Le débat qui court sur la nécessité d’un vote de - TopicsExpress



          

Le débat qui court sur la nécessité d’un vote de l’Assemblée, autorisant la France à une intervention en Syrie, ne saurait faire oublier le cœur du sujet, tel que l’a décrit le Président de la République ; le régime de Bachar El Assad ne peut rester impuni pour l’utilisation d’armes chimiques contre des civils le 21 août dernier. La réponse à cette agression est révélatrice des difficultés qu’il y a à aborder la guerre civile syrienne, comme de nombreux conflits du XXI° siècle. Tendance déjà affirmée depuis le second conflit mondial, les principales victimes sont des civils, auxquels s’ajoute la situation désastreuse des réfugiés et des déplacés. Après l’Afrique et sa « décennie du chaos », selon la géographe Sylvie Brunel, pour évoquer les années 90, c’est au Moyen-Orient de compter les réfugiés par centaines de milliers. Aux Palestiniens dispersés depuis 1948 dans le Moyen -Orient, se sont ajoutés 1,5 millions d’Irakiens vivants en Syrie, 400 000 Syriens en Jordanie, autant en Turquie et au Liban. Sans compter les flux transcontinentaux qui profitent des frontières poreuses et dont profitent tous trafiquants. Peuples sans pays, guerres sans territoires, armes sans militaires, démocrates sans expression ; ce sont toutes ces données qu’il faut appréhender dans cette nouvelle crise du Moyen-Orient. En rajouter au chaos par une nouvelle intervention est l’argument principal des opposants, faisant craindre un embrasement général, mené par l’Iran et la Russie, alliés par lesquels le clan El Assad a consolidé son régime. Mais laisser le pouvoir syrien impuni, c’est lui permettre d’étendre, au-delà de son pays et du Moyen-Orient, le même système qu’il pratique depuis 42 ans à l’intérieur de ses frontières : la réduction au silence de toute opposition. Deux faits connexes à la crise syrienne devraient nous éclairer sur les perspectives de changements, dans cette partie du monde, à observer avec vigilance pour l’un, bienveillance pour l’autre. D’une part, la Turquie, interface entre Europe et Orient, qui soutient l’option d’une intervention, joue un rôle stratégique sur différents plans : château d’eau du Moyen-Orient, passage obligé des routes de l’énergie, nécessaires à l’Europe, qui veulent contourner la Russie. Elle verrait aussi dans la fin du régime syrien un autre atout : celui de s’assurer le contrôle de la question kurde. Que l’on se souvienne, en effet, des difficiles tractations entre les deux pays en 1998 au sujet de l’expulsion d’Ocalan, leader du PKK refugié en Syrie. Se montrer un partenaire fort de l’Occident serait également un atout majeur pour la Turquie qui espère, toujours, une adhésion à l’Union Européenne. Mais, attention, il s’agit de la Turquie de Recep Tayyip Erdogan... D’autre part, de l’autre coté de la Méditerranée, la Tunisie peine à trouver la paix politique. Mais, tirant les leçons de la dictature économico-familiale du clan Ben Ali et des difficultés politiques actuelles, le Président Marzouki déposera à l’automne, à l’Assemblée générale des Nations unies, un projet de Cour constitutionnelle internationale ; il s’agira de faire appliquer, dans les pays, qui y ont souscrit, les principes des grands textes internationaux, censés garantir les libertés publiques et la démocratie. Il s’agit de donner un prolongement aux printemps arabes, tout en les englobant dans une vision d’universalité onusienne. Le débat qui doit s’engager sur l’intervention en Syrie, après les multiples consultations de l’exécutif, doit permettre ainsi de dresser d’autres perspectives. Non seulement celle de la protection des populations, mais aussi de leur développement : la pauvreté, si l’on se réfère à la définition qu’en donne le PNUD, « ni avoir, ni savoir, ni pouvoir », y est extrême. Les réfugiés des guerres et conséquences des politiques autarciques y sont pour beaucoup. Mais il s’agira, aussi, au-delà des décisions prises dans un cadre international, d’afficher la volonté politique de l’Europe, pour le Moyen-Orient, entre ce que représente le projet universel des démocrates tunisiens et ce que dessine le désir d’affirmation géopolitique de la Turquie. La France, par la voix de son Président, refuse la diplomatie de « connivence » telle que l’a décrite le politologue Bertrand Badie, en réclamant des sanctions. Reste à amplifier le geste avec des alliés, et par une politique en faveur de la démocratie et du développement.
Posted on: Tue, 03 Sep 2013 11:02:59 +0000

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