LE 4 DECEMBRE 2012 ATTAQUE DU SIEGE DE L’UGTT PAR DES CENTAINES - TopicsExpress



          

LE 4 DECEMBRE 2012 ATTAQUE DU SIEGE DE L’UGTT PAR DES CENTAINES DE MILICIENS LPR LE JOUR DE LA COMMEMORATION DE L’ASSASSINAT DE F. HACHED Les affrontements du 04 décembre font suite à une année de confrontation entre le parti au pouvoir et la centrale syndicale Au cours de l’année 2012, avant le 04 décembre, plusieurs incidents graves ont marqué les relations entre la centrale syndicale et le parti islamiste au pouvoir : - Des locaux et des cadres de la centrale syndi-cale ont fait l’objet d’agressions dans plusieurs villes et régions de la République : à Fériana en février, à Bizerte en mai, à Sfax en aout, à Jendouba et à Nabeul en octobre… L’UGTT accuse des parties proches du mouvement Ennahdha d’être les auteurs de ces actes de malveillances ; - Au mois d’aout, à Sfax, des associations islamistes ont appelé à la « purification » de l’UGTT ; - Seuls Ennahdha et le CPR boycottent l’ « initiative du dialogue national » organisée par l’UGTT mi octobre. Dans ce contexte, deux jours après la signature entre l’UGTT et le Gouvernement d’un accord mettant fin au soulèvement de Siliana, le jour de la signature entre le Gouvernement, l’UTICA et l’UGTT d’un accord sur les majorations salariales dans les secteurs publics et privés, le jour même de la commémoration du soixantième anniversaire de l’assassinat du leader Farhat Hached fondateur de la centrale syndicale, des miliciens pro-Ennahdha s’attaquent au siège de l’UGTT, place Mohamed Ali à Tunis, et au cortège se rendant au mausolée de Farhat Hached à la Kasbah. Dans l’après midi du mardi 04 décembre 2012, alors que des membres de la Direction de l’UGTT se rendent au mausolée de Farhat Hached à la Kasbah, des centaines (500 à 800 selon les sources) de manifestants, devant le siège de l’UGTT, scandent des slogans hostiles à la centrale ouvrière et à sa direction en appelant à la purification de l’UGTT, banderoles à l’appui. Le service d’ordre de la centrale ouvrière en sous nombre tente de protéger l’accès du siège de l’UGTT. Des coups et des insultes fusent. Des bâtons et des matraques font vite leur apparition de part et d’autre. Les syndicalistes se réfugient à l’intérieur du bâtiment et verrouillent les accès du siège. Ceux qui sont restés à l’extérieur sont passés à tabac par les miliciens pro-Ennahdha. Après plus d’une heure d’affrontements, les forces de l’ordre finissent par arriver et à protéger le siège de la centrale. Au même moment, à la Kasbah, les partisans du parti au pouvoir tentent de bloquer le cortège de l’UGTT : slogans hostiles, insultes et jets de divers projectiles. Saïd Aïdi qui rejoignait le cortège de l’UGTT est pris à partie et molesté par des dizaines de miliciens. Le cortège de l’UGTT réussit, grâce à l’interposition de la police à rejoindre finalement le mausolée de Farhat Hached. Les milices pro-Ennahdha ont prémédité leur attaque de l’UGTT Dès le soir de ce mardi 04 décembre 2012 les déclarations se succèdent : • L’UGTT condamne l’agression de son siège et de ses membres. Elle accuse la ligue autopro-clameé « de protection de la révolution » de ces agressions ; • Le ministère de l’Intérieur confirme les affrontements de l’après midi, devant le siège de la centrale syndicale, entre des membres de la ligue de protection de la révolution et des syndicalistes. Le ministère de l’Intérieur ne précise pas si la manifestation de la ligue avait été autorisée ; • Le président de la ligue de protection de la révolution nie la participation de ses membres à la manifestation, de la place Mohamed Ali, contre l’UGTT ; • Les partis d’opposition civile et Ettakatol condamnent séparément l’agression de l’UGTT, appellent à la dissolution des ligues de protection de la révolution et à la constitution d’une commission d’enquête indépendante ; • A l’opposé, Ennahdha condamne l’agression des manifestants pro-Ennahdha de la ligue de protection de la révolution par « les miliciens entrainés » de l’UGTT. Rached Ghannouchi monte seul au créneau et défend mordicus les ligues de protection de la révolution Le lendemain, mercredi, les déclarations, communiqués et prises de position se poursuivent tout au long de la journée : • Le bureau exécutif de la centrale ouvrière dénonce une « attaque préméditée » menée par une « horde de miliciens nahdhaouis…, perpétrée par les milices pro-gouvernementales connues sous l’appellation de ligue de protection de la révolution » ; • Le président de la République, comme le Premier ministre, condamne la violence d’où qu’elle vienne, appelle au calme et au dialogue. Le président de l’ANC condamne d’une manière plus explicite les agressions de l’UGTT et appelle à l’ouverture d’une enquête indépendante. Les membres de la Troïka, divisés sur les évènements de la veille, se gardent de faire une déclaration commune, cependant ils commémorent ensemble le soixantième anniversaire de l’assassinat de Farhat Hached mais sans la participation des représentants de la famille du défunt ni celle de l’UGTT ; • De son coté, Rached Ghannouchi, lors d’une conférence de presse, déclare que la ligue de protection de la révolution est « la conscience de la révolution » et que ceux sont « les milices entrainées de l’UGTT » qui sont la cause des incidents place Mohamed Ali. « Ceux sont les leaders extrémistes de l’UGTT qui ne veulent pas que la Tunisie avance. Ces personnes enveniment l’atmosphère… En collaboration avec les résidus du régime déchu, ces personnes feront tout pour mener la Tunisie à sa perte… » ; • Pour Khélil Zaouïa, ministre des affaires sociales, l’agression du siège de l’UGTT, organisée et planifiée d’avance, est inacceptable ; • La confédération internationale des syndicats (ITUC) et la confédération européenne des syndicats (ETUC) condamnent toutes deux les agressions contre l’UGTT et réaffirment leur soutien et leur solidarité avec la centrale tunisienne ; • L’opposition annonce le boycotte des séances plénières de l’ANC durant trois jours. Des grèves et des marches de soutien à l’UGTT sont organisées dans plusieurs villes et régions ; La virulence des critiques de Rached Ghannouchi à l’égard de l’UGTT laisse peu de place à la négociation – Le Gouvernement s’efface devant les prises de position du leader d’Ennahdha Tard dans la soirée du mercredi, à l’issue d’une longue réunion, la commission administrative nationale de l’UGTT publie un communiqué par lequel elle déclare en substance : « … Considérons que l’attaque barbare, mardi 4 décembre 2012, contre le siège de l’UGTT constitue un acte gravissime qui à été préparé et précédé par des déclarations incendiaires et d’incitations à la haine contre l’Organisation et les syndicalistes, émanant des dirigeants de partis et de responsables du gouvernement provisoire… Tenons le gouvernement pour responsable de la recrudescence des violences perpétrées à l’encontre de toutes les composantes de la société civile dont l’UGTT. Nous réclamons également : de poursuivre les agresseurs en justice…, de dissoudre les « ligues de protection de la révolution » dont l’implication dans les derniers événements survenus dans notre pays au cours des derniers mois est avérée et dont l’appartenance aux milices agissant en toute impunité sous les ordres du parti au pouvoir pour attaquer tous ceux qui sont porteurs d’opinions contraires est attestée, de présenter une plainte auprès de l’Organisation internationale du travail (OIT)… et annonçons qu’une grève générale nationale est décrétée pour toute la journée de jeudi 13 décembre 2012… » Suite à l’annonce de la grève générale, s’engage pendant toute une semaine un bras de fer entre la direction de la centrale syndicale et la direction du mouvement Ennahdha, entre Houcine Abassi et Rached Ghannouchi. Des manifestations de sou-tien s’organisent de part et d’autre. L’UGTT continuent de recevoir des messages de soutien de la part des régions, d’organisations professionnelles, des mouvements d’opposition civile, de syndicats étrangers et d’organisations internationales. Des manifestations de soutien sont organisées dans plusieurs villes. En signe de solidarité, le secrétaire général de l’ITUC, accompagné d’une délégation, se rend au siège de l’UGTT à Tunis. Les partisans du parti islamiste au pouvoir appel-lent à manifester contre les «atteintes de l’UGTT à la légitimité » du pouvoir. Des prêches appellent au Jihad contre l’opposition. Sont organisées des marches de protestation contre la grève générale et revendiquant la « purification » de l’UGTT. Bien que non autorisée, une marche de protestation contre l’UGTT est organisée par la ligue de protection de la révolution à Tunis. Comme à son habitude, le porte parole de Hezb Ettahrir abonde dans le sens de Rached Ghannouchi et qualifie l’UGTT de tous les maux… Afin de calmer cette escalade, des personnalités de la société civile et de la Troïka au pouvoir interviennent auprès des protagonistes durant la semaine qui suivi l’annonce de la grève générale par l’UGTT. Le Premier ministre, en retrait depuis le début de cette crise, se contente de lancer un appel à la direction de la centrale syndicale lui demandant de revenir sur sa décision de la grève générale et lui proposant d’engager un dialogue avec le Gouvernement. Le président de la République entame dés le jeudi des discussions avec la direction de la centrale ouvrière afin d’éviter la grève générale. Le porte-parole de la Présidence déclare même « qu’il serait temps de sanctionner la ligue de protection de la révolution ». Le président de l’ANC reste quant à lui muet comme une carpe… Faute de consensus, la Troïka n’avance aucune proposition. En acceptant les bons offices d’Ahmed Ben Salah et en rendant visite à Noureddine Hached, Rached Ghannouchi semble avoir opté pour une retraite tactique Ahmed Ben Salah, ancien leader de la centrale syndicale, se propose de jouer les bons offices. Rached Ghannouchi accepte. Mais Houcine Abassi rejette la proposition d’Ahmed Ben Salah et déclare à ce sujet : « pourquoi devrais-je rencontrer Rached Ghannouchi? Si je dois discuter de la situation du pays c’est avec le Gouvernement… à moins qu’il n’y ait mélange des genres ! » La centrale syndicale maintient sa position et pose certaines conditions pour annuler la grève générale du 13 décembre, à savoir : (1) la dissolution des ligues de protection de la révolution, (2) la fixation d’une date pour mettre un terme à la période de transition, (3) la relance du dialogue national et (4) l’achèvement des travaux de la Constituante dans les meilleures délais. Houcine Abassi proteste également contre la poursuite du dénigrement de l’UGTT par des cadres dirigeants d’Ennahdha et exige des excuses officielles. L’UGTT décide donc de boycotter les manifestations officielles auxquelles participeraient Ennahdha et le CPR. Lundi 10 décembre 2012, la direction de la centrale syn-dicale annonce les modalités de la conduite de la grève générale. La Troïka semble se fissurer. Ettakatol demande Ennahdha de présenter des excuses à l’UGTT. De son coté, le CPR menace de quitter le Gouvernement « si l’on ne tient pas compte de ses proposi-tions et de celles de son président d’honneur » particulièrement pour ce qui concerne la constitu-tion d’un gouvernement restreint. Le CPR déclare cependant que les ligues de protection de la révo-lution « doivent rester la mémoire vivante de la révolution ». L’« insécurité aux frontières » permet in extrémis une sortie sans vainqueur ni vaincu Lundi 10 décembre, à la frontière avec l’Algérie, dans la région de Kasserine, un agent de la garde nationale est tué par un groupe de jihadistes. Ce grave incident change complètement le cours des évènements. Dés le lendemain, deux jours avant la date prévue de la grève générale, des pourparlers s’engagent entre le Gouvernement et la direction de l’UGTT. Le mercredi 12 décembre 2012, un accord est conclu entre le Gouvernement et l’UGTT. Accord par lequel (1) la grève générale du 13 décembre est annulée, (2) l’agression de l’UGTT est condamnée et (3) la création d’une commission mixte d’enquête sur les incidents du 04 décembre est décidée. A l’issue de cet accord, Houcine Abassi déclare que « l’insécurité qui règne sur les frontières, nous a décidé d’annuler la grève générale ». Rached Ghannouchi et Moncef Marzouki ont longtemps défendu les ligues autopro-clamées de protection de la révolution Dans les jours qui ont suivis l’attaque de l’UGTT par les ligues, Rached Ghannouchi est sorti de sa réserve habituelle en prenant à plusieurs reprises fait et cause pour les ligues qu’il qualifia même de « conscience de la révolution » et en reprenant à son compte les accusations des ligues contre l’UGTT. Le 12 janvier 2013, malgré le meurtre de Lotfi Nagdh et l’attaque de l’UGTT et après l’agression de personnalités politiques de premier plan, Moncef Marzouki, président de la République, reçoit au Palais de Carthage une délégation des ligues. Parmi la délégation figurent de petits caïds peu recommandables. Le 06 février 2013, Chokri Belaïd est assassiné de plusieurs balles tirées à bout portant peu après huit heures du matin alors qu’il quittait son domicile. Le présumé assassin ferait partie des LPR. Dans les premières semaines qui ont suivi cet assassinat on enregistre plusieurs revirements : le président de la ligue nationale démissionne ainsi que son épouse trésorière de la LNPR (le 15 février), le Premier ministre démissionne (le 19 février), les activités des ligues sont gelées (le 6 mars), Rached Ghannouchi dit tout ignorer des ligues et qu’il n’a aucune idée de la façon dont elles fonctionnent (le 11 mars), enfin, le président de la République propose la dissolution des ligues et leur conversion en associations civiles (le 20 mars). Un an après l’attaque de la centrale syndicale, les agresseurs et leurs commenditaires courent toujours Début avril 2013, plus de trois mois après la cons-titution de la commission mixte d’enquête sur les évènements du 04 décembre 2012, faute d’accord avec le gouvernement sur les résultats des travaux de la dite commission d’enquête, la direction de l’UGTT décide de présenter aux médias et au public ses propres conclusions : les ligues de protection de la révolution et le mouvement d’Ennahdha sont mis en cause dans les agressions subies par l’UGTT le 04 décembre 2012. Ennahdha rejette ce rapport de l’UGTT. Mi avril 2013, le Gouvernement présente à son tour ses conclusions et blanchit les ligues de protection de la révolution dans l’attaque du siège de la centrale syndicale. L’UGTT met en doute l’impartialité du rapport du Gouvernement. Fin avril 2013, l’UGTT et les principaux partis d’opposition refusent de participer au «dialogue national » relancé par le président de la République. La direction de l’UGTT remet au gouvernement son propre rapport sur les incidents du 04 décembre 2012. Début mai 2013, la Tunisie fête la journée du travail dans la division, le « dialogue national », initié par l’UGTT en octobre 2012, tarde à reprendre ses travaux et les combats entre des dizaines de jihadistes pro-Aqmi s’intensifient dans les régions frontalières du Kef et de Kasserine… Le gouvernement reconnait l’agression du siège de l’UGTT mais Ennahdha ne présente pas d’excuses à l’UGTT et les ligues auto-proclamées de protection de la révolution continuent de sévir.
Posted on: Wed, 04 Dec 2013 17:03:10 +0000

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