On dit des hommes, et particulièrement des Noirs, qu’ils ont la - TopicsExpress



          

On dit des hommes, et particulièrement des Noirs, qu’ils ont la mémoire courte. C’est peut-être parce qu’ils sont convaincus de ce postulat, que certains hommes politiques véreux prennent le malin plaisir à répéter le faux à longueur de journée et à coups de meetings pour le faire passer pour (le) vrai aux yeux et à la mémoire des Ivoiriens. Et celui qui a choisi résolument et définitivement cette méthode, appuyée par toute la rhétorique qui va avec, c’est le Président de notre Assemblée nationale, saint Soro Guillaume. Il y a un proverbe africain qui dit : «Tant que les lions n’auront pas leur propre historien, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur. » La «cécité mentale» volontaire de la France En février 2005, le gouvernement de Jacques Chirac avait réussi à faire adopter une loi dont l’article 4 stipulait que désormais, les programmes scolaires (français et certainement tous les autres affiliés) doivent insister sur le rôle positif de la présence française pour les peuples colonisés ; les Africains en premier lieu. Cette loi a provoqué une tempête politique et intellectuelle, et a fait rage un peu partout en Europe et dans le monde. Sur le continent africain, la plus forte réaction est venue du président algérien, Abdelaziz Bouteflika, qui y est allé sans gans. Il a accusé la classe politique française de «cécité mentale». Cette loi sur les bienfaits de la colonisation ne pouvait qu’être perçue comme une justification de la guerre et des exactions françaises. Un historien africain, Patrick DRAME, avait réagi en ces termes : « Aussi surprenant que cela puisse paraître, le débat sur cette loi française a lieu surtout entre la France et l’Amérique, car en Afrique même, les discussions sur l’histoire africaine concernent avant tout l’époque précoloniale et l’écriture de celle-ci. Les historiens africains considèrent l’épisode colonial comme négatif, et c’est un fait accepté par la très grande majorité de la communauté intellectuelle. Bien évidemment, les historiens et l’opinion publique ont fortement dénoncé la tentative du gouvernement de mettre en place un enseignement de l’histoire coloniale «orienté», mais en général, les hommes politiques africains sont restés plutôt muets sur le sujet. Pour les Etats africains, l’histoire n’est pas un enjeu majeur dans les querelles politiques et internationales, et l’Etat n’entretient pas toujours des rapports étroits avec la communauté intellectuelle et historienne. Ce sont surtout les historiens africains de la diaspora, ceux installés en Amérique ou en Europe, qui ont le plus protesté contre cette loi… » Il faut comprendre cette tentative de la France un peu comme si quelqu’un sortait de nulle part aujourd’hui, pour dire aux Sud-Africains que durant toutes les années d’Apartheid, ce sont les Noirs qui maltraitaient les Blancs. Les malheurs de la Côte d’Ivoire Dans ses nombreuses tentatives de falsification du passé, Soro présente Laurent Gbagbo comme le seul responsable… De notre point de vue, on ne peut occulter que les malheurs de la Côte d’Ivoire ont commencé en 1999 avec le coup d’Etat de Guéi et ses « jeunes gens » contre le président Bédié. Mais cet évènement malheureux qui a emporté le pouvoir de Nzueba n’est rien devant le coup de feu du 19 septembre 2002. Les Ivoiriens se sont réveillés ce matin du 19 là avec de nombreux morts à la suite d’une tentative de coup d’Etat : Boga Doudou, Guéi Robert, Marcelin Yacé… La Côte d’Ivoire venait de vivre les plus grands horreurs de toute son histoire. Les images sont encore là qui témoignent : Les gendarmes assassinés à Bouaké, les populations pillées et massacrée, forcées de négocier une sortie de la ville de Bouaké, avec des enfants qui marchaient sur des dizaines de kilomètres, les pieds nus… Puis face à toutes ces atrocités, Soro Guillaume et ses amis négociaient des portefeuilles ministériels dans un gouvernement de Gbagbo. Qui leur a « tout » cédé. Au nom de la paix. Et depuis, pendant dix ans, le pays est allé selon les humeurs oh combien de fois versatiles du secrétaire général du Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire (MPCI) mué plus tard en Forces Nouvelles (FN). Soro Guillaume, comme cette France… En effet, le vendredi 15 mars dernier, dans le cadre de ce qu’il nomme lui-même l’« ouverture de notre Assemblée Nationale sur l’Afrique et le monde », dont l’objectif est de « mettre l’accent sur le développement de notre diplomatie parlementaire…au sein des Assemblées parlementaires auxquelles nous appartenons, qu’elles soient régionales ou internationales », saint Soro Guillaume s’est retrouvé devant ses collègues congolais. Il a prononcé une allocution dite historique dans laquelle il a encore accablé et fustigé Laurent Gbagbo, le pauvre qui n’a pas fini de se démerder avec la Cpi. Aussi est-il connu de tous, qu’« un mensonge répété sans cesse finit par devenir une réalité ». Mais écoutons le numéro 2 Ivoirien : « Il n’y a pas à tergiverser : ne confondons pas le feu et la fumée et reconnaissons que l’ancien Président est le seul responsable et coupable de la crise postélectorale et de ses dramatiques conséquences pour la population, et notamment pour les Ivoiriens et les étrangers les plus vulnérables et les plus démunis. » Sic ! Il faut s’interroger sur l’objectif réel (mais voilé) que vise le Président de l’Assemblée nationale (PAN). Pourquoi tient-il tant à tronquer une histoire commune aussi récente ? N’est-il pas exagéré voire insincère que Soro Guillaume affirme que Laurent Gbagbo est le seul responsable de la crise ivoirienne ? Et puis quoi encore ! A-t-il accès aux résultats de la commission nationale d’enquête sur les évènements postélectoraux dont il est lui-même un acteur clé ? Que de tentatives de falsification ! C’est Ulrich Wickert, journaliste-écrivain allemand qui assura la couverture de toutes les élections présidentielles françaises de 1969 à 1978 pour l’émission Monitor, qui disait qu’« on a toujours su falsifier l’histoire pour des motivations politiques ». Dans le débat politique, il est tout à fait évident que la liberté d’expression est un élément essentiel du baromètre de la démocratique. Il consacre ce mode de gouvernance où chacun devra être libre de penser et d’exprimer ses idées comme il l’entend, bien sûr à la condition sine qua non de reconnaître ce droit aux autres, et de le respecter effectivement. C’est aussi le fondement de la construction de l’Etat-nation. Attention à ne pas confondre cette liberté d’expression avec le droit de faire quelques arrangements avec la vérité pour ce qui concerte notre expérience commune, notre histoire commune. Qui, elle, a des témoins vivants. Dans son discours d’ouverture de la 1ère session ordinaire de l’Assemblée Nationale à Yamoussoukro, le 25 avril 2012 : « Les récents évènements survenus au Mali d’abord et en Guinée-Bissau ensuite, nous interpellent et nous désolent tous. Ils marquent assurément un profond recul dans la marche de la démocratie dans la sous-région. C’est pourquoi il convient de saluer la prompte réaction de la CEDEAO et de son Président, SEM Alassane Ouattara, qui a su, de concert avec tous ses pairs, prendre les mesures énergiques nécessaires pour que soient préservés les intérêts de ces deux peuples frères. » Les tentatives de coup d’Etat sont donc un « recul dans la marche de la démocratie », des coups durs portés à la démocratie ? Que dire donc d’un certain 19 septembre 2002 ? S’agissant de lui et de ses petits camarades de feu qui sévissent aujourd’hui dans les ministères, à la tête des institutions de l’Etat et aux plus hautes responsabilités de l’armée, Soro dit que « les armes se sont imposées à eux », mais pour le Mali et la Guinée-Bissau, c’est un recul démocratique. C’est vrai, comme un amnésique, on ne se souvient plus de rien. On a oublié que le fameux Accord politique de Ouagadougou signé le 4 mars 2007, prévoyait une loi d’amnistie. Laquelle sera effective par ordonnance prise par Laurent Gbagbo le vendredi 13 mars 2007. Et Soro Guillaume sera alors nommé au poste de Premier ministre ; au nom d’une certaine réconciliation et paix ! Comme on ne se souvient plus de ce que ce sont ces ex-com-zones (Cherif Ousmane, Koné Zacharia dit « Djakis », Issiaka Ouattara dit « Wattao », Martin Fofié Kouakou), – tous devenus riches grâces aux casses des agences de la Bceao à Bouaké et à Man, et au trafic des produits agricoles vers les pays voisins qui n’en produisent pas mais qui sont désormais de grands exportateurs-qui sont désormais les sécurocrates de ce pays. Ceux là-mêmes qui ont tenté le coup d’Etat, et qui l’ont transformé en rébellion, coupant le pays en deux. Et voyons comment l’insécurité prospère et émerge dans ce pays ! Et comme on n’a tout oublié, c’est le chef de l’Etat lui-même qui a pratiquement fait l’apologie de la rébellion. A l’étape de Ferké de sa dernière visite d’Etat dans le nord du pays, le 07/07/2013, notre président Alassane Ouattara 1er s’est laissé aller : «Soro Guillaume a fait preuve de courage, il a fait preuve de sacrifice et il s’est battu pour que les populations du nord puissent recouvrer leur dignité par la nationalité. » N’est-ce pas que la politique africaine est vraiment un art à part ? Mais bon, la fin justifie peut-être les moyens ! Il n’y a pas pire ennemi d’un peuple que celui qui réussit à (ou même tente de) lui voler son histoire. Autrement, les grands courants de pensées et d’idéologies africains anticolonialistes et anti néo-colonialistes tels que la Négritude, la tigritude…n’auront plus de sens, ni de fondement. Or nous parions le contraire. Nous sommes convaincus que nos pères ne se sont pas trompés de combat, ni d’adversaire. Ils ont mené une lutte juste et noble. Les résultats sont là. On sait désormais que l’homme noir n’est pas forcément blanc à l’intérieur et inversement. « Le cycle infernal de la bêtise humaine », dit Wole Soyinka. Il s’est agit pour eux (nos pères) de se battre pour la reconnaissance de notre Histoire. Entièrement. Dans toute sa beauté comme dans toute sa laideur, c’est notre Histoire. Voilà pourquoi il faut que Soro Guillaume arrête ses efforts pour tenter de tronquer l’Histoire commune de notre pays, en tout cas le pan dans lequel il est acteur ; ses efforts à nous dire autre chose que ce que nous avons vécu il y a si peu de temps.
Posted on: Mon, 21 Oct 2013 07:52:22 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015