La Chronique Mensuelle de Michel Onfray N° 34 - Mars - TopicsExpress



          

La Chronique Mensuelle de Michel Onfray N° 34 - Mars 2008 ----------------------------- Darwin relève de la catégorie des inconnus célèbres : tous connaissent son nom, presque personne ne l’a lu, et tout le monde dispose à la demande d’ un avis ses découvertes… Pourtant : qui, en dehors de L’origine des espèces, peut citer un autre titre d’une œuvre complète forte de trente cinq volumes dans l’édition française ? Qui connaît La descendance de l’homme et la sélection naturelle, un livre dans lequel, au contraire du fameux opus de 1859, il est question de l’homme ? Très peu. Dommage, car on y découvre un Darwin… de gauche. Le darwinisme fut très vite confisqué par la droite : la sélection naturelle enseignée comme un éloge du plus fort, donc une condamnation du plus faible ; la lutte pour l’existence assimilée à un tableau de la vérité du monde à laquelle le libéralisme fournirait le modèle politique le mieux adapté et le plus adéquat ; la légitimation des politiques de la force avec les faibles qui sous tend le racisme, le colonialisme, l’eugénisme, l’impérialisme autrement dit les jours les plus noirs du XX° siècle ; voilà autant de malentendus qui, via quelques monstres (Spencer pour le libéralisme, Galton pour l’eugénisme, Chamberlain pour le racisme) ont dénaturé la pensée de Darwin qui était une pensée de gauche… Darwin n’établit pas un signe d’égalité absolue entre l’homme et l’animal, il en souligne au contraire les différences et présente l’homme comme le seul animal moral, naturellement moral, génétiquement moral. En effet, seul parmi les mammifères, il dispose d’un sens moral inné par lequel il juge ses actes, puis les condamne ou les approuve en fonction de leur utilité pour la vie et la survie de l’espèce. Pour cette raison, il existe donc chez l’homme des tendances naturelles et instinctives à la sympathie et à l’entraide qui visent le perfectionnement de l’espèce . L’éducation permet la transmission de ces caractères qui, innés, raffinés, transmis, évoluent en caractères acquis. Cette métamorphose distingue l’homme de la bête dans un même monde animal. Les aînés doivent donc transmettre les valeurs aux enfants : le bien identifié au bon permet le bonheur de l’espèce ; le mal, assimilé au mauvais, la délite ou la détruit. En philosophe hédoniste (inattendu) Darwin écrit : « le principe du plus grand bonheur sert indirectement de type assez exact du bien et du mal ». Dès lors, restaurons l’honneur perdu de Darwin en l’arrachant aux griffes de ceux qui, libéraux, racistes, eugénistes, colonialistes, impérialistes, ont confisqué les découvertes du scientifique pour justifier leurs basses œuvres . Contre ce tropisme de droite, enseignons donc le Darwin qui célèbre l’humanité du mammifère susceptible de solidarité, naturellement doué pour d’entraide, capable d’éducation mutuelle, porteur d’un sens inné de la république (au sens étymologique : de la chose publique) – ce qui définit les fondamentaux d’un programme de gauche. A défaut, la bête (libérale) triomphe de l’animal (politique), signe d’apothéose de la sauvagerie…
Posted on: Fri, 20 Sep 2013 18:36:38 +0000

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