" ... La social-démocratie était déjà à l’agonie au - TopicsExpress



          

" ... La social-démocratie était déjà à l’agonie au commencement de ce siècle. Car à la fin du précédent, les Blair, Schröder et Zapatero l’avaient ostensiblement diluée, autant qu’ils le pouvaient, dans la marée du libéralisme triomphant. Puis elle s’est effondrée politiquement en Grèce. Ce fut certes sans le vacarme du mur de Berlin mais tout aussi violemment. Cela se passa dans Athènes assommée, quand Georges Papandréou capitula sans condition sous l’assaut du capitalisme financier caractéristique du nouvel âge du capitalisme. Papandréou était le Premier ministre du pays mais surtout président de l’Internationale socialiste. À présent, le dépôt de bilan vient d’être prononcé. Le SPD allemand, le plus ancien et le plus puissant parti de l’histoire de la social-démocratie mondiale, a lancé le 22 mai dernier à Leipzig une nouvelle structure internationale baptisée l’Alliance progressiste. Avec 70 autres partis, dont le PS français, les sociaux-démocrates ont ainsi franchi un nouveau pas dans la rupture avec l’histoire du socialisme et du mouvement ouvrier qu’ils avaient façonnée. Une froide logique est à l’oeuvre : comme ils détruisent l’État social qu’ils avaient créé, les sociaux-démocrates sabordent l’outil qui l’avait construit. ... Cette mutation a commencé avec les New Democrats de Bill Clinton avant d’arriver en Europe avec le New Labour de Tony Blair, dans les années 1990. Ces modernisateurs ont longtemps essayé d’isoler la France au sein du mouvement social-démocrate en raison de l’histoire particulière du socialisme français. Son ancrage dans la République et son attachement à la puissance de la loi comme instrument de l’intérêt général l’ont longtemps rendu rétif à la culture du contrat qui a permis à la social-démocratie de dévaler la pente des renoncements. Dix ans après la chute du Mur, la France de Lionel Jospin était ainsi le seul pays industriel à compter des communistes et des écologistes au gouvernement. La ligne « démocrate » repose sur quelques invariants idéologiques. Le premier est l’abandon de toute référence aux intérêts de classes en jeu dans le partage de la richesse. Jusqu’au point de perdre tout ancrage social du discours. La pauvreté, le chômage ou l’exploitation, ces réalités sociales sont progressivement effacées au profit de la figure du pauvre, du chômeur ou du salarié renvoyé à sa « responsabilité » individuelle. Les démocrates nient l’existence d’un conflit entre classes sociales. Une fois écartée la perception du conflit, les « démocrates » pensent s’appuyer sur le « compromis » entre « partenaires » sociaux comme si la rationalité et la modération des appétits ne dépendaient d’aucun rapport de force social ou culturel. Le moteur de l’action passe alors sur le terrain de la compassion et de « l’ordre juste » où les droits universels cèdent la place à un improbable « sur mesure » compassionnel et où l’équité remplace l’égalité. ... Dans cette trajectoire « démocrate », la campagne présidentielle n’a ainsi été pour Hollande qu’une parenthèse. Le dynamisme du Front de gauche l’a obligé à quelques embardées rhétoriques contre la finance ou les hauts revenus. Désormais, président de la République, il profite à plein de la monarchie présidentielle de la Ve République pour imposer totalement cette ligne idéologique à sa majorité et à son propre parti. Traité européen Merkozy, politique de l’offre, pacte de compétitivité, accord « Made in Medef » sur l’emploi, austérité budgétaire, privatisations etc. En un an, le ralliement de Hollande à la ligne « démocrate » est total et spectaculaire. Avec Hollande président, le PS rompt explicitement avec son appartenance au mouvement ouvrier en refusant de voter la loi d’amnistie sociale. Cette destruction de l’État social que les « socialistes » avaient largement contribué à bâtir va se poursuivre avec une nouvelle régression des droits à la retraite. Quelle est alors l’identité politique d’un tel parti ? Je le nomme « solférinien » pour décrire le parti dont le lien avec l’histoire socialiste se réduit à l’adresse de son siège historique, situé 10 rue de Solférino à Paris. Dans tous les pays qui ont connu cette mutation « démocrate », la destruction idéologique et culturelle de la gauche a ensuite entraîné sa disparition politique et électorale. ... Partout, cette orientation idéologique des principaux partis sociaux- démocrates conduit au naufrage. Partout, le rétrécissement de leur base sociale les pousse à rechercher des solutions artificielles d’union nationale pour faire avaler de force les politiques d’austérité. Face à cet effondrement historique de la « gauche » social-démocrate, une autre gauche a commencé à prendre la relève. En portant le drapeau de la résistance du peuple contre l’oligarchie, système qui lie les libéraux et sociaux-libéraux à la finance pour appliquer « la seule politique possible ». Sous le nom de révolution citoyenne, cette nouvelle prise de pouvoir du peuple a commencé en Amérique latine et se prolonge au Maghreb. Elle travaille désormais l’Europe en commençant par le Sud et ses marées citoyennes. Des fronts de partis y jouent un rôle de déclencheur social et culturel. Ils font naître alors des « fronts du peuple », mêlant dans un mouvement politico- social toutes les formes de la lutte contre la déchéance sociale et la catastrophe écologique. Des luttes aux urnes, ils se proposent de mettre la souveraineté populaire en état de changer radicalement le rapport de force économique et social. C’est pourquoi surgit partout comme une caractéristique commune, révélant la profondeur du processus populaire et la hauteur de son horizon, la revendication d’assemblée constituante. Ce point signale alors une volonté de souveraineté populaire qui est à proprement parler révolutionnaire si l’on veut se souvenir du caractère nécessairement autoritaire du nouvel âge du capitalisme. Mais pour entraîner durablement la société et changer profondément les valeurs aux postes de commande des institutions, cette énergie populaire a besoin de se repérer sur un horizon global. Il a besoin de construire un nouveau modèle de société. C’est le but de l’éco-socialisme, qui lie question sociale et impératif écologique au nom du progrès humain universel. Mais il ne le propose pas comme une utopie sur laquelle le réel devrait se régler. Il l’avance comme une réponse concrète aux exigences de l’intérêt général humain. Telle est la révolution nécessaire pour notre temps face à laquelle la mutation « progressiste » ou démocrate de l’ancienne social-démocratie échoue comme un encombrement hostile."
Posted on: Fri, 05 Jul 2013 23:00:08 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015