Les défis institutionnels du Mali : La politique de - TopicsExpress



          

Les défis institutionnels du Mali : La politique de décentralisation en question par Pr Cheibane Coulibaly L’ère nouvelle : l’exigence d’hommes forts pour bâtir des institutions fortes La visite de Obama au Sénégal a coïncidé avec un de mes séjours à Dakar et naturellement mes échanges avec des interlocuteurs sénégalais ont concerné entre autres la boutade du président américain que l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais plutôt d’institutions fortes. Je devais convaincre mes jeunes interlocuteurs que l’Afrique est aujourd’hui dans un tel état de délabrement institutionnel qu’il faut des hommes compétents et intègres pour y assurer la mise en place (restauration ou création) et le fonctionnement d’institutions fortes au sens d’institutions permettant de régler dans la justice et la paix les problèmes de la grande majorité des populations africaines. Pour illustrer mes propos, j’ai pris l’exemple du Sénégal, un pays qui vient de vivre une période électorale très mouvementée dont les soubresauts avec les procès des anciens dirigeants du pays. Supposons un moment que le Président Macky Sall, sorti vainqueur des élections, tienne le discours suivant à ses compatriotes : « Les difficultés que notre pays vient de vivre montrent clairement qu’il faut réfléchir à nouveau sur la pertinence du régime présidentiel (présidentialiste) au Sénégal, régime qui à mon sens donne trop de pouvoirs au Président de la République. Ma proposition est que nous instaurions un autre système qui limite ces pouvoirs, si vous en êtes d’accord. Nous allons donc organiser des débats à tous les niveaux avant de vous inviter à vous prononcer par referendum puisqu’il s’agit d’une reforme importante de nos institutions politiques». J’ai ensuite demandé à mes interlocuteurs : « Après cela et quelle que soit l’issue de la consultation, si Macky Sall se présente pour un second mandat quelles vont être ses chances ? ». Dans son parler bien sénégalais, l’un de mes interlocuteurs m’a répondu : « Grand ! Il va passer, rèk ». Pourquoi? Parce que Macky Sall aurait montré à ses compatriotes qu’il a la force de renoncer à un « surpouvoir » qu’il a pourtant reçu des urnes. Faire violence sur soi-même pour renoncer aux tentations de ce type de pouvoir et entreprendre des reformes dans le sens d’un meilleur partage des pouvoirs dans le sens de l’intérêt du peuple constituent des actes d’un « homme fort ». La décentralisation au Mali exige aujourd’hui que les institutions des communautés de base (les villages, les fractions, les quartiers ainsi que les Kafo) soient considérées comme des instances à part entière du schéma de décentralisation. Non seulement les populations se reconnaissent dans ces institutions mais celles-ci constituent des outils incontournables et efficaces du développement local. Il s’agit d’institutions endogènes c’est-à-dire créées par les communautés elles-mêmes et dont elles ont pu et su garder le contrôle. Ce principe, nous l’appelons « endogénité ». La deuxième exigence est de reconnaître qu’il ya de multiples institutions dont certaines ne sont pas du tout dans des relations de tutelle c’est-à-dire des relations de dépendance les unes par rapport aux autres et même par rapport à l’Etat. La société malienne se caractérise par sa « polycentricité », c’est-à-dire l’existence de nombreux centres de décision agissant dans les multiples domaines de la vie quotidienne. C’est donc la recherche de solution aux problèmes de la vie courante qui constitue l’obstacle majeur au type de centralisation dont continuent de rêver certains hommes politiques. La troisième exigence est le renforcement de la dévolution, c’est-à-dire du « transfert des compétences », des ressources et des responsabilités de l’Etat vers les autres institutions dont les Collectivités Territoriales mais aussi les institutions des communautés de base. Ce « transfert » doit se faire suivant le principe de décentralisation bien connu qu’est la subsidiarité. Les trois pieds sur lesquels doit reposer la « revitalisation » de la décentralisation au Mali sont donc : ENDOGENITE- POLYCENTRICITE- SUBSIDIARITE. Aujourd’hui, le Mali ne peut pas échapper à une reforme profonde de ses institutions. Le fétichisme affiché par certains pour la Constitution de 1992 est au fond un refus d’une démocratisation profonde de notre société par la promotion d’une vraie démocratie à la base et d’un véritable développement local. Le Président qui va être élu en cette année 2013 ne doit pas être le « troisième président de la IIIème République » mais plutôt le « Premier Président de la Quatrième République » ou, tout au moins, le Président d’une vraie transition vers un avenir plus digne des Maliens.
Posted on: Mon, 05 Aug 2013 14:36:31 +0000

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