Il était une fois la fibromyalgie Etudiant à l’IUFM - TopicsExpress



          

Il était une fois la fibromyalgie Etudiant à l’IUFM afin de devenir enseignant d’Education Physique et Sportive, je faisais de l’entraînement sportif mon quotidien. Il me fallait combler ce que la nature ne m’avait pas donné. Mais comme tout individu très entraîné et euphorisé par ses constants progrès, la frontière avec la surfatigue m’était invisible. Du coup, j’enchaînais les petites blessures : claquage, élongation, dos bloqué, etc. Mais très vite, je me mis à l’entière écoute de mon corps et compris que l’on ne dépasse jamais ses limites, on les repousse tout au plus. J’en acceptai donc les bornes et ne fis plus que de l’entretien physique. Pourtant rien ne changea. Mars 2006, lors d’une séance de musculation banale, hors de tout mouvement physique, simplement en me levant pour saisir une bouteille d’eau, mon dos se bloqua au niveau thoracique. Je pris donc la direction de la piscine et enchaînai avec une douche bien chaude et des anti-inflammatoires afin de décontracter le tout. En moins de 24 heures, tout revint à la normale. Mais une semaine plus tard, mon dos me refit souffrir. Je ne parvenais plus à rester debout très longtemps. Et la position « allongé sur le dos » m’était douloureuse. Evidemment je refis une cure d’anti-inflammatoires, mais sans effet. Le passage chez le médecin s’imposa de lui-même. Sorti de là, direction la radiologie avec quelques myorelaxants dans la poche. Les radiographies révélèrent une scoliose sinistro-convexe c’est-à-dire qu’en plus d’avoir un zigzag sur le plan avant-arrière - chose parfaitement normale - j’avais une ondulation sur le plan gauche-droite. Comme tout individu ayant mal et ne saisissant rien aux termes médicaux, je m’en inquiétai. Signe révélateur, je suis allé sur Internet pour étudier le problème. Pourtant, avec le recul, cette scoliose me semble tout à fait banale, sinon commune à tous. Je pense que son explication réside dans le simple fait que lorsque nous sommes jeunes écoliers, nous portons des sacs de plus de 10 Kg, sur une seule épaule généralement afin de ne pas sembler ringard, du coup la colonne prend ce pli bancal. Par chance, ces inquiétudes disparurent car les douleurs s’estompèrent. Peut-être était-ce grâce aux myorelaxants… Malheureusement tout rebascula un samedi matin d’Avril 2006. Alors que j’étais au sommet de ma forme et que tout me souriait, vint le début de mon agonie. Il me semble par ailleurs que c’était la même semaine où j’appris que j’avais réussi la première épreuve de mon concours d’enseignant. Peut-être que ce choc psychologique, et c’en était bien un, fut le déclencheur de ce qui m’arrivait, un peu à la manière de ces maladies dont on peut être porteur sain, et qui finissent par apparaître sous l’effet d’un stress important… Bref, ce samedi, au moment de me lever du lit, je ressentis une douleur sacro-coccygienne, comme une tendinite. Mais cette sensation était légère et non constante. Je ne changeai donc pas mes plans et pris la direction de l’entraînement de gymnastique. Mais lors de mes étirements, il m’était impossible de tirer les fesses vers l’arrière. Cette sensation revenait à chaque fois. Malgré cela, je ne m’en alarmais pas trop. Je me disais qu’elle s’estomperait comme les autres… Grave erreur ! Elle persista et se fit ressentir dans un plus grand nombre de situations : au moment de s’asseoir par exemple. Et la douleur augmentait elle aussi. Je pensai alors à une fêlure puisqu’il m’arrivait de chuter sur les fesses lors de mes entraînements. Et étant convaincu qu’il s’agissait bien d’une fêlure, je ne pris pas soin d’en discuter avec le médecin puisqu’une fêlure ne se soigne qu’avec du temps et de la vigilance. Là encore j’étais dans le faux. Mais ça je ne l’apprendrai que plus tard… Deux semaines s’écoulèrent, mon mal de dos refit son apparition avec la même virulence et les mêmes remarques : j’avais mal même lorsque j’étais sur le dos. Certes bien des personnes ressentent cela, sauf qu’ils ont habituellement mal aux lombaires alors que moi, c’était, et c’est toujours, au niveau thoracique, ce qui est particulièrement interloquant. Mais malgré ces douleurs, jamais ne me vint l’idée que ce puisse être quelque chose de chronique. Je pensais que le temps soignerait mes souffrances. Du coup, je mis tout ça de côté tant j’étais obnubilé par mes examens scolaires qui approchaient à grand pas. J’avais décidé d’aller chez le médecin seulement une fois mes épreuves terminées car chaque heure, chaque minute et même chaque seconde me semblait essentielle à la réussite de mon concours. Concours que j’ai donc passé avec de fortes douleurs sacrées et dorsales, chose peu évidente lorsqu’il vous faut courir, nager, sauter ou tourner… Dès le lendemain de mon retour de Vichy, siège de mon concours, j’allai chez le docteur. Je ressortis avec une lettre pour une radiographie ainsi qu’avec des anti-inflammatoires. Cette dernière prescription m’était incompréhensible car malgré cette sensation de tendinite, je ne pensais vraiment que l’on puisse avoir une inflammation à cet endroit. Si la radio ne révéla rien, les anti-inflammatoires calmaient les douleurs. Cependant elles revenaient inlassablement, et les dorsales n’étaient aucunement soulagées. La crainte se fit naturellement grandissante en moi, et c’est un euphémisme. Je ne comprenais absolument rien de ce qui m’arrivait car les examens ne révélaient rien et les médicaments ne faisaient que peu d’effet. J’étais perdu. Ce corps, que je pensais connaître, se dérobait totalement de mon contrôle. Malgré tout, je continuais à vivre, je voulais profiter de mes vacances d’été. Je faisais du sport tant bien que mal, mais dès l’arrêt de la pratique, une fois le corps refroidi, j’étais totalement ankylosé. J’avais l’impression que ma colonne vertébrale était placée dans un étau et qu’on la serrait très fortement. La douleur était très violente. Seule la position ventrale, après 30 grosses minutes d’immobilité et de force mentale, parvenait à calmer ma souffrance. Mais elle reprenait de plus belle dès que je restais plus de 5 minutes debout. Très logiquement, à la mi-juillet, je suis retourné encore une fois chez le médecin. Cette fois-ci, il me donna une prise de sang à faire - qui par la suite ne révéla rien d’anormal - et me dirigea vers un rhumatologue dont j’obtins le rendez-vous pour la mi-août. En attendant ce jour, je continuais à me bourrer d’anti-inflammatoires qui me causaient tous les jours de sacrées coliques particulièrement inopinées. J’y ai même eu le droit lors d’une randonnée en forêt… Mais ce n’est pas le pire : vint un jour où, sous la domination de la douleur et du fait de la tolérance débutante aux médocs, je pris 2 cachets à 3 heures d’intervalle : un à 9h et un à 12h. Quatre heures plus tard, voilà que je me mets à vomir toutes les 30 minutes, ceci durant 7 longues heures avant de me décider enfin à aller à l’hôpital. Je m’étais intoxiqué aux médocs… Belle connerie, n’est-ce pas ? Mais cela aurait pu être bien pire encore car, malgré mes vomissements, par simple peur de mes douleurs dorsales, j’ai failli prendre un troisième cachet en soirée… Je savais pertinemment que les médicaments ne me faisaient pas grand-chose mais j’avais trop peur de me battre sans assistance médicale. Je préférais maveugler que lutter seul contre la douleur. Certes j’avais fait une boulette mais quelle ne fût pas ma surprise lorsqu’aux urgences je découvris que je n’étais pas le seul en cause ! C’est à l’hôpital que j’apprends qu’il existe des protections gastriques limitant les effets indésirables de ces cachets… Me voilà bouche bée. Tout comme l’urgentiste lorsque je lui dis que je n’en avais pas eu malgré un traitement d’anti-inflammatoires de plus d’un mois. Pourquoi n’y avais-je pas eu droit ? Probablement que mon médecin traitant songeait davantage à boucher le trou de la sécurité sociale qu’à ma santé… Certes, ayant eu une fois affaire à son remplaçant, peut-être ne savait-il pas que je prenais ces cachets depuis déjà un mois, mais tout bon médecin est censé éviter ce genre d’ennuis en posant les bonnes questions. Je ne suis pas censé savoir que les anti-inflammatoires sont aussi dangereux. Enfin bon, je ne suis pas rancunier, il est toujours mon médecin traitant. Bien que j’aie failli en mourir, on peut tous faire des erreurs. Le seul souci est que lorsqu’un médecin fait une erreur, les conséquences sont d’un tout autre rang que celles que nous pouvons causer en fautant dans nos métiers respectifs. Toutefois, par méfiance, lorsque je vais désormais chez le médecin, quitte à sembler hypocondriaque, je joue aussi un peu son rôle. Mais sinon, à part ça, ce périple à l’hôpital était assez marrant, notamment lorsque les infirmières ont un instant cru que j’étais en train de mourir : mon cœur était descendu à 33 pulsations/minute. Eh oui, en dépit de ce corps disgracieux, se cachent au-dessous un cœur et des poumons d’athlète ! * Le temps passa, et quelques jours avant d’aller chez le rhumatologue, mon état empira nettement. Des sensations de brûlures me traversaient tout le corps comme si mon sang était en ébullition. Certes c’était parfaitement supportable mais néanmoins fortement angoissant. Cela ne se voyait pas mais je cédais réellement à la panique. La peur m’envahissait. D’autant qu’au même moment, apparut une sciatique : la fesse et la jambe droite me tiraillaient perpétuellement. Ma situation m’était devenue ingérable. Avant cette sciatique, je pouvais trouver un peu de répit lorsque j’étais bien allongé, mais à compter de son apparition, même allongé, jamais plus je n’étais tranquille. Chaque seconde de ma vie était devenue un supplice ! Je faisais alors du rhumatologue l’homme de la providence. Je me forçais à croire en lui parce qu’il est plus facile de tenir quand on croit qu’il y a encore de l’espoir, quand on croit qu’il existe toujours une chance, même infime, de voir son supplice s’arrêter… J’y mis donc toutes mes espérances. Vint enfin le jour de le rencontrer. Après un long détail de ce florilège de douleurs, il m’ausculta. Il regarda l’alignement de mon corps, ma mobilité, mon extraordinaire souplesse ne révélant à aucun instant mon passé de sportif ; il pratiqua ce qu’ils appellent le palpé-roulé afin de découvrir des zones douloureuses (cellulalgies) ; il exerça quelques pressions sur mes vertèbres pour étudier ma sensibilité aux pressions extérieures, mais rien de tout ça ne m’était douloureux ― chose qui a totalement changé puisque, aujourd’hui, je refuserais catégoriquement que l’on me refasse ces manipulations tant elles me sont pénibles. Le moindre contact avec mes épines dorsales me fait littéralement hurler. Et c’est pareil avec ce palpé-roulé : à la moindre pression, je braille. Je ne suis pourtant pas une chochotte, croyez-moi car le fait d’être encore en vie malgré ces souffrances est bien la preuve d’une grande force mentale ―. Suite à ces tests, le médecin m’envoya faire une scintigraphie osseuse ainsi qu’un test génétique afin de diagnostiquer une spondylarthrite ankylosante. Je ne retins logiquement pas le nom puisque, quoi que j’eusse pu avoir, je ne voulais qu’être soulagé de mes souffrances, peu m’importait la maladie. Mais si je n’avais pas retenu ce nom, c’était sans compter sur ma mère qui, elle, l’avait parfaitement enregistré. Etrangement, dès le lendemain, sur la table du salon, traînait un dépliant sur la spondylarthrite. Ma mère avait trouvé ça je ne sais où. De fait, je tiltai et fis le lien. Et comme à mon habitude, après avoir lu des témoignages sur cette maladie, pour ne pas changer, je me mis à flipper alors que je n’avais pas encore passé le moindre test. D’ailleurs le test génétique que je passai le lendemain, s’avéra négatif. Toutefois mes craintes ne partirent pas puisque j’avais lu que l’absence de ce gène n’excluait pas possibilité d’avoir cette affection. Et comme pour ne rien arranger, les résultats de la scintigraphie étaient parfaitement mitigés puisqu’ils ne permettaient ni d’affirmer ni d’infirmer la présence de cette spondylarthrite. Autant dire que cela n’aidait pas mes affaires… Je commençais même à croire qu’il était possible que l’on ne trouve jamais. Or il n’y a rien de pire que se battre contre un adversaire que l’on ne voit pas. Néanmoins ces examens ne furent pas inutiles pour autant puisqu’ils révélèrent une fissure au péroné gauche. Ce qui me fit une belle jambe… Quoi qu’il en fût, il ne me restait pas grand-chose à faire d’autre qu’attendre mon second rendez-vous chez le rhumatologue, début septembre. Comme d’habitude, je prenais mon mal en patience. Chaque examen, chaque nouveau rendez-vous chez le médecin constituait un moment clé car je me refusais de baisser les bras tant que l’on était encore en train de chercher. Si j’avais dû craquer, cela n’aurait été qu’après avoir tout fait, tout essayé. Chaque recherche médicale était donc un objectif auquel je m’accrochais. Je m’illusionnais en quelque sorte. Mais ces illusions tombèrent bien vite à l’eau lorsqu’à la fin de ce second rendez-vous, je n’obtins rien d’autre qu’un traitement symptomatique à base d’anti-inflammatoires, parfait signe d’impuissance, et une lettre pour un collègue ostéopathe. C’est alors que je comprends réellement ma situation. Je comprends que rien ne me soignera et qu’il y a des chances pour que cela persiste... Malgré cette résignation, je suis tout de même allé chez cette ostéopathe. Un mois plus tard quand même... Naturellement cela n’a rien arrangé. Ce ne sont pas 2 ou 3 craquages qui allaient tout résoudre. Par contre, s’étant livré aux mêmes tests que le premier rhumatologue, et ayant constaté que je réagissais fortement à ce palpé-roulé ainsi qu’à ces pressions sur la colonne, il me donna une nouvelle prise de sang à faire. Seulement, elle ne témoigna rien d’anormal. Seul mon corps était symptomatique. Mais compte tenu de cette évolution jointe à une toute nouvelle sensation de crampe au niveau de l’omoplate gauche, mes craintes toujours grandissantes me poussèrent à contacter le rhumatologue par téléphone pour lui faire part d’une proposition somme toute intelligente mais contre l’éthique : je voulais tester les biothérapies réservées au traitement de la spondylarthrite même si je ne l’avais pas. Mon raisonnement était le suivant : si cela ne me soulage pas, c’est qu’il ne s’agit définitivement pas d’une spondylarthrite. Mais si cela me soulage, que c’en soit une ou non, la seule chose à retenir est que l’on aurait trouvé quelque chose calmant mes douleurs. Certes c’est contre l’éthique mais je ne crois pas me tromper en affirmant qu’une personne souffrant de douleurs chroniques est prête à tout pour ne plus avoir mal. En tout cas, être un cobaye et subir de graves effets secondaires ne me dérangeaient pas. La mort ne me semblait plus la pire des choses qu’il puisse m’arriver. Au contraire, elle pouvait devenir une aubaine, un soulagement. Mais comme je m’en doutais, le médecin était un fin procédurier et refusa ; certainement davantage pour couvrir ses arrières que pour respecter la morale, ce qui est tout à fait compréhensible. Me voilà donc à nouveau seul contre la douleur. Certes pour m’aider, j’avais des anti-inflammatoires, des myorelaxants, des antidouleurs de niveau 2, mais autant dire que les prendre revenait à avaler des smarties qui vous foutent la chiasse. * Septembre 2006, Déjà une année et demie que ce calvaire persistait. La rentrée universitaire s’annonçait et je n’avais pas encore fait une croix sur mes rêves professionnels : je continuais à nager, je ressayai même la musculation et le stretching au cas où cela puisse m’aider, mais niet ! En tout cas, ce n’est pas faute d’avoir essayé… J’ai donc fait un choix, d’autant plus facile qu’ayant redoublé, je disposais déjà des cours d’IUFM : étant incapable de rester assis très longtemps, et ne supportant pas la position d’écriture où l’on a le dos arrondi, je décidai de rester à la maison continuellement et de réviser à domicile. Evidemment je n’étudiais que peu de temps par jour tant je ne résistais pas à la douleur… J’ai pourtant essayé nombre de choses pour m’aider, allant des plus communes comme utiliser un coussin chauffant ou se badigeonner de baume du Tigre, aux moins conventionnelles comme la Méthode Coué. J’ai également essayé de me dire que ce n’était pas moi qui avait mal mais mon corps, j’essayais de séparer le corps de l’esprit, mais tout ceci n’est pas dissociable, ça forme un tout. J’ai même tenté de réinterpréter la douleur en me persuadant que c’était une sensation agréable… Mais c’était inutile. C’était comme essayer de transformer un chien en chat juste par la pensée… Parfois, sachant que le cerveau ne parvient à traiter qu’une douleur à la fois, je m’infligeais volontairement d’autres souffrances : je me frappais le visage à coups de poings, je me pinçais, me mordais, j’essayais tout ! Je me coupais même la respiration pour tomber dans les pommes et oublier la douleur... Affolant n’est-ce pas ? C’est pourtant bien à cela que j’étais réduit tellement les douleurs m’insupportaient. Pas si étonnant finalement car lorsqu’on se trouve dans une situation dans laquelle on est impuissant, on ne peut pas rester sans rien faire, on devient prêt à tout, quoi que ce puisse être. Le plus surprenant à mes yeux, et peut-être moins aux vôtres, c’est que je suis allé jusqu’à implorer les cieux à genoux, priant de longues minutes durant alors que je ne suis absolument pas croyant… Belle hypocrisie n’est-ce pas ? Je ne me pensais pas capable de renoncer si facilement à mes convictions. Mais la douleur est ainsi, elle est plus forte que tout ce qui existe et tout ce en quoi l’on peut croire. Comme tout le monde, quand les choses vont mal, on porte notre regard au ciel juste pour sauver notre peau. Sans aucune honte, on accepte de retourner notre veste pourvu que cela nous aide. Et puis si tout s’arrange, on oublie à nouveau les cieux comme on l’a fait toute notre vie durant… Ça ne pouvait pas me faire de mal, allez-vous me dire, mais c’est faux ! Toute foi, toute croyance nous nuit car elle retarde l’acceptation, elle nous empêche de voir la réalité. Mais c’est ainsi, tous les hommes veulent croire aux miracles, ça les rassure. Fort heureusement, ces pensées n’ont fait que traverser brièvement mon esprit car je ne suis pas de ceux qui pensent notamment que les guérisseurs évangélistes sont des individus dotés de pouvoirs offerts par Dieu, mais plutôt des charlatans usant du pouvoir de suggestion sur des gens très réceptifs, très sensibles se laissant facilement emporter par la fougue créée par le rituel religieux. Certes il existe des témoignages de personnes en fauteuil roulant, incapables de bouger du fait de grosses douleurs articulaires, et qui après un sermon se sont remises à marcher, mais ceci n’est aucunement un miracle. C’est juste un effet placebo, c’est la conséquence de la rencontre entre la foi du malade et la transe créée par le prêcheur car la réunion de ces deux facteurs aboutit à la sécrétion d’une énorme quantité d’adrénaline (ou d’une autre hormone : endorphine, etc.) au moment du rituel, qui empêche alors le malade de ressentir ses douleurs. Et deux jours plus tard, une fois les émotions fortes passées, les douleurs reviennent… Malheureusement les croyants ne voient pas les choses ainsi. Malgré le retour de leurs troubles, ils ne remettent pas en question leurs croyances. Au contraire, ils trouvent des excuses à ces échecs afin de ne pas remettre en question ce qui les rassure, ce en quoi il trouve de l’espoir : certains se disent que c’est l’œuvre du Diable revenant à la charge, alors que d’autres pensent que ceci arrive parce qu’ils n’ont pas assez la foi. En clair, ils préfèrent trouver des explications extraordinaires et linéaires plutôt qu’ordinaires (complexes ou non) car ça les tranquillise et leur donne l’impression qu’il y a encore de l’espoir pour eux. Ils préfèrent ça quadmettre la vérité. Mais comme je l’ai dit, je ne fais pas partie de ces gens. Etre superstitieux ou croyant a toujours été une faiblesse à mes yeux. Il faut accepter la réalité, pas la fuir. Je ne suis pas pour autant un cartésien convaincu, au contraire. Pour moi, dès l’instant où une chose est, elle est rationnelle. Que l’on comprenne comment ou non, n’y change rien car « rien ne peut être en contradiction avec la nature, sinon en contradiction avec ce que nous en savons » (Chris Carter)... Néanmoins, je ne me laisse pas aller par l’hystérie et la peur en cherchant des explications rapides et faciles. Je rationalise autant que possible même si c’est moins évident car même si certains mythes se fondent sur des bases de la réalité, ils sont par-dessus tout des paraboles, des mauvaises interprétations de la réalité dues à un savoir trop maigre ou à des angoisses que l’on cherche à combattre et qui nous poussent à créer ce genre d’explications, absurdes les 4/5 du temps... Autrement dit, je préfère accepter tant bien que mal ma situation et mes tortures plutôt que m’aveugler de toute sorte de croyances qui ne seraient que faux espoirs. Je préfère affronter mes souffrances les yeux ouverts, aussi fortes soient-elles. Pour vous donner une idée de ma souffrance, voici une comparaison : je me suis cassé deux fois le bras par le passé. La première fois, j’eus une triple fracture, mon avant-bras formait un Z. J’estimais la douleur à 8/10. La seconde fois, 6 mois plus tard, ce fut la même fracture, seulement j’avais des broches dans le bras, ce qui rendait la chose encore plus insoutenable que la première fois puisque leur tension exerçait une pression pour redresser le membre. J’évaluais alors la douleur à 10/10. En m’y référant, lorsque mes douleurs dorsales atteignent leur summum, je les évalue à hauteur de ma première fracture, à 8/10. Jamais elles n’atteignent 10, fort heureusement. Néanmoins, vous vous doutez bien que ce zénith n’est pas continu, j’évalue donc ma moyenne à 5,5/10 aux bas mots. Mais ne pensez pas que cela rend la chose beaucoup plus supportable, ce serait une grave erreur car lorsque l’on est atteint de douleurs chroniques, on définit la douleur d’une toute autre manière. Une manière qui ne prend pas seulement l’intensité en compte, mais aussi la durée car c’est la chronicité qui rend cette pathologie insupportable. Ce qui n’est pas absurde puisque n’importe qui préférerait supporter une forte douleur quelques instants seulement plutôt qu’une petite pendant des heures. C’est comme parcourir 10 Km à pieds, il est plus chiant de les faire en marchant qu’en courant. Eh bien là, c’est pareil (du coup, vautré devant ma Tv, j’avais bien pitié de ces Jackass, Michael Youn et autre brochette d’idiots masochistes mettant leur santé en danger : ils s’amusent à se faire du mal, certainement pour avoir moins peur de la vie et des douleurs qu’elle nous réserve, mais ils ignorent tout de la vraie souffrance ; pas celle qui dure 5 minutes et puis s’en va, non, celle qui reste. S’ils la vivaient, ils arrêteraient bien vite leurs âneries et auraient beaucoup plus de respect pour la vie, leur corps et leur santé). Au cas où vous me preniez pour quelqu’un de douillet, voici deux gestes qui vous permettront de ressentir exactement la même douleur que moi, dans l’intensité et dans la sensation : concernant ma douleur à la colonne, saisissez votre avant-bras et serrez jusqu’à ce que vos os signalent la douleur. Imaginez-vous maintenant la même chose mais à la colonne cette fois-ci… Pour ma douleur dorsale gauche proche de l’omoplate, pincez-vous le muscle trapèze juste au-dessus de la clavicule, serrez jusqu’à ce que vous ressentiez comme une crampe, et imaginez-vous la même chose entre l’omoplate et la colonne… Il n’y a pas de quoi hurler effectivement, seulement ce test n’a duré qu’un court laps de temps. Essayez de tenir pendant plusieurs heures tout en vous disant que tout cela recommencera demain, après-demain et chaque jour qui suivra… Et si vous y parvenez, vous serez encore loin du compte car n’oubliez pas les autres douleurs comme la sciatique, les brûlures, et celles que je n’ai pas encore citées ; n’oubliez pas que ce n’était qu’un aperçu de la moyenne, non du maximum ; et n’oubliez pas non plus qu’une douleur dorsale est toujours moins supportable qu’une douleur aux membres ― car le dos, le visage et les yeux sont les parties du corps qui supportent le moins bien la douleur ― même si l’intensité est identique. Maintenant que je vous ai éclairé avec un maximum de précisions, est-ce que je vous semble toujours aussi fragile ? * Les mois s’écoulèrent, je ressentais l’impuissance médicale. Mais je me refusais à laisser tomber les recherches. Je voulais au moins être soulagé. Je ne demandais même plus d’être guéri mais juste d’être soulagé car j’avais déjà bien assez porté ma croix. Alors j’ai essayé les médecines douces. J’ai commencé par la microkinésithérapie qui est une forme d’acuponcture sans aiguilles, mais ce fût inefficace. Cela eut au moins le mérite de me faire rire tant l’arnaque est grossière : s’entraîner à jouer du piano sur votre peau, qui plus est sans enlever les vêtements du patient, ce n’est pas ça qui va régler des problèmes de dos ! Par contre c’est ce microkiné qui me parla pour la première fois de fibromyalgie. Une fois chez moi, je jetai un coup d’œil sur Internet. Mais voyant qu’il n’y avait pas de solution à cette pathologie, je me refusai à penser que je puisse en souffrir. J’en fis donc abstraction et ne gardai qu’une piètre opinion de la microkiné. Eh oui, la réalité est plus jolie et plus facile à supporter pour ceux qui la voient de dos… Je pris donc un peu de recul par rapport à ces médecines parallèles. Pourtant au moindre écho spectaculaire, je me berçais à nouveau de douces illusions afin de mieux fuir la réalité tant elle m’était difficile. C’est ainsi que je finis par aller voir, à trois reprises, un acuponcteur à Paris au prix de 120 euros la séance. Seulement ce n’est pas au prix de la consultation que l’on juge l’efficacité du praticien, mais ça je ne l’appris qu’en voyant mes douleurs revenir chaque matin… Ceci ne m’empêcha pas de continuer à voir d’autres chiropracteurs et homéopathes, chose parfaitement normale lorsque l’on est malade : on va voir tous les médecins, on essaye tous les médicaments, on veut faire tous les examens jusqu’à ce que l’on trouve une solution (mais aussi pour ne pas avoir à regretter de ne pas avoir assez cherché). Seulement, des solutions il n’y en a pas tout le temps ; du moins, ce n’est pas qu’il n’y a pas de solution, c’est surtout qu’on ne la connaît pas… Mais tout ça, on ne veut pas l’entendre lorsque l’on est malade. Ce qui n’est pas forcément une erreur car lorsque l’on souffre de douleurs chroniques, l’erreur que peuvent faire les médecins, c’est de négliger tout nouveau symptôme en réduisant les recherches et en le mettant sur le dos de la fibromyalgie (ou de l’hypocondrie si c’est ainsi que l’on est catalogué) alors que l’on peut très bien souffrir d’une autre maladie en plus de la fibromyalgie. Et ça, le sachant bien, quitte à sembler hypocondriaque, je jouais au médecin, je révisais chaque jugement, chaque test, juste ce qu’il fallait, ni trop ni trop peu. Et je n’avais pas tort car aucun médecin ne m’avais fait passer de scanner pour vérifier si ma sciatique avait ou non une origine physique. C’est moi qui l’exigeai. Le doc. ne fit aucun commentaire. Voilà qui est révélateur… Je pris ça pour un aveu et pour preuve que ma requête était sensée. * Octobre 2006, Je suis donc allé faire un scanner lombaire mais là encore, rien n’expliquait mes douleurs. Le médecin voyait cela comme un bon signe mais pas moi car je ne vois pas comment gagner une bataille si l’on ne voit pas son ennemi... Des examens qui ne révèlent rien d’anormal sont des examens qui vous disent que l’on n’a pas trouvé de problème auquel s’attaquer et donc aucun moyen de changer la situation ! C’est pourquoi il vaut mieux avoir une maladie mortelle pour laquelle on sait quoi faire plutôt qu’une pathologie inconnue « juste douloureuse », comme j’ai déjà entendu dire, pour laquelle il n’y a pas de médication. Bref, j’ai pris sur moi et essayé d’oublier ces stupides remarques de médecin. J’ai continué à chercher de mon côté jusqu’à avoir écho de la maladie de Lyme qui pouvait parfaitement expliquer mes symptômes d’autant que j’avais été piqué par une tique quelques mois plus tôt. Là encore aucun commentaire ne s’opposa à ma requête malgré l’absence de plaques rouges, signe majeur de la maladie de Lyme… Il faut croire que je suis moins hypocondriaque que raisonné… On peut me reprocher bien des choses, d’être inquiet, d’être un sale con ou un petit merdeux insolent et tout ce que vous voulez encore, mais pas d’avoir perdu ma lucidité car derrière mon arrogance apparente se dissimule en réalité ma lassitude à ne jamais être pris au sérieux du fait de mon audace intellectuelle peu conventionnelle, et non une quelconque prétention ! Malheureusement le test s’avéra négatif. Ce fut une nouvelle claque, comme à chaque fois puisque j’espérais vraiment avoir cette maladie afin de disposer enfin d’un moyen de guérison. Mais non, cela aurait été trop beau d’avoir juste une maladie plus ou moins grave… C’est alors que je me fis à l’idée qu’il puisse réellement s’agir de fibromyalgie malgré des statistiques démontrant que rares sont les jeunes hommes atteints de ce syndrome. Il fallait bien être honnête avec soi-même, tout concordait au point de sembler être une évidence. J’essayais de voir le bon côté de la chose, j’avais au moins un nom à mettre sur mon mal. Cela ne me redonnait aucun espoir, pourtant il est absolument essentiel pour un malade de savoir contre quoi il se bat, comme si mettre des mots sur les choses nous offrait un certain contrôle sur elles… C’est un peu comme une victime de méfait, elle veut, elle a besoin d’un coupable, ou pour se déresponsabiliser ou pour se venger ou pour d’autres raisons encore. Malgré cela, mon opinion était confuse car mon médecin traitant, ne croyant pas trop à la fibromyalgie, préférait parler de problèmes mécaniques. Il me dirigea alors vers le CHU de Nancy. Cette fois-ci aussi, de belles illusions naquirent… J’obtins le rendez-vous pour Janvier 2007, soit 3 mois plus tard. Je ne vous cache pas que le système médical commençait royalement à me taper sur le système, les délais étaient beaucoup trop longs. J’estimais qu’il devrait y avoir des priorités, et je jugeais mon cas comme prioritaire car comme tout malade, je pensais que personne ne pouvait souffrir plus que moi. Je ne supportais pas d’attendre, ce qui est légitime puisque pour faire quelques examens et voir quelques médecins, il aura fallu près de 2 années ! Deux années pour faire 6 heures d’examens et voir 2 spécialistes alors que cela aurait pu se faire en moins d’une semaine si le système médical daignait organiser son travail sous forme d’une chaîne comme il en existe parfois pour les tests de dépistage. Mais non, il faut être patient quand on est patient, d’où le nom peut-être... N’empêche que c’est vrai, le parcours médical reste un parcours du combattant pour des hommes à terre. Il faut se battre pour obtenir des examens et voir des spécialistes, il faut même le demander, c’est navrant ! Et ce n’est malheureusement pas la seule aberration que j’ai pu remarquer : - j’ai constaté à quel point le recours au traitement symptomatique à base d’anti-inflammatoires et antidouleurs était courant, comme si recherchait la cause était secondaire… Je soupçonne une raison purement économique car les médicaments coûtent moins chers que les examens médicaux. - les médecins, lorsqu’ils nous font faire une prise de sang par exemple, ne nous disent pas ce qu’ils cherchent ni ce que l’étude de la vitesse de sédimentation, de l’hémogramme et d’autres témoins démontre. Du coup nous ne savons pas quelles causes ce test a pu éliminer. Or, dans le cas d’affections de longue durée, langoisse du malade le pousse à mener ces propres recherches, ainsi ils risquent de s’inquiéter de causes que le médecin aura déjà depuis longtemps éliminées. Ce qui, en plus, nous fait mal apprécier le travail du médecin. - bien que je n’aie pas de solution à apporter, je trouve hilarant de voir tous les malades réunis dans une même pièce. Vous entrez pour un mal de dos, vous ressortez avec la varicelle… * Janvier 2007, Vint l’heure du rendez-vous à Nancy. Le médecin, comme tous les autres avant lui, écouta mon monologue et observa ma mobilité. Il n’observa rien de particulier mais n’exclut pas une forme mineure de spondylarthrite puisque cette maladie peut faire souffrir de longues années sans laisser d’autres signes apparents. Il alla même plus loin en émettant l’hypothèse que mes douleurs puissent être dues à des lésions tumorales rachidiennes. Il parvint à me faire croire que c’était souhaitable en affirmant qu’une opération réglerait tous mes soucis. Suivant ce raisonnement, je ne vis rien à redire. J’adhérai à sa vision même si je savais pertinemment qu’une opération à cet endroit, en contact de la moelle épinière, s’avérerait forcément risquée. Un mois plus tard, je fis donc une IRM pour vérifier la présence ou non de tumeurs. Seulement, ce jour-ci, je me rendis compte qu’aucun médecin ne m’avait réellement écouté. En effet, cette IRM était lombaire alors que je ne souffrais pas des lombaires. Tous les praticiens ne m’avaient écouté que d’une oreille. Tous faisaient un lien trop rapide entre ma sciatique et mes douleurs dorsales. Tous concluaient que je souffrais des lombaires. Pourtant je leur montrais réellement l’emplacement de mes douleurs dorsales. C’est proprement honteux de leur part ! Ils sont trop arrogants et pensent tout savoir, voilà pourquoi ils font de telles erreurs ; ils n’écoutent rien de ce qu’on leur dit, ils se basent sur leurs statistiques et font des conclusions avant même que vous ayez fini de vous expliquer. Trop sont des incapables ! Ils manquent d’humilité et de respect envers ceux qui leur servent de cobayes, ceux qui constituent pour eux des opportunités pour découvrir des choses extraordinaires et qui leur permettent de jouer à Dieu ! Logiquement l’IRM ne révéla rien. Quelle surprise… Malgré leur bourde, je ne me voyais pas retourner chez mon médecin traitant pour lui demander une IRM dorsale thoracique alors que je venais juste d’en faire une, même si lombaire. Si j’avais fait ça, il m’aurait assurément considéré comme hypocondriaque. Je ne voulais pas ça. Je pris donc mon mal en patience, je voulais laisser passer quelques temps avant d’y retourner. * Mars 2007, Le temps s’est écoulé et le moment de passer les examens écrits du CAPEPS arriva. Je dois bien avouer que je n’en avais rien à faire car je savais que tout était fini depuis longtemps. Si j’y suis allé, c’était uniquement pour ne pas avoir à subir les critiques de mon père qui me reprochait mon refus d’aller à la fac, tant il pensait que je n’avais que de petits bobos ; lui le type qui se plaint constamment pour un rien, pour un doigt écorché, une ampoule ou une tendinite, qui plus est devant moi, sans gêne ni retenue, alors que moi, on ne m’entend même pas… Enfin bon, passons là-dessus, je parlerai plus tard de ce modèle de tout ce qu’il ne faut pas faire ni être ― eh oui, d’une certaine manière on gagne à le connaître ―, non pour régler mes comptes mais pour l’informer de tout ce qu’il m’a fait contrairement à ce qu’il croit avoir fait… Sachez juste que je souffre au point qu’aucune rancune ne pourrait me pousser à souhaiter à qui que ce soit de vivre ça, pas même aux gens que je déteste, pas même à lui ! « Simple rancune et mots démesurés que je regretterais s’il venait à disparaître ? » Détrompez-vous car pas même en rêve je n’arrête mes coups. Ma conscience encourage mes pulsions inconscientes... Mais bon, si ça vous fait plaisir de croire que je ne suis qu’un individu rancunier et particulièrement ingrat, soit, je m’en cogne ! Bref, je pris sur moi, fis preuve d’une grande clémence et fis de mon mieux à ces putains d’examens. Mais au bout de 10 minutes, j’étais déjà en crise, mon dos me figeait par la douleur. Et ce ne fut pas le pire car en écrivant dans cette position dos et nuque arrondis, au bout de 20 minutes, naquit une nouvelle douleur. Cette fois-ci à la nuque. C’était là encore une sensation de serrage. C’était incroyablement intense, je ne parvenais plus à porter ma tête. Je pensais que ce n’était qu’une crispation passagère, j’écrivis donc en posant ma tête sur mon poing mais je ne tenais plus. J’ai cessé d’écrire après 30 minutes d’épreuve. Je posai mon stylo, fis quelques étirements de la nuque, mais la douleur persistait. Et elle persista les jours suivants, elle devint chronique. Tout ce que je retins de cette journée, c’est qu’en voulant faire preuve de grandeur d’âme, je n’obtins qu’un nouveau symptôme démesurément douloureux. Naturellement, comme à chaque nouvelle douleur, j’ai craqué d’autant plus que je ne la pensais pas possible. Je ne savais plus combien de temps encore je tiendrais. Les envies morbides montaient. Mais pas encore assez. Probablement parce qu’il me restait encore une solution : le centre antidouleur, pour lequel je n’obtins le rendez-vous que pour Juillet 2007, soit 6 mois après mon coup de fil de Janvier. Alors je tins bon. Dès le lendemain j’allai chez le médecin pour refaire le stock d’anti-inflammatoires, on en changea. Ceux-ci (cartrex ; celebrex) me firent plus d’effets que les premiers (bi-profénid ; brexin) auxquels j’avais sûrement développé une certaine tolérance. Toujours aucun effet sur le dos cela dit, mais du mieux sur le sacrum et la sciatique. Je profitai de ce rendez-vous pour quémander enfin une IRM appropriée. Je ne cachai pas la raison. Exprimer leur bourde suffit à convaincre. * 14 Avril 2007, Un grand changement se produisit, je retrouvai un véritable espoir car mes douleurs au dos s’était fortement calmées, et ce, depuis 2 jours déjà. J’avais nettement moins mal. Pourtant je ne savais pas comment réagir. Certes c’était une excellente nouvelle mais je craignais que cela ne dure que peu de temps puisqu’un zeste de douleur restait. C’est pourquoi je n’en ai parlé à personne. D’ailleurs je ne faisais que peu d’efforts, je ne voulais pas tester mon corps. Je ne voulais pas vérifier si l’intensité physique ferait revenir les douleurs ou non. J’en avais trop peur, trop peur de savoir. Je voulais y aller à tâtons et vérifier que cette accalmie dure. Je ne voulais pas me faire une fausse joie et risquer de tomber d’encore plus haut car ce serait comme tendre une croquette à un chien affamé, le laisser la lécher et la lui retirer au dernier moment, ce serait ignoble. Je craignais trop de faire une rechute. Je voulais profiter de cette sensation d’apaisement que je n’avais plus ressenti depuis près de 2 ans déjà. D’autre part, une partie de moi n’était toujours pas satisfaite. J’espérais davantage, je voulais être totalement guéri. Je me surprenais moi-même de cette pensée car avant cela je me serais contenté de peu, mais il faut croire que même lorsque l’on est atteint de grands maux, l’avidité humaine ne disparaît jamais, si bien qu’elle ressurgit au premier rayon de soleil en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, et fait de nous d’éternels insatisfaits… Et comme je le craignais, cette accalmie n’a pas durée plus de 5 jours. Curieusement je l’ai bien géré psychologiquement. Je l’ai d’autant mieux géré que deux de mes douleurs s’apaisaient franchement : ma sciatique avait déjà déclinée depuis quelques temps, ce qui m’offrit pas mal de repos. Je pouvais enfin retrouver une totale tranquillité lorsque j’étais allongé. Et mes sensations de brûlures aussi se calmaient, elles disparaissaient même. J’ai remarqué que plus je m’activais, moins ces sensations brûlantes se présentaient. Certes j’étais amorphe durant tout l’hiver mais pas l’été dernier alors que les brûlures étaient déjà là, je ne suis donc pas persuadé que cela ait un lien direct avec l’activité physique. Les médecins, eux, sauteraient assurément sur l’occasion pour affirmer cette supposition car ça leur permettrait de se débarrasser de votre cas et de ce sentiment d’impuissance qu’ils n’aiment pas ressentir lorsqu’ils jouent à Dieu (lorsqu’ils n’ont pas de réponse, ils sont comme les malades, ils ne voient que ce qu’ils veulent bien voir et n’entendent que ce qu’ils veulent bien entendre ; en clair, ils cherchent des faux prétextes qui les arrangent bien : hyper-immobilité, déconditionnement à l’effort, etc. Et si l’on vient à contredire les brillants médecins, nous ne sommes alors que de petits cons pensant que regarder Dr House fait d’eux des médecins)… Mais peu m’importait tout ça, je ne retenais que le fait d’avoir deux fardeaux en moins. Ceci ne me redonna pas d’espoir mais du courage. * Juin 2007, Je passai enfin cette IRM dorsale thoracique. Elle révéla deux mini-hernies discales entre T1-T2 et T2-T3 mais sans conflit avec le cordon médullaire, donc rien de particulier d’après les médecins. Bien que je sois convaincu que ces anomalies n’expliquent pas mes douleurs, je ne suis pas certain que ce soit si anodin… Quoiqu’il en soit, cette IRM n’a rien révélé de grave. Etais-je déçu ? Pouvais-je l’être encore ? Je n’avais plus qu’à compter sur le centre antidouleur. Patientant tout ce mois de juin, je décidai de stopper les médicaments, je n’en voulais plus. J’avais mon compte de ces effets secondaires. De toute manière ils n’avaient que peu d’effets positifs. Et finalement je ne m’étais pas surestimé : m’en passer ne changeait rien, je n’avais pas plus mal. Par contre je continuais les myorelaxants car une récente crispation de la mâchoire s’était installée chroniquement. Peu douloureuse mais pénible. Suffisante pour déprimer. * Juillet 2007, Après 6 mois d’attente, me voici au centre antidouleur. J’en attendais beaucoup. J’espérais une solution miracle. L’anesthésiste et moi parlâmes pendant une heure, nous évoquâmes la fibromyalgie sans nous attarder dessus, puis vint la fin de séance. Etant venu pour recevoir de la morphine ou un de ses dérivés, je m’attendais à recevoir une prescription à cet effet, mais non… Je n’osai pas la réclamer, je craignais de passer pour un usurpateur, un drogué. Par contre il m’envoya vers la psychologue avec laquelle il travaillait, chose commune à tout centre antidouleur. Seulement je ne vis pas ça d’un très bon œil. J’ai pété les plombs intérieurement, je n’avais que faire de la psy. Pour moi ceci était encore une attaque : « encore un médecin qui, lorsqu’il ne sait pas, cherche de fausses raisons pour se déresponsabiliser et m’accuser ! Encore un donneur de leçons qui oublie de les accepter pour lui-même, et d’en accepter d’autres ! » Pour moi, rien n’avait à voir avec la psychologie : « ce qui est inexpliqué n’est pas forcément inexplicable ou d’ordre psychologique ! » Je ne voulais pas de psy, je ne voulais pas m’apitoyer encore plus sur mon sort. Je savais que ce n’était pas le but mais j’avais précédemment assisté à une réunion collective autour de la fibromyalgie, et je n’y ai vu que des dépressifs en puissance. C’était à se tirer une balle ! Mais bon, j’ai cédé, je suis allé voir la psy en attendant de revenir voir l’anesthésiste près de 2 mois plus tard. Je ne vous cache pas que je n’y suis pas allé pas de bon cœur. J’expliquerai plus tard pourquoi. * Septembre 2007, Me revoici, me revoilà chez l’anesthésiste. Pendant une heure, blabla et bla. Fin de consultation, langoisse monte. Il n’a toujours pas évoqué le moindre traitement. L’énervement monte aussi, à plus forte raison qu’il a réellement voulu me laisser partir sans prescription. J’hallucinais, j’étais sidéré. Mais cette fois-ci, pas question de m’écraser. Je devins sarcastique et condescendant (comme à mon habitude finalement) : « croyez-vous que je sois venu là juste pour discuter avec vous ? Pensez-vous que certains martyres viennent vous voir pour vos beaux yeux, si tant est qu’ils soient beaux ? Je suis désolé d’être si offensant, je ne suis peut-être qu’un petit con mais ne vous foutriez-vous pas un petit peu de ma gueule, qui plus est d’une manière assez lâche je dois dire ? » … Naturellement il essaya de jouer au sage, de se montrer plus mature que moi en restant calme et civilisé, seulement la politesse n’est pas forcément gage de sagesse, c’est bien souvent de l’hypocrisie ! Enfin, passons… Il me laissa parler jusqu’à évoquer la morphine, puis m’interrompit pour m’expliquer que la morphine n’a aucun effet sur les cas comme moi (je crois que la morphine bloque la transmission d’un message nerveux douloureux en provenance de la périphérie vers le cerveau. Or mes douleurs ne seraient pas d’origines périphériques mais cérébrales. Ce serait pourquoi les opiacés n’auraient aucun effet. Cela dit, le fait qu’ils en aient eu un temps, même moindre, ne peut pas être sans signification… Enfin bon, je ne suis pas médecin, je ne comprends rien à tout ça, je viens même très certainement de dire quelques âneries). Il me prescrivit donc du laroxyl. C’est un antidépresseur. Je me suis surpris à ne pas partir au quart de tour dès ces mots prononcés, j’ai écouté son explication : les antidépresseurs, à dosage moindre, agisse sur les douleurs chroniques en régularisant tant bien que mal le fonctionnement du cerveau, c’est pourquoi ce sont eux que l’on prescrit aux patients comme moi. L’ayant écouté, et pris dans ma fougue, j’osai même faire une proposition risible de part son origine mais pas forcément stupide : « étant probablement dues à un problème au cerveau, et ayant vu dans Dr. House (ça y est, vous riez ?) l’effet bénéfique d’un coma artificiel crée par kétamine, ne pourrait-on pas essayer la même chose pour remettre le cerveau à zéro ? Certes c’est de la fiction, mais elle n’est pas toujours si éloignée de la réalité. D’un semblant de folie peut naître le génie. Je suis prêt à servir de cobaye si la déontologie l’autorise. Qu’importent les effets secondaires si c’est un mal pour un bien ! » Mais comme vous, il ria. Pas trop, certainement pour ne pas m’offenser, mais il ria et me prit forcément pour un hypocondriaque. Bien que moi-même en riais, j’espérais une autre réaction de sa part. D’ailleurs je ne trouve toujours pas cette proposition si absurde. Par contre j’admets qu’à cette époque, j’étais prêt à tout, même à me choquer électriquement le cerveau si on me l’avait proposé. Je regrettais l’ancien temps. Je n’avais que faire de perdre la mémoire ou de devenir attardé, rien ne me semblait pire que ma douleur. Pendant près de 2 mois, je suivis ce traitement particulièrement dégueulasse. Je suis progressivement arrivé à un dosage de 25 mg/jour. Mais les effets étaient maigres, je dormais constamment, j’avais envie de vomir, et mon dos n’allait pas mieux. Autant dire que c’était un échec. Je ne voyais plus d’intérêt à continuer ce traitement ni aucun autre d’ailleurs. C’est pourquoi je décidai d’arrêter d’aller au centre antidouleur. Pourtant j’y avais mis toutes mes espérances. Mais c’était décidé, j’allais me battre seul, à force de courage et de volonté ! Je m’étais définitivement fait une raison. Enfin, c’est vite dit car tout juste le sevrage terminé, d’importants maux de tête firent leur apparition. Ils étaient persistants, ils revenaient chaque jour et étaient présents toute la journée. C’était carrément insoutenable. J’avais l’impression d’avoir un éléphant assis sur ma tête. Les douleurs se situaient en arrière du crâne, au niveau du cervelet et du bulbe. En plus de ça, j’avais la sensation de planer, d’être déséquilibré, et ma nuque me donnait l’impression d’être coincée. J’en avais plein le cul : « pourquoi moi, pourquoi ?! ». Je craquai, je pleurais seul dans mon lit. J’étais à bout, je n’en pouvais plus. Tout juste lorsque je retrouvais un peu de volonté, le sort revenait s’acharner sur moi comme s’il voulait me dire « n’espère rien mon petit. Toi, c’est décidé, tu vas morfler ! »… Si c’est le karma, il faut croire que je suis une personne sacrément mauvaise… Toutefois je parvins à me protéger des envies suicidaires en me mettant des œillères : à la même période, germèrent des migraines ophtalmiques et des troubles visuels. Or je passais beaucoup de temps à écrire sur mon PC, je fis donc un lien. Et il s’avéra que j’avais effectivement besoin de lunettes et de rééducation oculaire. Mais malgré ces corrections et les médicaments (seglor) que je prenais en parallèle contre les céphalées, ma situation ne s’améliora pas. Les douleurs revenaient toujours, même après 2 mois. Je fis tout de même un scanner cérébral pour éliminer toute suspicion de tumeur. Je vais en outrager plus d’un mais je souhaitais presque avoir un cancer. Au point où j’en étais, je me disais « y a que 2 solutions si tu en as bien un, soit tu en guéris et tu n’as plus mal au crâne, soit tu claques et tu n’as plus mal nulle part » ; l’une comme l’autre me convenait ― jamais je n’aurais pensé qu’un jour je prierai pour avoir une tumeur… ―. Mais le scanner était normal, sauf ma selle turcique qui était vide. Allez savoir ce que ce charabia peut bien vouloir dire… Suite à cela, on m’envoya chez un rhumatologue, encore une fois. Il fit craquer mon dos, ma nuque ― allez y voir un lien avec les céphalées lorsque vous n’êtes pas médecin ― mais les jours qui suivirent, proches comme éloignés, ne furent pas différents des précédents. Au passage, j’eus encore une fois droit au discours qu’ils tiennent tous lorsqu’ils ne comprennent pas un cas. Il me responsabilisa, il m’accusa de trop peu m’activer, de trop m’isoler, il parla de déconditionnement à l’effort. Comme les autres avant lui, il voyait d’un mauvais œil le fait de rester continuellement à la maison, il lui était anormal de refuser de travailler. Il osa même dire que je manquais de volonté. Pourtant si je me souviens bien, j’ai passé mes oraux du CAPEPS avec de très fortes douleurs déjà présentes ; je l’ai même repassé une seconde fois. Si ça, ce n’est pas de la volonté, je ne saurai jamais ce que c’est, ni personne ! Si je me refusais à travailler, ce n’était pas par manque de volonté mais par manque de force. Comment aller de l’avant quand on n’arrive plus rien faire ? Je n’étais pas capable de gérer 2 choses en même temps. Je voulais d’abord m’occuper de mes douleurs. Je suis désolé si je n’avais pas les mêmes préoccupations que les jeunes de mon âge, à savoir travailler, déménager ou baiser ; mais rien de tout ça, et encore moins travailler n’était une priorité. Seule ma santé m’importait. Comment aurais-je pu envisager de travailler alors que m’imaginer la semaine suivante était déjà une projection lointaine dans l’avenir ? Mais tous n’ont que ce mot à la bouche : travail, travail. Comme si travailler allait arranger mes affaires… Je ne voulais pas survivre, je voulais vivre. Suivant cette envie, je retournai chez le médecin traitant pour le forcer à poursuivre les recherches. Je n’avais que faire de savoir que j’avais presque déjà tout fait ! Rien ne me disait qu’il n’y avait aucune solution ! Et mon instinct ne m’avait pas trompé car il me conseilla de reprendre le laroxyl, ce qui s’avéra assez efficace puisque mes maux de tête se firent moins agressifs. Je restai donc 4 mois sous traitement jusqu’à ce que je commence à perdre mes cheveux. « Quel lien avec le laroxyl » me direz-vous ; eh bien aucun si ce n’est mon refus de voir cette calvitie débutante. Je m’étais persuadé qu’arrêter le laroxyl ferait cesser ma chute de cheveux. C’est ce qu’Howard Bloom appellerait une « illusion de contrôle ». C’est le déni de ce que l’on ne peut contrôler ou comprendre. Il se caractérise par l’opposition aux explications qui ne nous conviennent pas, et par l’élaboration de théories, de relations explicatives le plus souvent insensées, créées pour se convaincre d’avoir une forme de contrôle sur ces choses incontrôlables qui nous inquiètent (comprendre est une forme de contrôle, c’est pourquoi on peut parfaitement parler d’illusion de contrôle lorsqu’il s’agit juste d’élaboration d’explications sans suites comportementales). Et j’insiste sur « inquiètent » car si ces choses ne nous inquiètent pas, alors le sentiment d’incompréhension ou d’incontrôlabilité n’engendre pas forcément d’illusion de contrôle puisque sans cette inquiétude ou cet intérêt pour ces choses, on ne les désire pas spécialement autres, on les accepte tout bonnement comme elles sont même si l’on n’y comprend rien ou que l’on ne contrôle rien… Autrement dit, loin d’être une acceptation de la réalité avec ses mystères, ses difficultés et ses angoisses, il s’agit d’une fuite de celle-ci en se racontant des histoires, en se mystifiant de toutes sortes de façons afin de ne plus voir le monde tel qu’il est mais tel qu’on le veut. C’est une fuite de la réalité pour une autre, celle des peurs intérieures qui nous poussent à plusieurs mécanismes de défenses : le refus de connaître la réalité (exemple : « je ne veux pas savoir s’il y a des serpents, je préfère ne pas savoir car je ne supporterais pas de savoir qu’il puisse y en avoir »), la mystification, les interprétations arrangeantes, etc. Devant la réalité et ce qu’elle nous dévoile, ainsi que selon la connaissance que l’on en a et selon notre psyché, ou nous l’acceptons telle qu’elle est, ou nous trouvons secours dans l’illusion, c’est-à-dire en n’y voyant ou en ne pensant que ce qui nous convient. Plus simplement, nous avons tendance à inventer des mythes pour expliquer par des interprétations arrangeantes ce que nous sommes incapables de comprendre ou de contrôler. Tout mythe fut créé dans l’optique de trouver un sens à des évènements que la science ne pouvait expliquer en son temps, tout comme les références occultes (sorcellerie, astrologie, cartomancie, numérologie, chiromancie et autres formes de voyance), les rituels et autres superstitions ne servent qu’à garder l’impression que l’on peut s’assurer de conserver ou gagner ce que l’on aime, et repousser ou éviter ce que l’on déteste. En d’autres mots, ces croyances ne servent qu’à conserver ou obtenir l’impression de toujours contrôler sa vie, ne serait-ce que d’un doigt... Exemple du mythe du karma (si vous faites le bien, alors il vous arrivera de bonnes choses ; si vous faites le mal, il vous en arrivera de mauvaises), il permet aux gens qui y croient d’avoir l’impression de pouvoir contrôler ce qui leur arrivera : s’ils veulent avoir de la chance, conserver la santé, trouver l’amour, la fortune et éviter tout ce qui leur est désagréable, ils n’ont qu’à faire le bien... Il s’agit alors encore et toujours d’illusions de contrôle. Ainsi expliqué, à l’incompréhension de l’homme sur ce qui l’entoure, se joint généralement une crainte, un sentiment d’impuissance particulièrement angoissant. En conséquence l’homme préfère se voiler les yeux par toutes sortes de convictions plutôt qu’admettre qu’il ne pourra pas toujours tout maîtriser comme il le souhaite. Il refoule alors cette peur par une illusion. Y croire n’est donc pas de la folie mais du déni. Vous l’aurez certainement compris, c’est bien plus encore que croire en un mythe ou une explication étrange, c’est carrément vouloir que ça existe, un peu à la manière de ces gens qui voient le visage de la Vierge ou des vaisseaux extraterrestres à tout va alors qu’il s’agit d’événements autres et parfaitement ordinaires (illusion d’optique ; confusion de formes : un ballon de baudruche très éloigné et donc méconnaissable mais donnant l’impression d’un vaisseau stagnant au-dessus de nos têtes ; erreur d’esprit consistant à confondre OVNI et vaisseau extraterrestre, comme avec le ballon de baudruche qui était juste un OVNI ; phénomène météorologique mettant en jeux les gaz de l’atmosphère ; etc.) dont ils refusent l’évocation parce qu’ils préfèrent et veulent croire à l’extraordinaire ; extraordinaire qui leur semble donc moins insensé et improbable que l’ordinaire, comme si l’ordinaire était plus extraordinaire encore que l’extraordinaire... En d’autres mots, ils ne voient que ce qu’ils veulent voir, et n’en tirent que des conclusions qui les arrangent. Leur vision est irréfutable, par contre l’interprétation qu’ils en font, l’est nettement moins ; mais s’en convainquent néanmoins afin de mieux se rassurer. Cela étant, le raisonnement marche dans les deux sens, il vaut aussi bien pour ceux qui élaborent des explications étranges que pour ceux qui rationalisent à tout prix. En effet, certains rejettent le surnaturel parce qu’ils en ont peur. Ils refusent de parler de fantômes ou d’OVNI parce que ça les angoisse, ils se rassurent alors par leurs convictions cartésiennes. Refuser le surnaturel et ne croire qu’en l’ordinaire peut ainsi être considéré comme une illusion de contrôle lorsque ce positionnement ne relève plus de raisonnements intellectuels mais plutôt d’un état pathologique créé par la peur. Choisir d’y croire ou de ne pas y croire parce que cela vous rassure, est une illusion de contrôle. Plus encore, une illusion de contrôle est également le refus d’admettre que les coïncidences existent car elles ne nous offrent aucun contrôle, aucune solution pour empêcher que cela ne se reproduise dans le cas où leurs conséquences nous dérangent, ou faire en sorte que cela se réitère si elles nous plaisent… C’est pourquoi interpréter une coïncidence sans réels arguments, c’est se construire une illusion de contrôle, un peu comme Albert Einstein qui pensait que les coïncidences sont ce que fait Dieu pour rester anonyme… Pour résumer grossièrement, nos croyances sont le produit de nos peurs. Les croyances erronées que sont la plupart des croyances, naissent de la peur ou d’émotions créant une forme de peur, telles que la douleur et la peine (peur de souffrir), la déception (peur de revivre la même chose, peur de ne pas pouvoir faire face, etc.), le stress (peur d’échouer, etc.), l’affection (peur de perdre les choses que l’on aime), l’attirance et l’envie (peur ne pas obtenir ce que l’on aime) ou autres qui inspirent un sentiment d’inquiétude mêlé à un sentiment d’incompréhension, d’impuissance ou d’incontrôlabilité qui nous poussent alors à rejeter la réalité (= déni) pour une interprétation plus rassurante nous offrant l’impression inverse que celle initiale, l’impression de comprendre ou de contrôler les choses (= illusion de contrôle), nous offrant en d’autres mots un sentiment de sécurité et non plus l’angoisse première ressentie dans la situation anxiogène… Les croyances reposent donc sur ces quelques notions : sentiment d’impuissance ou d’incompréhension + inquiétude, déni, interprétation arrangeante de la réalité, et illusion de contrôle. Elles naissent de cela puis se maintiennent très certainement pour ces mêmes raisons et parfois pour le simple divertissement qu’elles créent… Mais même en étant conscient de tout ça, et malgré mon inconscient me révélant en rêve que je finirai chauve, cette croyance m’arrangeait. C’est pourquoi, fidèle à mes espérances, j’entrepris un nouveau sevrage. Mais cette fois-ci, je le fis très lentement car ayant procédé un peu rapidement la première fois, voir même très rapidement, j’avais toujours à l’idée que ce n’était peut-être pas un hasard si mes céphalées étaient apparues juste après le sevrage ; voilà pourquoi j’étais si facilement prêt à stopper le laroxyl malgré l’apaisement qu’il générait sur mes migraines. Je ne suis pas si futile et superficiel, je n’aurais pas sacrifié ma santé juste pour éviter de devenir trop laid. Le culte de l’apparence n’est pas trop pressant chez moi. Du coup, après 2 mois de désaccoutumance, j’appris que si ma relation entre laroxyl et calvitie était fausse (snif snif), celle entre sevrage et maux de tête l’était beaucoup moins : je n’avais plus de migraines. Je fus surpris, agréablement surpris. Je ne pensais pas cette relation possible. Je l’aurai tout de même appris à mes dépens : 8 mois de migraines juste à cause d’un sevrage accéléré. Ça laisse à réfléchir sur ce qu’on prend et comment on le prend… L’explication est peut-être toute autre, il est possible que ce ne soit qu’une coïncidence où le résultat d’autosuggestions positives, qui sait ? Ce n’est pas parce que ces explications sont plus farfelues et moins probables que l’autre, qu’elles sont pour autant impossibles, mais j’y crois moins. J’ai donc décidé, quelle que soit la vérité, par précaution, de me passer définitivement de médicaments. Dorénavant je composerai tant bien que mal avec la douleur, je me suis fait une raison, ce qui ne rend pas la chose plus facile à supporter pour autant. Après tout, comme on me l’a déjà si bien dit, je n’ai qu’à supporter quelques douleurs chroniques sacrales, dorsales et cervicales en plus de douleurs mécaniques aux lombaires… Qu’est-ce donc, voyons ?! Plus sérieusement, je me sens réellement capable de supporter mon état (si tant est qu’il n’empire plus) car j’ai déjà passé le plus dur, à savoir la première année. Avec le recul, je me surprends à avoir tenu le coup, je ne me rendais pas compte de l’exploit que j’accomplissais : continuer à vivre alors qu’il fallait renoncer à tout, qui plus est dans un état de souffrance innommable… Aujourd’hui je sais que j’ai réalisé un miracle. Mais de là à finir le conte par « il vécut heureux et eut beaucoup d’enfants », reste encore une étape, la guérison. Sans ça, je ne me vois pas heureux car la souffrance vous rappelle toujours à votre condition.
Posted on: Sat, 19 Oct 2013 06:59:17 +0000

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