La libération des otages au Niger suscite de vives tensions dans - TopicsExpress



          

La libération des otages au Niger suscite de vives tensions dans le monde du renseignement Le rôle de la DGSE et de la société de sécurité privée Amarante est au centre de polémiques internes. Publié le vendredi 01 novembre à 11h22 Le Falcon 7X de larmée de lair, qui ramenait les quatre otages du Niger, navait pas encore atterri à Villacoublay, mercredi en milieu de journée, quune polémique feutrée mais violente éclatait dans le petit monde du renseignement et des sociétés de sécurité privées. En cause, un article du Monde consacré aux «dessous dune libération». Le journal évoque le versement dune rançon «de plus dune vingtaine de millions deuros» - ce qui est vraisemblable - mais il insiste surtout sur le rôle essentiel quaurait joué une entreprise privée de sécurité basée à Paris, Amarante. «Communication outrancière», «bavardages», «tissu de conneries», «approximations», «vengeance», «mensonges», les réactions sont vives ! Elles illustrent les fortes tensions qui règnent dans cet univers opaque. «Tout le monde veut être sur la photo !» sagace une source gouvernementale. «Ceux qui ont été un peu dans le coup, ceux qui auraient aimé y être, ceux qui ny sont plus...» Cette affaire traduit en tout cas des tensions restées jusquici masquées entre le ministère de la Défense et le nouveau patron de la DGSE, Bernard Bajolet, nommé en avril dernier. Comme dans le domaine des opérations militaires, le ministre de la Défense entend désormais être LE patron en ce qui concerne les activités des services de renseignemnt de son domaine. Pour que les choses soient claires, un décret adopté en septembre dernier lécrit noir sur blanc, comme nous le rapportions alors. Le présent décret redonne toute sa place au ministre de la défense dans la chaîne des responsabilités politiques en matière (...) de renseignement extérieur, précisait même alors le communiqué du Conseil des ministres. Dire que ça coince est un euphémisme... Bernard Bajolet, qui a été en poste à lElysée comme coordonateur national du renseignement sous Nicolas Sarkozy et qui tutoie François Hollande depuis quil a accueilli le futur président de la République comme stagiaire de lEna à lambassade dAlger en 1978, semble préferer en référer directement à la présidence de la République, nous explique-t-on de diverses sources dans ces milieux. Les mauvaises langues racontent quil est surnommé François ma dit... au sein de son Service. Mais, cest sans compter sur la détermination du ministre de la défense, sa proximité avec François Hollande et les réseaux de son très actif directeur de cabinet, Cédric Lewandowski. La preuve du pudding, cest quon le mange, disait Friedrich Engels. La preuve de lefficicacité dun système, cest que les otages sont libérés, pourrait-on en conclure. Et ils lont été, mais pas vraiment par la DGSE. Or, la DGSE est officiellement le bras armé du gouvernement français pour les affaires dotages, mais elle vient dessuyer coup sur coup deux désaveux, au Niger et au Cameroun, qui viennent sajouter à léchec dramatique de la libération de leur agent, Denis Allex, en Somalie. En dix mois cela fait beaucoup. La libération des quatre otages dArlit a été une affaire menée par les Nigériens eux-mêmes, notamment par Mohamed Akotey, un ancien ministre qui dirige une filiale dAreva, Imouranen SA, dans son pays. Cest à lui que le président Issoufou, un socialiste très proche du gouvernement français, a confié le soin de gérer ce dossier. Ce sont des Nigériens qui sont allés récupérer les otages dans le nord-ouest du Mali et qui ont, sans doute, versé la rançon. Cest, par exemple, à bord dun hélicoptère nigerien que les otages sont revenus à Niamey. Akotey, qui est dorigine touarègue, a utilisé ses propres réseaux, notamment avec Iyad Ag Ghali, le fondateur du mouvement islamiste Ansar Dine, lallié dAQMI dans le nord du Mali. Côté français, laffaire était pilotée directement par le ministre de la Défense Jean-Yves le Drian. Il sest ainsi rendu discrètement à deux reprises au Niger, en particulier le week-end des 12 et 13 octobre, pour décider des derniers préparatifs de lopération. Au sein du gouvernement, et avec le feu vert de lElysée (où la cellule africaine est moins active quelle ne fut en dautres temps), Le Drian apparait de plus en plus comme le monsieur Afrique, avec Laurent Fabius, ès qualités. Dans laffaire du Niger, la DGSE a «accompagné le mouvement» en apportant un soutien technique. Cest déjà mieux quen fevrier dernier, quand elle elle avait, comme nous le révélions en septembre sur ce blog, été mise à lécart par le ministre des affaires étrangères Laurent Fabius, qui avait obtenu la libération de la famille Moulin-Fournier, avec laide du Cameroun, du Nigeria et de GDF-Suez. La politique décidée et affichée par François Hollande consistant à interdire le versement de rançons par la France ne facilite pas la tâche de la DGSE, la privant dun levier essentiel de son action. Puisque la France ne paye plus, il faut compter sur dautres, dans le cadre de négociations tripartites et complexes entre Paris, les gouvernements étrangers - le Niger dans ce cas - et les entreprises qui emploient les personnes enlevées. Ces discussions se font au niveau gouvernemental et politique. En plus du positionnement délicat de la DGSE sur les affaires dotages, aggravé par des querelles dégos, le rôle des sociétés de sécurité privée vient compliquer les choses. Mercredi, un article du Monde insistait sur le rôle dAmarante, une société basée à Paris et qui est un vivier pour danciens de la DGSE. Elle est dirigée par Pierre-Antoine Lorenzi, ancien haut fonctionnaire socialiste, un temps boulevard Mortier, et qui conserve des liens étroits avec le cabinet de Jean-Yves Le Drian. Son rôle exact et celui de sa société Amarante reste très discuté, en fonction des interlocuteurs... preuve des querelles de personnes et de la concurrence exarcébée qui règnent dans cet univers peu transparent... Il semble en effet que, devant lincapacité de la DGSE de regler le problème des otages du Sahel, détenus depuis trois ans, le ministère de la Défense ait joué la carte Lorenzi, qui entretient dexcellents contacts en Algérie. Et que la DGSE ait tout fait pour le sortir du jeu, comme dautres acteurs privés, dès larrivée de Bernard Bajolet à la tête du Service. Les versions contradictoires des uns et des autres bénéficient du fait que les véritables acteurs sont tenus par le secret-défense, ne serait-ce que parce que sept Français sont toujours retenus en otage, dont trois au Sahel, et quil hors de question de mettre sur la place publique les procédures qui seront utilisées, demain, pour obtenir leur libération. Deux entreprises françaises, Areva et Vinci, ont été des interlocuteurs indispensables dans cette affaire puisque les otages sont leurs salariés. Elles ont contribué de manière importante, en particulier Areva, au règlement de cette crise, mais pas à la phase finale, «les cent derniers mètres» selon le mot dun professionnel. La sécurité de leur site industriel dextraction de luranium est assurée par une société concurrente dAmarante, Epée, dirigée par un ancien officier des opérations spéciales, Jacques Hogard, qui traite directement avec le directeur de la protection dAreva, le général Jean-Michel Chereau. Un détachement des forces spéciales françaises est basé dans la région pour aider larmée nigérienne. Le nom dun autre ancien militaire, Jean-Marc Gadoullet, a été souvent cité : sil a effectivement participé à la libération des trois premiers otages dArlit en 2011, il a été cette fois-ci tenu à lécart. La sécurité, le renseignement et même les opérations spéciales sont de plus en plus privatisées. Quelques entreprises françaises font leur trou dans ce monde, entre intérêts commerciaux, réseaux politiques, amitiés et inimitiés danciens des mêmes maisons (DGSE, COS, etc...). Le romancier britannique John Le Carré vient den donner une stupéfiante illustration dans son dernier livre Une vérité si délicate (Seuil, 2013). Joli titre... (Ceci est une nouvelle version, actualisée, completée et corrigée, dun article publié mercredi soir sur lopinion.fr)
Posted on: Sun, 03 Nov 2013 07:35:44 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015