Nous avons rapporté comment Salah-eddyn sétait transporté dAcre - TopicsExpress



          

Nous avons rapporté comment Salah-eddyn sétait transporté dAcre à Kharrouba, a cause de sa maladie Quand il fut guéri, il continua de séjourner dans le même endroit jusquà ce que lhiver se fut écoulé. Tandis quil demeurait à Kharrouba, son avant-partie et ses éclaireurs ne s’éloignaient pas des Francs. Lorsque le mois de safer 586 fut commencé (10 mars 1190), les Francs apprirent que le sultan était parti pour la chasse, et saperçurent que le corps dannée qui se trouvait à lavant-garde tout près deux était peu considérable; que la boue qui couvrait en grande quantité la prairie dAcre empêcherait dy marcher quiconque voudrait se porter au secours de lavant-garde. Ils saisirent avec empressement cette occasion et sortirent de leurs retranchements pour attaquer lavant-garde, au moment de la prière de lasr (de trois à quatre heures de laprès-midi). Les Musulmans leur résistèrent et se défendirent à coups de flèches. Les Francs sécartèrent deux jusqu’à ce que leurs dards fussent épuisés. Alors ils les chargèrent tous ensemble, le combat redoubla et la situation devint très grave. Les Musulmans, reconnaissant quils navaient de secours à attendre que de leur constance et de leur courage à se battre, firent comme des gens résignés à la mort, jusquà ce que la nuit survint. Un grand nombre dhommes furent tués de chaque côté, et les Francs retournèrent dans leurs retranchements. Salah-eddyn, étant revenu dans son camp, reçut la nouvelle de cette action et invita ses soldats à secourir leurs frères. Mais il eut avis que les Francs étaient rentrés dans lenceinte de leurs ouvrages défensifs. Il attendit donc; mais quand il vit que lhiver sétait écoulé, que des troupes lui étaient arrivées des contrées voisines, Damas, Emèse, Hamah, etc. il savança de Kharrouba vers Acre, rampa sur la colline de Cayçân et combattit les Francs tous les jours, afin de les empêcher dattaquer les Musulmans qui se trouvaient dans Acre. Mais lennemi combattait les deux armées sans se rebuter. Depuis quils étaient campés devant Acre les Francs avaient construit trois tours de bois extrêmement hautes, dont chacune était élevée de soixante coudées. Ils divisèrent chacune delles en cinq étages, tous remplis de combattants. Ils avaient tiré des îles (voisines) les poutres nécessaires à leur construction, car pour ces grandes tours il ne convient demployer que des pièces de bois telles quil sen rencontre très rarement. Ils avaient recouvert ces machines de guerre avec des peaux enduites de vinaigre, de terre glaise et de drogues propres à empêcher le feu de les consumer. Ils préparèrent les chemins et firent avancer les tours vers Acre par trois côtés différents. Ils se portèrent eux-mêmes en avant, le 20 du mois de rebi premier (27 avril 1190). Les tours dominaient la muraille, et les gens quelles renfermaient combattirent les guerriers qui la garnissaient. Ceux-ci senfuirent, et lennemi commença de combler le fossé de la ville, qui fut sur le point d’être prise de vive force. Les habitants envoyèrent à Salah-eddyn un homme qui gagna le rivage en nageant, et fit connaître au prince la détresse où ils se trouvaient et combien ils se voyaient près dêtre pris et massacrés. Le sultan et ses troupes montèrent à cheval, savancèrent contre les Francs et les combattirent de toute part avec vigueur et persévérance, afin de les empêcher dattaquer la ville. Les Chrétiens se séparèrent en deux troupes, dont une faisait face à Salah-eddyn, lautre, aux habitants dAcre. Toutefois la situation de ceux-ci se trouva allégée. Le combat dura huit jours consécutifs, dont le dernier fut le 28 du mois (5 mai 1190). Les deux armées furent fatiguées et excédées de se battre, car la guerre ne discontinuait ni jour ni nuit. Les Musulmans savaient de source certaine que les Francs sempareraient de la ville, par la raison quils remarquaient limpossibilité ou se trouvait la garnison de repousser les tours roulantes. En effet, elle navait laissé aucune ruse sans y avoir recours; mais cela ne lui avait servi de rien et ne lui avait nullement profité. Elle avait lancé contre les tours à plusieurs reprises du naphte volant, qui ny avait produit aucun effet. Alors elle se tint assurée de périr complètement. Mais Dieu lui apporta du secours et permit que les tours fussent brûlées. Voici de quelle manière cela eut lieu : Un homme originaire de Damas avait la passion de réunir les instruments à lusage des artificiers et de se procurer des drogues propres à fortifier laction du feu. Ceux qui le connaissaient le blâmaient de ce goût, et le lui reprochaient. Il leur répondait : « Cest là une chose dont je ne moccuperai pas personnellement, mais dont je désire acquérir la connaissance. » Cet individu se trouvait alors à Acre, pour un objet que Dieu avait en vue ; et quand il vit que des tours de bois avaient été dressées contre cette place, il entreprit de préparer les drogues propres à fortifier laction du feu, drogues dont il possédait la connaissance, et que ne pouvaient combattre ni la terre glaise, ni le vinaigre, etc. Lorsquil eut terminé ses préparations, il vint trouver lémir Karakouch,[10] qui était placé à la tête des affaires dans Acre et y exerçait lautorité. « Ordonne, lui dit-il, au chef des balistes de lancer avec la baliste placée vis-à-vis une de ces tours ce que je lui remettrai pour la consumer. » Karakouch éprouvait de tels sentiments de colère et une telle crainte pour la ville et pour les gens qui sy trouvaient, que peu sen fallait quil ny succombât. Le propos de cet homme ne fit qu’augmenter son indignation; il semporta contre lui et lui dit : « Les artificiers ont tenté les derniers efforts pour lancer le naphte et dautres substances, et ils nont pas réussi. » Les assistants dirent à Karakouch : « Peut-être Dieu a-t-il placé notre délivrance dans les mains de cet homme : en tout cas, si nous nous conformons à en quil propose, il nen peut résulter pour nous aucun dommage. » Lémir consentit donc et prescrivit au chef des balistes dobéir aux ordres du Damasquin. En conséquence, cet officier fit lancer plusieurs marmites remplies de naphte et de drogues auxquels on navait pas mis le feu. Quand les Francs sapercevaient que le contenu du chaudron ne consumait rien, ils criaient, dansaient et jouaient sur la plate-forme de la tour. Mais lorsque cet homme connut que ce quil avait lancé sétait attaché à la tour, il lança encore un chaudron rempli des mêmes substances, après y avoir mis le feu. La tour fut enflammée. Une seconde et une troisième marmite ayant été jetées, le feu salluma sur les différentes faces de la tour, et devança[11] dans leur fuite et dans leurs tentatives pour se mettre en sûreté ceux qui en occupaient les cinq étages. Elle fut donc consumée avec ce quelle renfermait : il sy trouvait un grand nombre de cuirasses et dautres armes. La confiance que les Francs avaient ressentie, à cause des premiers chaudrons qui ne produisirent aucun effet, les avait disposés à la sécurité et fit quils renoncèrent à tenter tous leurs efforts pour se sauver. De là vint que Dieu leur fit goûter par avance en ce monde le feu qui les attendait dans lautre vie. Quand la première tour eut été consumée, notre homme s’occupa de la seconde, qui avait été abandonnée par ceux, quelle renfermait, tant ils étaient effrayés; il lincendia, ainsi que la troisième. Ce fut là un jour solennel,[12] et dont les hommes navaient pas encore vu le semblable. Les Musulmans considéraient ce spectacle et se réjouissaient; leurs visages, en place de laffliction qui sy voyait auparavant, rayonnaient de joie, à cause du secours que leur avait accordé Dieu et de ce que les Musulmans avaient échappé à lextermination. En effet, il n’y avait, parmi les disciples de Mahomet, personne qui ne comptait dans la ville soit un parent, soit un ami. Le Damasquin dont il a été question fut conduit à Salah-eddyn, qui lui offrit des richesses magnifiques et un fief considérable. Mais il ne voulut pas accepter la moindre chose (littéralement : « un seul grain ou 72e de drachme »). « Je nai agi ainsi, répondit-il, que pour Dieu, et je ne veux recevoir de récompense que de lui seul. » On expédia dans les diverses provinces des lettres annonçant ces bonnes nouvelles. Salah-eddyn manda les troupes de lOrient (cest-à-dire de la Mésopotamie). Le premier qui arriva à son appel était Imad-eddyn Zengui, fils de Maudoud, fils de Zengui, prince de Sindjar et du Djézireh. Après lui vint Ala-eddyn, fils dIzz-eddyn Maçoud, fils de Maudoud, que son père, le prince de Mossoul, avait fait partir à la tête de ses troupes. Puis survint Zeyn-eddyn Youçouf, prince dArbil. Chacun deux, à mesure quil arrivait, savançait vers les Francs avec son armée; dautres soldats se joignaient à lui et laidaient à combattre lennemi. Après quoi les nouveaux venus dressaient leurs tentes. Dun autre côte, la flotte arriva dEgypte. Quand les Francs eurent avis de son approche, ils expédièrent dans la direction quelle suivait une flotte chargée de lui livrer bataille. Salah-eddyn monta à cheval avec toutes ses troupes et attaqua lennemi dans toutes les directions, afin de lempêcher par là dassaillir la flotte, et de permettre à celle-ci de sintroduire dans Acre. Mais les Francs ne se laissèrent détourner par rien dattaquer la flotte musulmane. Le combat sengagea donc entre les deux armées, tant sur terre que sur mer, et ce fut là une journée solennelle, telle quon nen raconte pas de semblable. Les Musulmans prirent un vaisseau chrétien, avec les hommes et les armes quil renfermait. Les Francs firent une pareille prise sur les Musulmans; mais le carnage parmi eux fut plus grand que parmi leurs adversaires. La flotte musulmane parvint saine et sauve à sa destination.
Posted on: Sun, 01 Dec 2013 04:12:09 +0000

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