En se balladant sur les réseaux dits « antifascistes » sur - TopicsExpress



          

En se balladant sur les réseaux dits « antifascistes » sur Internet, j’ai été frappé par la violence de certains propos. Comme si aller « casser du facho » était une réponse souhaitable, ou même acceptable, à l’altercation dramatique d’il y a quelques jours. Alors que certaines franges les plus extrêmes, comme j’ai pu le lire sur les réseaux sociaux, promettent la vengeance du sang et des larmes et que le gouvernement veut « réduire en pièces » - comprendre « dissoudre » - des mouvements identitaires, le meurtre de Clément Méric pousse à la réflexion sur ces « ennemis ». Aussi j’aimerais prendre un peu de recul sur cette affaire et essayer de comprendre le climat dans lequel il s’inscrit. Nous aurions d’un côté ces mouvements autoproclamés « antifascistes » d’extrême gauche et de l’autre les mouvements d’extrême droite. Or tout porte à croire que pour les uns ou les autres, tout ce qui ne leur ressemble pas exactement est à détruire. Ils semblent comme sur un cercle les deux points les plus éloignés, mais sont aussi simultanément et paradoxalement les plus proches. Ils sont de la même engeance et fonctionnent sur une base commune, la désignation d’un ennemi à faire taire, selon les éléments suivants : l’instauration d’un climat de terreur à travers une idéologie haineuse excluant de fait cet « ennemi » la légitimation des agressions physiques envers cet « ennemi » une peur maladive de cet « ennemi » amenant à une culture de la haine de l’autre la volonté commune de restreindre la liberté d’expression de ses « ennemis », en cela ces mouvements ne peuvent être libertaires le sentiment exacerbé d’appartenance à une bande, se traduisant par l’affichage de symboles autoritaires révolutionnaires (drapeaux et slogans), et même des types de symboles parfois communs arborés (ici ils aimaient les mêmes marques de vêtements) l’auto-étiquetage permanent (les uns se disent « nationalistes », les autres seraient « antifascistes ») comme pour se rassurer sur le bienfondé de leurs actions en se référant, se revendiquant d’une idéologie, ou contre une idéologie le fichage de leurs opposants une pratique limitée du débat et une préférence nette pour « l’action directe ». Non, cette violence n’est pas l’apanage d’une idée ou d’un courant, mais est bel et bien une bêtise. Non, la violence n’est ni de gauche ni de droite, elle n’a pas de couleur politique et ne saurait être réduite à cet axe simpliste, elle est le reflet d’une idéologie haineuse et méprisante nourrissant le rejet et la peur de l’autre. Tuer un « facho » ou tuer un « gaucho », dans les deux cas, c’est un meurtre ! La caractéristique de base d’un mouvement profondément démocrate et humaniste est le refus de cette forme et cette intensité de violence physique s’exprimant dans un climat autoritaire de terreur, quels que soient ses objectifs. Or une même détestation de nos valeurs animent les « fa » et les autoproclamés « antifa ». Nous vivons dans une période de crise sémantique, où le sens des mots est confus, nous devons prendre garde à ne pas désunir les citoyens, car leurs adversaires, apparemment opposés, sont en réalité d’accord entre eux pour anéantir une expression pacifique de la démocratie. Si le fond de leur démarche est hautement louable - combattre le fascisme ! - la méthode de ces autoproclamés "antifascistes" de se définir en opposition de ceux qu’ils prétendent pourtant sincèrement combattre est absolument contre-productive. S’opposer frontalement aux groupes extrémistes n’a jamais été la bonne solution. Pire, cette posture vous pousse à devenir celui que vous combattez, en adoptant ses méthodes de terreur. En tant que pirates, nous devons au contraire, après avoir mis dos à dos tout type de totalitarisme, placer le respect de son adversaire politique comme condition première du dialogue, en garantissant une large liberté d’expression, comme nous avons pu en discuter sur le forum (1). Un débat démocratique se doit d’être un véritable art martial où ce respect de l’adversaire en est l’axiome préalable. Mais où diable pouvons-nous débattre ? Quelles structures nous permettent d’exprimer pleinement notre citoyenneté, nos opinions, toute la diversité de nos opinions ? Ne voter que trois ou quatre fois tous les cinq ans nous infantilise, on nous flatte constamment en nous faisant croire que nous sommes des citoyens, alors que nous ne sommes que de vulgaires électeurs (2), incapables d’écrire nous-mêmes nos lois et même nos textes constitutionnels. Alors qu’à l’école on nous apprend à reconnaître que nous vivons en démocratie, la vérité est toute autre : nous sommes constamment écartés de toute décision politique, majeure ou non. La politique est restée confinée dans les mains d’une oligarchie ploutocratique, qui, par le mécanisme de l’élection, entrainant une campagne électorale nécessitant des fonds financiers colossaux, s’est arrogé le droit de gouverner, et ce dès la Révolution Française de 1789, c’est ce qu’on appelle le « gouvernement représentatif », ou la prétendue >démocratie représentative< . Aussi, nous avons besoin de revoir notre manière d’envisager la politique, notre manière d’éduquer à l’école, et de manière générale revoir nombre de nos institutions sociétales : pédagogies alternatives, jardins partagés et partage de la production alimentaire, financement des médias, déprofessionnalisation et redistribution du pouvoir politique, indépendance des pouvoirs, revenu de base et économie contributive, imprimantes 3D et réappropriation de la production industrielle... et là seulement on assistera à un recul de la violence, qui pourtant ne date pas d’hier, mais qui continue de s’afficher aujourd’hui. Car c’est à terme la façon de lutter contre - non pas seulement le racisme ou le fascisme - mais bien contre toute forme de terreur intellectuelle qui est à repenser. J’invite donc chacun à participer aux projets citoyens novateurs (3) recréant du lien politique et social, nous devons nous approprier les outils qui nous mèneront à cet objectif. A Nantes, nous souhaitons reprendre l’idée des maitres-ignorants et créer un centre d’auto-formation à la pratique démocratique (4), tandis qu’à Grenoble ils tentent de retrouver des principes fondateurs du germe démocratique de la Grèce antique (5), alors qu’à Chambéry une SCOP d’éducation populaire met généreusement à disposition une pièce de théâtre libre intitulée « Sommes-nous en démocratie ? » (6). Arrêtons de passer notre temps à désigner des ennemis faciles, qu’ils soient « les extrêmes » ou « la classe politique », notre incapacité à nous fédérer entre citoyens, au-delà des idéologies, montre bien que nous sommes nous-mêmes nos propres ennemis. C’est le cœur de mon engagement au Parti Pirate. Nous qu’ils méprisent, nous qu’ils traitent comme des enfants en se prenant pour nos parents, nous nous devons de partager largement ces initiatives et nous émanciper de leur tutelle, nous devons leur montrer que nous sommes à la hauteur des enjeux et des défis que nous pose le système politique dans lequel notre société évolue et chancelle, en redonnant un sens à l’idéal démocratique, aux biens communs, bref au "vivre ensemble".
Posted on: Tue, 18 Jun 2013 18:04:36 +0000

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