Le dimanche 27 octobre marque une nouvelle page historique du - TopicsExpress



          

Le dimanche 27 octobre marque une nouvelle page historique du mouvement anti-corrida français. Jamais la petite commune de Rodilhan (2500 habitants) n’a connu un tel séisme. Devenue un symbole majeur de la brutalité des pro-corridas en 2011, elle a confirmé hier que, dans ses rues, la seule façon de dialoguer avec un anti-corrida, c’est de lui cogner dessus ou de le gazer à bout portant. Cette fois, tous les grands médias étaient présents sur place pour le faire savoir à la face du monde entier (y compris jusqu’au Sri Lanka et en Namibie, en passant par les USA). La paranoïa du maire le conduit à un fiasco total Le potentat local Serge Reder, par son obstination d’une bêtise crasse, a transformé son village en camp retranché, protégé par 260 gendarmes et CRS, pour permettre à environ 200 aficionados de voir des taureaux se faire massacrer dans une arène de 1200 places quasiment vide. Et encore, Reder, devant le peu d’entrain des aficionados à prendre leurs billets d’entrée, a proposé des places gratuites à un grand nombre de Rodilhanais pour tenter de remplir un peu plus les gradins. Mais la plupart ont refusé. Il faut dire que le maire, en voulant maintenir sa provocation à tout prix, a scié tout seul la branche pourrie sur laquelle il s’est tenu : - le bouclage total de Rodilhan dès 8 h du matin a empêché les amateurs éventuels de torture animale qui n’avaient pas réservé de prendre leurs places le jour même, aucune vente par correspondance n’ayant été mise en place pour éviter que les anti-corridas n’en achètent pour envahir légalement les gradins. - la paranoïa entretenue par ce même maire dans les jours qui ont précédé l’action, largement reprise dans les médias, a dû en effrayer plus d’un de se rendre à Rodilhan ce jour-là, à commencer par les aficionados des environs qui, souvent, se déplacent en famille. Et même si nous, nous savons que nous sommes pacifiques, les aficionados, eux, à force de lire la propagande délirante de Viard et consorts, croient que nous nous promenons avec un couteau entre les dents, prêts à égorger quiconque voudrait assister à une corrida. - le déploiement démesuré de forces policières a choqué jusqu’aux habitants eux-mêmes, qui se sont dits sidérés et en colère d’avoir été pris en otages dans leur propre ville par leur propre maire. Et ce n’est pas leurs prochains impôts locaux qui vont les calmer, puisque l’addition sera à la charge de la commune et non de l’Etat (elle était estimée à 50 000 euros lorsque “seulement” 200 gendarmes étaient prévus au lieu de 260). Un coût significatif quand on sait que la gendarmerie nationale ne parviendra pas à boucler son budget 2013 de fonctionnement et d’équipement, comme l’a annoncé récemment son directeur général, Denis Favier. - et même certains des plus résolus des aficionados ont dû renoncer à atteindre les arènes tellement ils ont été gazés en passant au niveau des manifestants sous protection policière (les flics s’en foutaient, ils avaient des masques, eux). Et les manifestants, combien étaient-ils ? Pour une fois, pas de guéguerre sur les chiffres puisque la gendarmerie en a compté 750 et que les organisateurs ont estimé qu’ils étaient 800. Allez, va pour 750, on ne va pas chipoter. On résume : dans un village de 2500 habitants, 750 manifestants sont venus s’opposer à 260 policiers qui voulaient permettre à 200 aficionados d’assister à leur spectacle morbide dans des arènes quasiment vides. Résultat : non seulement la presse nationale mais aussi mondiale a parlé de Rodilhan pour rendre célèbre sa violence. On leur avait tout dit, pourtant Est-ce que le maire a pété les plombs et a sur-réagi parce qu’il ignorait ce qu’on allait faire ? Non, il ne le doit qu’à sa propre bêtise. Car, de fait, on avait tout annoncé publiquement plusieurs jours avant la manifestation. Autant, pour Rion-des-Landes, nous avions voulu tout garder secret jusqu’au bout (en vain), autant pour notre retour à Rodilhan, nous avons été aussi transparents qu’il était possible de l’être. Eh bien, malgré cela, le maire (ou le préfet) se sont révélés en dessous de tout en imaginant des plans qui ne reposaient sur rien. Car sinon, pourquoi mobiliser 260 flics, un hélicoptère et un procureur de la République ? Pour une simple manifestation pacifique dûment déclarée en préfecture ? On avait expliqué qu’on serait partout autour du village, on y a été. On avait dit qu’on resterait toute la journée jusqu’à ce que les aficionados repartent, on l’a fait. On avait insisté sur le fait qu’on serait pacifiques, on l’a été. On a prévenu qu’on serait entre 600 et 1000, on était 750. On a prévenu qu’il y aurait forcément des débordements de la part de groupuscules ne faisant pas partie du CRAC, il y en a eu un ou deux (sans gravité). On a même supposé, lors de l’audience au tribunal administratif, en présence de l’avocat du maire et de la directrice de cabinet du préfet, qu’il y aurait une action dans la nuit de samedi à dimanche avant que le village soit bouclé, le centre-ville est pourtant resté désert toute la nuit. Retour sur le déroulement d’une journée exceptionnelle Vers 8h30, les premiers manifestants arrivaient sur le parking qui nous avait officiellement été réservé aux abords d’un complexe sportif. Les premiers policiers se mettaient également en place et procédaient aux fouilles de quiconque passaient près d’eux Avant de quitter le parking, Jean-Pierre s’est adressé aux manifestants, certains venus de très loin puisqu’il y avait même une délégation américaine. Il a expliqué que nous allions nous répartir en groupes afin d’avoir des personnes présentes à chacun des barrages mis en place par la police tout autour du village. Il a aussi mis en garde les groupuscules dont nous avions repéré la présence (en tout une dizaine de personnes sur 750). Et il a donné la parole à Carole Davis qui a confirmé le soutien des deux associations qu’elle représente aux USA et de l’appel au boycott contre la France qu’elles venaient de lancer. Puis les groupes ont été formés, le cortège s’est ébranlé et chacun est allé se positionner là où il devait l’être. Sauf que pour certains groupes, c’était impossible : des rues en théorie autorisées sur le plan fourni par le maire dans son arrêté étaient désormais bloqués par des cordons de flics. Nous leur avons demandé de respecter le plan, ils nous ont répondu qu’ils avaient eu de nouveaux ordres. Ce qui est totalement illégal, bien sûr, mais de toute évidence, ils s’en foutaient. Deux groupes ont réussi à s’approcher jusqu’à cent mètres des arènes par des rues laissées désertes. Il s’agissait du fameux terrain vague dont je parlais plus haut. C’est là que les premiers gazages ont eu lieu, ainsi que des tirs de flashballs à bout portant (une militante a eu une artère explosée près de la cheville). Pendant plusieurs heures, les autres groupes appelés en renfort n’ont pu rejoindre la position avancée, les voies d’accès ayant été barrées entre temps. Heureusement, certains gendarmes se sont montrés particulièrement conciliants. Dans une rue totalement vide, ils ont accepté de laisser passer le petit groupe de manifestants arrivé jusque là à condition qu’ils passent un par un et qu’ils n’aient rien de dangereux sur eux ou dans leur sac. Ceux-là ont pu rejoindre les avants-postes sans difficulté. Alors que je revenais vers le camion-sono avec deux sacs pleins de matériel, j’ai vu que la rue menant droit sur le front était à nouveau libre d’accès. Les policiers, qui étaient encore là une demi-heure plus tôt, avaient dû être appelés en renfort sur le terrain vague. Certains d’entre nous ont ainsi pu passer par là. C’est là qu’ont eu lieu les principales exactions policières. A mon arrivée sur place, déjà une dizaine de personnes avaient été évacuées par les secouristes. Uniquement des manifestants, cela va sans dire. J’ai salué Jacques Dary qui avait réussi à se garer sur le terrain vague. Et, comme beaucoup d’autres, en allant au plus près des flics, j’ai pris un jet de gaz au poivre en pleine figure. Cette cochonnerie, non seulement brûle les yeux, le nez et la gorge, mais aussi la peau. Aussitôt, des militants sont venus me rincer les yeux au sérum physiologique et me donner des conseils pour retrouver mon souffle. La scène s’est reproduite des dizaines de fois un peu partout dans nos rangs. Mais quel que soit le degré de violence des policiers et le gaz qui nous irritait, à chaque fois nous revenions nous assoir juste devant eux. Ils ont même gazé des gens assis par terre qui leur tournaient le dos, donc absolument sans danger. Jérôme, Franck et d’autres ont dû traîner les victimes hors de portée pour qu’elles puissent à nouveau respirer. Et nous revenions. Et nous revenions. Et nous revenions. Nous ne sommes partis vers le camion-sono (situé devant une autre rue) que lorsqu’un véhicule anti-émeute escorté de dizaines de CRS lourdement harnachés et casqués nous ont repoussés hors du champ de bataille. De retour là-bas, nous avons lancé de nouvelles offensives, un groupe partant d’un côté et un autre, Jean-Pierre en tête, partant de l’autre, afin de prendre à nouveau les arènes en tenaille. A nouveau, il y a eu des gazages, des replis, des retours face aux flics. Et puis, nous nous sommes rassemblés pour mettre fin à la manif. Sur la route qui conduisait au parking, nous avons croisé quelques poignées de spectateurs sous très forte escorte policière. Nous les avons copieusement hués. Cela m’a rappelé le happening que nous avions fait devant la statue de Nimeno à Nîmes en 2011. Là, nous avions un millier d’aficionados qui voulaient nous faire la peau alors que nous n’étions qu’une cinquantaine et c’est nous que les flics ont ramené sous protection. Deux ans plus tard, ce sont les aficionados qui sont devenus la minorité et les anti-corridas la majorité qui les conspue (mais sans vouloir les passer à tabac, eux). Fin de règne pour les barbares… Je le disais en introduction : même si nous n’avons pas réussi à empêcher le massacre de jeunes veaux par des adolescents décérébrés, ce 27 octobre est d’ores et déjà considérée comme historique par notre camp, du fait de l’ampleur de sa mobilisation, de la détermination sans faille des manifestants brutalisés et de l’écho médiatique planétaire qui en a résulté. Concernant le cas spécifique de Rodilhan, difficile d’imaginer que le maire essaie de recommencer l’an prochain (s’il est réélu, ce qui est loin d’être certain, un grand nombre de ses administrés étant furieux contre lui) ou que le préfet le laisse faire (ce ne sera plus le même, l’actuel prenant sa retraite anticipée au 1er décembre). Notre action a aussi reçu quelques soutiens inattendus puisqu’ils sont venus de certains membres des forces de l’ordre. Sur l’un des barrages, un gendarme nous a dit en début d’après-midi, que nous avions gagné, les arènes étant quasiment vides et la démesure de la réaction du maire étant vue, y compris par eux, comme totalement ridicule. Un haut-gradé a dit à l’un d’entre nous en fin de journée : “Vous devriez avoir une médaille pour avoir fait ce que vous venez de faire.” Il parlait non seulement de la corrida elle-même, qui est perçu par une large majorité de policiers comme une aberration d’un autre âge et un spectacle de lâches, mais de notre courage face aux lacrymos et aux coups. D’autres policiers, de plus en plus souvent d’une manif sur l’autre, nous ont assuré de la sympathie qu’ils éprouvent pour nous. Ceux qui nous ont brutalisés ne nous feront pas oublier ceux qui nous soutiennent. Merci à eux. Et surtout, surtout, un immense merci à tous les manifestants courageux et à l’équipe qui a fait de cette manifestation un événement aussi exceptionnel.
Posted on: Wed, 30 Oct 2013 03:19:32 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015