Présidentielle : nouveaux interdits au nom de la - TopicsExpress



          

Présidentielle : nouveaux interdits au nom de la «stabilité» Taille du texte normaleAgrandir la taille du texte le 25.10.13 | 10h00 5 réactions Imprimer Envoyer à un ami Flux RSS Partager Face à l’absence d’un scénario consensuel pour 2014, le régime panique et tente de se protéger en menaçant et en réprimant toute forme de contestation. Une réaction récurrente avant chaque rendez-vous électoral, accentuée cette fois-ci par les dissensions entre les différents centres du pouvoir. Aucune contestation possible. A six mois d’une élection présidentielle qui s’annonce tragicomique, alors que les rumeurs se contredisent chaque jour sur la présentation –ou pas – du président Bouteflika à un 4e mandat, sans qu’aucun candidat sérieux ne se soit encore déclaré, voilà le seul message clair qu’envoie le pouvoir. Cette semaine, le juge d’instruction du tribunal de Sidi M’hamed a refusé de remettre en liberté le jeune Abdelghani Aloui, coupable d’avoir caricaturé le chef de l’Etat sur facebook. Depuis plusieurs jours, les attaques contre le mouvement des chômeurs se font aussi plus violentes dans les journaux qui servent de relais au régime. La semaine dernière, un chroniqueur d’El Khabar s’est vu officiellement menacé par – c’est une grande première – le ministère de la Défense, particulièrement réactif depuis les changements opérés par la présidence dans l’organigramme du DRS. L’armée qui, depuis juin dernier et son avertissement à Mohamed Mechati en juin dernier, en est à son troisième tir de semonce. «En clair, l’armée, en proie elle aussi à des tensions internes, entre DRS et CEM, entre générations d’officiers, etc., réagit promptement à ceux qui diagnostiquent ses vrais problèmes. En plus, Gaïd Salah se voit aujourd’hui tout puissant, il ne supporte plus qu’on le critique», note un ancien haut cadre de l’Etat. Fièvre Si le système tient à ce point à contrôler son image, c’est, de l’avis de ceux qui gravitent plus ou moins près de son noyau, parce qu’«il a peur». D’abord parce que Liamine Zeroual ayant refusé de se présenter (et de gagner), les différents courants n’arrivent pas à dégager un horizon clair pour 2014. «Ils sont traversés par le doute car ils n’ont pas beaucoup d’options. Ils sont condamnés à espérer que le Président soit capable de tenir le coup, résume Abderrazak Makri, leader du MSP. Ce régime n’a pas beaucoup de temps pour fabriquer un candidat car il a été pris de court par l’hospitalisation.» Ensuite parce qu’il veut à tout prix éviter que les dissensions internes soient rendues publiques. Un ancien haut fonctionnaire de l’Etat, habitué aux accès de fièvre autoritaire du système, qui promet «encore plus de fermeture» pour les prochains mois, considère que les prémisses d’un verrouillage se devinaient déjà dans le remaniement du gouvernement en septembre dernier. «Nommer à la tête des trois ministères en communication avec l’étranger – la Communication, les Affaires étrangères, les Affaires maghrébines – des hommes du système, qui dépassent le paradigme pro ou anti-Bouteflika, est très révélateur. Messahel, Lamamra et Bouguerra ont été placés là pour faire en sorte que l’Algérie garde son image de pays stable, et rendre séduisante l’idée d’un quatrième mandat pour Bouteflika.» (voir encadré). Louisa Dris-Aït Hamadouche, politologue, estime que «le pouvoir ne peut plus faire ce qu’il veut». «Pour survivre et se perpétuer, explique-t-elle, il a besoin de montrer que c’est un régime fréquentable, politiquement correct, qui sait, le moment venu, s’adapter.» Soubresauts Autant dire que le dernier rapport du Comité international de soutien au syndicalisme autonome algérien (CISA) et le rapport de RSF, recalant l’Algérie de trois rangs, sont très mal tombés. Le premier rappelle que la «politique sociale» du pouvoir est constante : «Contrôler et limiter la parole et les actes de celles et ceux qui, dans les syndicats autonomes, agissent pour plus de liberté et de démocratie dans le pays.» Et d’insister : «L’élection présidentielle prévue en mai 2014 et les soubresauts qui lui sont liés (maladie du Président, scandales de corruption, manœuvres des différents clans du pouvoir pour conserver leur hégémonie et accaparer la rente pétrolière…) ont des retombées directes sur la gestion de la force de travail par le régime, peut-on lire. Le contexte régional même (frontières fragiles avec pratiquement tous les pays avoisinants) et la montée des différents mouvements sociaux impliquent que le pouvoir devra choisir entre une répression violente, qui fragilisera encore plus le corps social, et une intégration-cooptation mesurée des organisations syndicales autonomes.» Le second, qui attribue à Algérie une 125e place, dans le bas du tableau qui en compte 179, explique ce recul par la «multiplication des agressions à l’encontre des professionnels de l’information, et l’augmentation des pressions économiques sur les médias indépendants. Plus d’un an après le vote par le Parlement algérien d’une nouvelle loi sur l’information, censée abolir le monopole de l’audiovisuel public, l’autorité de régulation, préalable indispensable, n’a pas encore été instituée. Aucune chaîne de droit privé algérien n’a pu voir le jour. La nouvelle législation reste donc théorique, un simple effet d’annonce.» Pour contrôler son image, le pouvoir ne le sait que trop bien depuis les révoltes arabes, il faut aussi contrôler l’information sur les réseaux sociaux. Azerbaïdjan L’affaire Abdelghani Aloui, inconnu, envoyé en prison pour des photomontages publiés sur sa page facebook, en est une parfaite illustration. Et devant la mobilisation des réseaux de défense des droits de l’homme, le régime a trouvé la parade : le faire passer pour un islamiste. «Une façon sûre de calmer les Occidentaux, reconnaît même un diplomate. C’est pour cela qu’à leurs yeux, l’Algérie ne sera jamais l’Azerbaïdjan ou la Russie.» Et le moment venu, il saura promouvoir la 3G, même s’il est l’un des derniers pays au monde à la lancer. «On est dans la définition d’un régime semi-autoritaire, résume Louisa Dris Aït Hammadouche, qui réprime d’un côté mais offre de l’autre des ressources pour maintenir les équilibres. Il se permet des ouvertures tout en gardant une marge de manœuvre pour que la structure du régime politique ne change pas. C’est une des raisons pour lesquelles l’Algérie, le Maroc ou encore la Jordanie ont pu résister aux turbulences régionales.» Les campagnes de dénigrement, le Comité national pour la défense du droit des chômeurs connaît bien. Deux de ses leaders, Tahar Belabès et Yahia Bounouar, en font les frais ces derniers jours, taxés de «traîtres» par un quotidien privé pro-régime reprenant à son compte la rengaine du «complot international». Des menaces et des insultes reprises par Saïda Benhabilès, ancienne ministre, «qui se présente comme membre actif de la société civile, mais qui a toujours brillé dans les forums internationaux par sa verve faussement souverainiste contre les ‘‘ennemis de l’Algérie’’», précise un cadre du comité. Entre-temps, des groupes facebook ont aussi publié des vidéos diffamatoires calomniant la famille d’Abdelmalek Aïbek, autre leader du mouvement. «Ces attaques coïncident avec d’autres tentatives d’intimidations directes : manœuvres pour introduire un homme armé lors des sit-in, poursuites judiciaires et arrestations», relève, presque désabusé, Tahar Belabès. Le tour de vis s’applique également aux partis politiques. Le groupe des 14, qui réunit des formations opposées à la révision de la Constitution, faute d’avoir obtenu une autorisation de la wilaya, a été empêché de tenir une réunion début octobre à l’hôtel Essafir, à Alger.. Coupure délectricité «Trois jours n’ont pas suffi à l’administration pour nous délivrer une autorisation alors que dans un autre cas, un parti politique (FLN, ndlr) a pu arracher une décision de justice et une autorisation en l’espace de deux heures seulement !», ironise Abderrezak Makri, qui a récemment connu une autre mésaventure lors de l’enregistrement d’un débat sur France 24 à Alger. «Nous nous trouvions dans un studio qui appartient à l’Etat, à Riad El Feth, quand soudain l’électricité s’est coupée», raconte-t-il. Un autre secteur, symbolique en tant qu’espace d’expression, vient de subir les frappes de l’Etat inquisiteur : le livre et l’édition. Le projet du livre et de l’édition, présenté par le ministère de la Culture, a été dénoncé par une bonne partie des professionnels du livre : «Si le projet de loi est adopté, il nous faudra une autorisation du ministère pour la moindre action culturelle, pour la moindre rencontre avec un auteur… sans parler des autorisations pour ouvrir une librairie !», s’insurge un éditeur. «Le régime ne veut pas basculer vers plus d’ouverture, constate Soufiane Djillali. Il a décidé de continuer d’appliquer le même fonctionnement et de favoriser le clientélisme grâce à l’argent des hydrocarbures. La légitimité de la compétence n’est là que pour gérer les choses au jour le jour – assurer le gaz, l’eau, l’électricité aux Algériens – mais pas pour gouverner.» Un ancien décideur estime aussi que «le risque de rater la transmission biologique entre les septuagénaires de la légitimité révolutionnaire et la génération technocrate toujours brimée est réel. A part l’allégeance, le système n’a pas su créer d’autre forme d’adhésion à son projet, que ce soit dans le civil ou le militaire. Il n’a pas su établir un rapport de raison avec les Algériens et a privilégié les rapports de force avec les citoyens.» La loi sur le cinéma ou la bureaucratisation de l’art Tout a débuté un 4 août 2013, au Journal officiel. Trois décrets sur la loi du cinéma algérien sont appliqués. Mais, et c’est là que tout devient étrange, le contenu de ces articles fera le «buzz» seulement deux mois plus tard. Que nous disent ces trois décrets ? Sur la forme, pas grand-chose d’extraordinaire. Sur le fond, c’est une autre histoire. Pour chaque projet cinématographique sur le territoire algérien, trois autorisations sont obligatoires : celle d’exercer l’activité (les producteurs, au bout de cinq ans, devront passer devant une commission pour obtenir ou non le renouvellement de leur activité selon des conditions requises), celle de pouvoir tourner et enfin celle de pouvoir diffuser le film. A cela, une commission de sept personnes désignées par arrêté du ministre de la Culture devra donner un avis favorable ou défavorable. Ce n’est pas une classification de genres, ni du spectateur, juste le droit d’accepter ou de refuser qu’un film soit projeté. Pour Ammar Kessab, expert en politique et management culturel, tout est clair : «Chacune des trois autorisations comporte son lot de mesures bureaucratiques et handicapantes. Ainsi, il devient pratiquement impossible de produire, de diffuser, de créer, de faire du cinéma, tout simplement. Souvenez-vous de la loi n°11-03 du 17 février 2011 relative à la cinématographie. Elle avait fait suffoquer d’indignation plusieurs acteurs du secteur. Par ses critères flous, elle avait ouvert la porte à des dérapages graves dont celui de la liberté d’expression artistique, garantie par la Constitution. Les trois décrets publiés en août dernier sont en fait des décrets d’application. Ils contiennent les dispositions renvoyant à la loi de 2011. Ils viennent donc détailler l’aspect restrictif de la loi en instaurant des mécanismes concrets, mais sans pour autant clarifier les critères qui concernent la réalisation de films sur la guerre de Libération, la religion, etc.» Et de poursuivre : «En l’absence d’un contrepouvoir et dopé par le budget le plus important en Afrique et dans la région arabe, le ministère de la Culture a succombé à la tentation de l’hégémonie, du contrôle et de la censure. Sa stratégie est imprégnée, logiquement, par la politique globale dont elle en est dépendante. C’était le chemin qu’il ne fallait pas prendre, et l’histoire le retiendra.» Selon Abdenour Hochiche, directeur des Rencontres cinématographiques de Béjaïa, le problème est tout autre, plus pernicieux : «Il touche au statut de la création en Algérie, dans notre société. Le créateur n’est plus un marginal mais plutôt un mode de réussite à travers ce que le système a érigé comme ‘‘stature’’ de l’artiste en incluant une certaine idée de l’artiste dans la psychologie sociale. Ils ont fini par aseptiser l’artiste pour, par la suite, faire passer des lois sur les intouchables tels que l’histoire ou la politique avant de tétaniser l’artiste. De ce fait, ils ont tétanisé la société mais de manière plutôt perverse, de sorte à ce que l’artiste ne puisse plus s’adosser à sa société. Au final, on verra des artistes qui voudront exercer leur métier comme ils l’entendent, c’est-à-dire en ne s’appuyant que sur leur subjectivité et qui seront, de fait, exclus.» Pour Bachir Derrais, producteur, reste encore une solution : «Avec ces décrets, l’autocensure fera des ravages. Mais, peut-être que ça encouragera beaucoup de cinéastes, qui travailleront de manière plus indépendante et clandestine. Certains iront jusqu’à écrire des projets simples et économiquement réalisables, sans passer par les fonds publics. Merzak Allouache a déjà tracé le chemin.» A cela, il faut se souvenir de Khalida Toumi, ministre de la Culture, avouer à El Watan Week-end : «J’ai copié sur le CNC français», alors que les similitudes, finalement, étaient purement inexistantes. Constat renforcé par cet autre aveu, discret, d’un employé du ministère de la Culture : «A force de voir des jeunes cinéastes faire des choses totalement nouvelles, ils ont fini par trouver les moyens de les cadenasser. Et le pire, c’est qu’ils comptent sur l’inertie du milieu. Ils savent qu’ils ne sont pas suffisamment unis pour manifester.» (Samir Ardjoum) Pourquoi une absence de pression internationale ? Parce que le régime algérien sait comment jouer sur les peurs des capitales internationales en se présentant comme un rempart contre l’islamisme dans le Sahel et en profitant de l’instabilité qui prévaut en Libye et en Tunisie. Il sait que la communauté internationale ne peut se permettre de voir le pays sombrer dans l’instabilité. «L’Algérie est pour le moment l’un des rares pays à être resté stables dans la région du Moyen-Orient et du Sahel. Elle joue un rôle fondamental pour la stabilité de la région. C’est d’ailleurs pourquoi nous hésitons à mettre la pression. Aujourd’hui, il faut que le gouvernement adopte une politique pour préserver et maintenir cette stabilité», a affirmé, hier à El Watan Week- end, N. Westcoot, directeur général de l’Afrique aux services des relations externes à l’Union européenne. «C’est un pôle stratégique qu’il faut garder stable, dit-il, même si nous sommes persuadés que les libertés tant demandées sont légitimes. Actuellement, nous sommes préoccupés par la situation qui prévaut en Libye et tous nos efforts politiques sont concentrés pour ce pays», explique-t-il. Cet avis est partagé par un expert qui affirme que «la politique algérienne actuelle est floue, mais une telle pression internationale ne peut être exercée devant l’intérêt économique qu’apporte l’Algérie à ces pays occidentaux». Cette semaine, l’ambassadeur de France a lui aussi déclaré à Annaba : «Bien qu’il y ait des choses à améliorer, la stabilité politique, sécuritaire et économique, offre un climat favorable à l’investissement des Français en Algérie». On sait presque ce que dira John Kerry lors de sa visite à Alger en novembre... (Nassima Oulebsir) Adlène Meddi, Mélanie Matarese, Salim Mesbah
Posted on: Sat, 26 Oct 2013 08:06:33 +0000

Trending Topics



Recently Viewed Topics




© 2015