Hommage à un grand maître. En cette veille des funérailles de - TopicsExpress



          

Hommage à un grand maître. En cette veille des funérailles de mon maître, je lis les premiers mots du Bâtonnier désigné, Maître Pierre-Olivier SUR, qui s’est empressé de rappeler que Jacques VERGES n’avait refusé qu’une seule cause, défendre l’assassin d’un avocat. C’est, à n’en pas douter, son attachement à la robe, qui lui collait à la peau, qui l’amenait à décliner cette sollicitation qui prend tout son sens et sa grandeur lorsque l’on sait, et tout le monde l’a encore rappelé, les causes, critiquées ou contestées, qu’il a défendu, avec talent et courage. Maître COLLARD osait même dire qu’il était, au procès Barbie, du bon coté quand VERGES était, lui, du mauvais. Beaucoup prétendent être de sa trempe mais tous les ténors parisiens, jeunes et moins jeunes, défendront ceux qui ont ouvert le feu sur moi, parce que je suis avocat. Je serais, demain, au cimetière du Montparnasse pour assister à l’inhumation de Maître VERGES et je me remémore sa rencontre. A la fin des années 1980, étudiant à l’Université Paris XII, j’organisais, avec mon futur associé, Maitre Jean-Marc FLORAND, alors assesseur du Doyen de la Faculté de Droit de La Varenne, la venue de Maître Jacques VERGES qui nous fit l’honneur de réserver à notre colloque son premier commentaire du procès Barbie. Nous tissâmes des liens professionnels et amicaux, il était notre mentor, un exemple de courage de robe qui m’a habité à tous les instants de ma vie d’avocat. Durant des années, Maître FLORAND et moi-même travaillâmes avec lui sur des dossiers passionnants. Nous rédigeâmes, avec Maître OUSSEDIK, une plainte contre l’Etat français pour l’enlèvement du terroriste Carlos par les services français. Nous obtenions également la révision de la condamnation de Patrick DILS, plus jeune condamné à la prison à vie d’Europe. Il me demanda aussi d’assurer, un temps, la défense d’Aziz OULAMARA, alors poursuivi pour le meurtre d’une fonctionnaire de police, sur le périphérique parisien. Avec le Bâtonnier de Bruxelles, il m’offrit un dossier criminel dans lequel je défendais un proche d’Omar Bongo pour lequel j’obtins, pour la première fois en France, un acquittement par contumace. Je faisais partie de sa défense quand un juge d’instruction eu l’idée originale de l’inculper pour les propos, désormais célèbres, tenus à la sortie de l’audience de la Cour d’Assises qui condamna Omar RADDAD, là où, de manière annonciatrice, il avait déjà compris, que la défense se prolongeait. A son tour, il fut le seul à dénoncer, dans son journal de l’année 2005, La passion de défendre, le pacte crapuleux que les juges d’instruction avaient tenté de sceller avec ma collaboratrice, lui promettant de l’absoudre si elle me dénonçait comme complice de l’évasion d’Antonio Ferrara. Ces derniers mois, le sachant souffrant, je me rapprochais de lui, à l’image de l’élève au chevet de son maître, écoutant les derniers enseignements du sage. Il riait déjà à entendre les éloges funèbres, tous plus pompeux les uns que les autres, que ses pairs prononceraient un jour en l’honneur de sa mémoire, me rappelant que ceux là même avaient refusé qu’il se présente comme candidat aux élections du Conseil de l’Ordre, place qui devait de droit lui revenir tant sa contribution pour le Barreau fut grande. Au début du mois de juin dernier, je le remplaçais à sa demande, au pied levé, dans le tournage du dernier film de Michel HOUELLEBECQ, qui porte à l’écran l’enlèvement dont il fut victime, et dans lequel Jacques VERGES devait jouer son propre rôle d’avocat, m’invitant ainsi à jouer le mien, celui de Maitre ACHOUI. Je lui rendais compte de mes premiers instants d’acteurs et il m’interrogeait sur la tenue du procès des auteurs de la tentative d’assassinat perpétrée contre moi. Il s’extasiât en apprenant que l’Ordre des avocats de Paris ne se constituait pas partie civile à mes côtés dans le procès de la tentative d’assassinat dont je fus victime, le 22 juin 2007, alors même que je quittais mon Cabinet, la robe sous le bras, montrant le caractère ô combien hypocrite des discours corporatistes de nos représentants, sous-tendus par une acception de la confraternité à laquelle il ne pouvait adhérer et qu’il condamnait. Il est mort le 15 août 2013, dans un appartement du Quai Voltaire, là même où, quelques années auparavant, j’avais installé mon Cabinet d’avocat, celui dans lequel la justice a essayé de trouver l’arsenic pour me donner la mort, professionnelle. Karim ACHOUI
Posted on: Mon, 19 Aug 2013 19:06:40 +0000

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