L’Information-Valeur et la Communication Nous savons - TopicsExpress



          

L’Information-Valeur et la Communication Nous savons désormais que la lutte contre l’entropie et la mort chez les organismes vivants se caractérise par une structuration de l’énergie et de la matière par le biais de l’information. Pour vivre, il faut que cette information mette en communication, les éléments de et dans la nature. Cette communication leur permet alors, non seulement de se reproduire et de produire, mais aussi de se maintenir, de s’ajuster et de se complexifier dans le temps et l’espace. C’est à partir de l’information et de l’énergie puisée dans l’environnement que la mémoire des organismes et celle de l’Homme opèrent des sélections et se complexifient. La mémoire apparaît ainsi comme un outil biologique programmé d’autorégulation. Les systèmes sociaux issus de cette mémoire collective n’échappent pas au déterminisme de l’entropie (la dégradation du social) dès lors qu’ils échangent l’information et l’énergie avec l’environnement. Ce faisant, ces systèmes organisent l’ordre en produisant la culture et en communiquant, en recherchant la bonne information. Nous l’appelons l’information-valeur. C’est de Maât qu’il s’agit en réalité, puisqu’il est question de s’organiser d’après les canons de la nature afin que celle-ci soit préservée pour tous et pour le futur. Les systèmes sociaux africains ont maintenu leurs structures, leurs organisations et leurs systèmes de valeurs grâce à des emprunts ou des rejets de certaines informations (non efficientes) à l’extérieur. Il en est ainsi de l’enjeu de développement (style occidental) resté incompatible avec le modèle d’épanouissement des systèmes précités. C’est le sens à donner, en gros, à l’échec de développement de l’Afrique. Pour l’Africain, la vie est pensée comme une allégorie du pouvoir d’existence avant la volonté de puissance. Il ne s’agit pas de dominer ou d’assujettir la nature, les êtres, les choses et les hommes, mais d’en faire une réserve toujours plus importante de matière, d’énergie et d’information (développement durable) afin que les groupes sociaux en présence s’assurent une sorte d’extension de soi sans laquelle eux-mêmes ne seront plus. La division clanique du travail et le phénomène des castes sociales ont répondu à cette approche normative par l’information-valeur grâce auquel s’est établi le système des actions communicationnelles en Afrique noire. De l’organisation sociale aux théories scientifiques les plus avancées (cosmologie, astronomie) qui ont visé l’harmonie universelle avant toute chose, tout est devenu savoir, savoir-faire et complémentarité des actions dont la finalité, reprise à toutes les échelles de la société, a été comprise par tous, dans l’intérêt de tous, par le biais des mythes et des rituels, mais aussi de l’éducation. La situation est inversée dans le modèle « classique » occidental. La domination s’impose comme une force de vie. Dans les deux cas (africain et occidental), un système social se maintient si la communication entre ses membres résiste au désordre, intérieur ou extérieur, et augmente l’adaptabilité du système social tout entier. En d’autres termes, l’excès de ressemblances ou de différences produit la mort du système. Ce qu’il convient de retenir entre les deux modèles, ce sont les finalités poursuivies et opposées du point de vue de l’anthropologie et de l’ontologie. D’un côté, l’individu et son rationalisme individuel axé sur la poursuite sans fin du gain ; de l’autre, l’individu dans une communauté manifestant un savoir conforme à l’idéal d’être de la nature et le gain du groupe tout en entier en relation avec les équilibres de cette nature.. Non seulement les mythes africains font intervenir la création d’Ordre à partir du Désordre, mais encore, les innovations de type normatif et institutionnel n’altèrent pas la finalité maâtiste. Elles valorisent les différences et les soucis majeurs du droit, à savoir, le maintien de l’harmonie dans le jeu des différences. Georges Balandier est pionnier dans l’explication de cette démarche en Afrique noire. Il apprécie : « Un ordre ne peut résulter que du jeu des différences et de la hiérarchisation (logique, symbolique, effective) des éléments différenciés. C’est en raison des différences ordonnées que la société et sa culture se constituent en des ensembles organisés que les hommes peuvent s’y définir – construire leur identité – et s’y situer, déterminer leurs positions sociales. » Les mécanismes de la régulation sociale et politique ont alors pour enjeu, la promotion des rapports équilibrés entre groupes sociaux. La pensée vise Maât, une culture de convivialité et de justice sociale. L’Egypte pharaonique en est un témoignage des plus précieux pour avoir archivé la pratique. Alexandre Moret nous explique : « La société égyptienne englobe l’Univers entier : les éléments, autant que les êtres, sont immatriculés, comme partie d’un même tout, collaborateur d’une tâche commune. » Variation et organisation créatrice sont au cœur des mécanismes de l’évolution et la culture en reproduit le sens. En somme, la communication africaine est une mimesis de la dialectique de l’Ordre et du Désordre inscrit dans notre Univers. Les trois théories de la complexité n’envisagent pas autrement les mécanismes explicatifs appliqués aux systèmes sociaux. 1- Le Sens, grand ‘’S’’, apparaît par assimilation du désordre, du bruit, du parasite et de la violence ou leur élimination hors de système (Théorie de l’information) L’information prend ainsi possession d’un cadre sémantique plus large : il procède de la culture où les langues, les mythes, les arts, les sciences et techniques, etc., constituent le Tout informationnel issu de la gestion de l’environnement psychoaffectif, physique, matériel et sociétal. Il y a ainsi quelque chose de très précieux dans ce que le grand penseur Jacques Attali affirme s’agissant des sociétés ritualisées : « Toutes les productions s’inscrivent dans un processus qui doit, par la circulation et par le sens donné à ce qui est produit, empêcher la violence de proliférer, transformer la production de violence en production de sens. » De fait, les revendications d’ordre affinitaire vise le procès d’évacuation de la violence par la transformation des règles devenues obsolètes. L’idée est celle d’une rétroaction au sens de Karl Marx, entre la superstructure et l’infrastructure. Ce procès de la forme engagée dans l’activité de communication met alors en jeu le gabarit cognitif des systèmes sociaux en vue d’une valorisation normative du cadre de l’expression cognitive du politique. 2- Même intégrées à un gouvernement de type fédéral ou confédéral, les entités traditionnelles autoorganisées conservent leur autonomie historique et inaliénable en cas de fragilisation du pouvoir. C’est qu’en définitive, chaque entité se suffit à elle-même (théorie cybernétique). La sociologie africaine colle ainsi à la configuration des systèmes de l’Univers, à son organisation en sous-systèmes hiérarchisés poursuivant chacun une finalité conforme à la finalité universelle. Nous l’appellerons sociologie complexe : ses concepts, sa méthodologie et son fondement théorique adhèrent au modèle d’organisation de notre Univers d’où l’expression Universisme philosophique et culturel contre l’enjeu déterministe, réductionniste et mécaniste de la sociologie dominante. 3- La construction d’une sociologie africaine doit pouvoir contribuer à cette visée renouvelée de la raison. Elle doit montrer, à l’instar de la théorie des systèmes, comment l’Afrique a conçu les hiérarchies des niveaux d’organisation, les sous-systèmes et la façon dont le Tout s’imbrique à toutes les échelles en rétroagissant sur les parties ; enfin, comment l’organisation politique et sociale se fait avec et contre le Désordre dans l’action communicationnelle. La théorie africaine du Réel ne fait que commencer à dévoiler le caractère réellement spirituel et même religieux de la science, à une échelle qui nous contraint à modifier notre regard sur la matière ; cette matière où finalement, le Chaos intervient dans le système dynamique le plus simple, la spirale de Maât, qui en répercute la magistrature aux systèmes dynamiques complexes. Avec la déesse Maât, on a la preuve que le Chaos n’a pas besoin de complexité pour avoir une place de premier choix dans l’événementiel ou l’émergence des formes (rappelons cette lutte génésique Horus/Seth). « Restaure la Vérité et la Justice (Maât) en toute chose, inanimée soit-elle » est le credo des régulateurs, la proposition sociale répétée ad libitum. Ainsi s’installent des étapes successives de la raison qui chacune, résulte d’une déformation de la précédente depuis des temps historiques, aux frontières de la théorie des fractales (objet géométrique) de Benoît Mandelbrot. Celui-ci a mathématisé certains phénomènes se produisant dans la nature avec des structures similaires (réseaux fluviaux, arborescences des failles sismiques). Ce savant a établi une règle de construction définie que l’on retrouve à toutes les échelles de façon canonique à l’instar de la spirale algébricogéométrique de Maât. La leçon à tirer est la suivante : parce que les systèmes les plus simples peuvent présenter une évolution imprédictible, la pensée suggère de maîtriser le Chaos par le biais de la communication aux plus petites échelles afin qu’aux grandes échelles, les risques d’une « percolation » des systèmes soient maîtrisés à tout le moins minimisés. En d’autres termes, les systèmes sociaux africains peuvent être perçus comme des « objets mathématiques » avec une reproduction de structures similaires (Maât), sans qu’on sache à quelle échelle on les voit, depuis la pensée (mythes, arts, science, théorie) jusqu’aux empires en passant par les lignages, clans et empires. Cette « sensibilité aux conditions initiales » ruine ainsi la possibilité de prédire à long terme, le comportement du système. Il nous est difficile de prédire ce que l’Afrique sera demain (futur). Si l’échelle change, la forme elle, ne change pas. Maât garde sa conformité géométrique à toutes les échelles. Une géométrie y afférente ne peut donc pas être circulaire, la circularité s’inscrivant comme le symbole de mort du système (rien n’entre, rien n’en sort). La géométrie de Maât est, pour ainsi dire, spiralée et non circulaire (au sens de Jacques Fame Ndongo), car génératrice d’une transformation, d’un nouveau palier. Il n’ y a pas que le retour d’information du récepteur sur l’émetteur au sens de N. Wiener. Il y a un retour d’information produit la nouveauté, la transformation (kheper). Il y a un palier supérieur qui est franchi. La circularité n’ést qu’apparence. L’enjeu c’est d’éviter de faire « tourner son modèle communicationnel » au sens mécaniste du terme, c’est-à dire en le supposant isolé et relativement autonome par rapport à l’environnement, et surtout, en supposant sa reproduction à l’identique de manière indéfinie. Il existe en effet des variables et des acteurs avec des ruptures, des stratégies qui transforment le système social. L’erreur serait de considérer une géométrie qui fige le mouvement des acteurs pour se trouver après coup, incapable d’en expliquer les actions, dans le strict sens de la communication relationnelle et interactionnelle. Rappelons que le Chaos est cette tendance qu’a un système physique d’évoluer de façon radicalement différente pour peu que les conditions initiales soient affectées par de nouveaux paramètres, si proches soient-ils de ces conditions initiales. Par exemple, le fait de verser le sable à un même endroit avec des éboulements successifs chaque fois que le seuil critique de la charge recevable est atteint. Il en va ainsi de la démographie en milieux sociaux. Depuis que la physique quantique s’intéresse activement à sonder l’infiniment petit, l’immatériel et l’invisible ne représentent plus pour la science, une catégorie inaccessible. La communication est devenue possible par le biais des technologies nouvelles. Ce qui, hier encore, était contesté à l’Afrique au nom de la ‘’superstition’’ fait école en complexité. Du coup, l’interprétation des phénomènes paranormaux prend une tournure sociologique plus confortable, entre Ordre et Désordre. Aurélien Barrau, spécialiste en cosmologie et en physique subatomique confesse : « Pour la première fois je crois, c’est la rationalité qui semble conduire à l’existence des mondes invisibles. Autrement dit, cette proposition, que je considère comme scientifique au sens le plus orthodoxe du terme, mène à l’existence d’objets qui dépassent le strict cadre de cette pensée scientifique. » Nous voudrions tirer partie de tout l’intérêt qu’offre ce changement de l’entendement en science. C’est avec l’avènement d’une pensée devenue complexe (résolutions systémiques) que la nécessité s’est faite sentir de considérer la société comme un Tout, c’est à- dire un système énergétique autorégulé et d’agréger pour sa compréhension plusieurs disciplines, entre autres, l’histoire, l’anthropologie et la sociologie, etc. L’enjeu a été de saisir dans un jet d’ensemble, les lois et mécanismes multiformes qui gouvernent l’évolution des sociétés, suffisamment globales et complexes, voire paradoxales, pour être analysées par des spécialistes dispersés. Il s’est donc agi de gérer une crise de la science et de la pensée « classique », depuis longtemps rongées par les spécialités toujours plus diverses et diversifiées entre autres, les ethnosciences, l’anthropologie, la sociologie, l’histoire, la linguistique, etc., qui ont fini par occulter la complexité du fait social. Il faudrait que nous ayons conscience de ce qui a fait défaut à la science « classique » pour rompre en toute connaissance de cause avec les séquelles que nous subissons encore, malgré nous. Mbombog Mbog Bassong Tiré du livre : SOCIOLOGIE AFRICAINE : Paradigme, Valeur et Communication (
Posted on: Wed, 19 Jun 2013 22:04:39 +0000

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