L’origine du monde n’est pas commencement mais principe. C’est le sens fort du mot archè. L’effort des premiers philosophes pour véritablement rendre raison de la réalité, a consisté en un passage du registre du mythe à celui du discours vrai, formé non plus de récits imaginaires mais de concepts. Or, le concept n’envisage pas des faits précis, des événements passagers, comme dans le récit, mais des causes et des états de fait qui vont marquer la vérité d’un caractère de permanence et d’universalité (l’idée platonicienne). Ainsi, pour la philosophie, l’origine ne peut se traduire en terme de commencement, car si tout est état et non pas événement, si tout ce qui est renvoie à du principe, lequel ne saurait être extérieur à ce qui est, mais inhérent, l’idée même de commencement n’a pas de sens. Le dernier grand philosophe de l’Antiquité, Plotin, ne parle ni de commencement ni de création mais d’émanation. Pour lui, toutes choses tiennent leur degré d’être de l’épanchement du Bien absolu qui conserve en lui la totalité de l’être. Rien ne commence dans les réalités, puisqu’elles n’existent qu’en dépendance de ce Bien qui, évidemment, échappe à toute temporalité. La linéarité temporelle, à laquelle nous nous référons presque inévitablement, fait place chez Plotin à un étagement vertical des états d’être et de leur principe. Le principe, certes, est l’origine, mais cette origine ne produit aucune véritable séparation ontologique et par conséquent aucun commencement.
Posted on: Sat, 13 Jul 2013 02:16:21 +0000
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