Le libanais ne s’exprimait plus en français, mais parlait un - TopicsExpress



          

Le libanais ne s’exprimait plus en français, mais parlait un dialecte qui m’étais partiellement étranger. Certains de ses mots coururent donner de violentes paires de gifles à mon honteuse ignorance. Gnamien… Oti Kpa… Mo… Yassoa… Je savais que ces mots étaient issus du lexique d’un dialecte ivoirien. Lequel ? Je saurais quelques minutes plus tard que le libanais s’était exprimé en Baoulé. Je me chuchotai à moi-même que je ne suis pas censé tout savoir. Des groupes ethniques ivoiriens, il y’en a une soixantaine ! … Je me surpris à le scruter. L’analyser. Comme on analyserait un macrocosme. Pour y déceler chaque microcosme qui y graviterait. Le libanais… Ce libanais était vêtu d’un grand boubou aux couleurs bigarrées qui donnait à sa peau déjà rougie par le soleil, une teinte désopilante. En guise de chaussures, ses pieds arboraient fièrement ces sandales cérémonielles dont raffolaient les Akans. Son regard… Son attitude… Sa gestuelle… Tout chez lui révélait un orgueil certain, une fierté criarde… Ces sentiments que l’on fait sien lorsque l’on se sent chez soi ; lorsqu’on revendique une terre. Cette sensation d’intime appartenance à sa terre. Il était beaucoup trop ivoirien pour être libanais. Peau blanche, masque noir. Fanon l’aurait bien aimé, celle-là ! Un sourire niais arboré par ma face troublée me revenait comme une gifle dans le rétroviseur. L’ombre se rapprochait lentement… Peu à peu, je discernais des yeux… Un abdomen nerveux et nervuré… Une face moqueuse… L’injure identitaire… Encore un pied de nez en guise de baiser. « Saint Jean ! Terminus ! »
Posted on: Sun, 01 Sep 2013 17:53:50 +0000

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