la mort en prison en 2009 du juriste Sergueï Magnitski. Ces personnes sont désormais interdites d’entrée sur le territoire américain et leurs avoirs aux Etats-Unis sont gelés. Plusieurs résolutions du Parlement européen appellent les Etats de l’UE à adopter les mêmes lois. Dans le même temps, le Parlement européen doit rejeter l’abolition des visas pour les officiels russes qui souhaitent voyager dans l’UE. Une telle mesure ne doit pas voir le jour tant que les responsables de la mort de Magnitski sont en liberté. Aujourd’hui, jour de la fête nationale russe, une grande marche citoyenne aura lieu à Moscou. Des rassemblements de soutien sont prévus à Paris et dans d’autres capitales européennes. Je soutiens bien évidemment ces initiatives. Face au rouleau compresseur du Kremlin, il est plus que temps d’agir ! samedi · Paris
Posted on: Wed, 19 Jun 2013 20:53:02 +0000

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