Signification humaine de la liberté René Fugler samedi 4 mai - TopicsExpress



          

Signification humaine de la liberté René Fugler samedi 4 mai 2013 par ps popularité : 3% Cet article, signé René Forain, est paru dans le numéro 87, février 1963 du Monde libertaire. Il est bien trop facilement admis dans les milieux libertaires que l’anarchisme n’est pas à repenser : les transformations profondes de notre monde depuis un siècle n’exigeraient qu’une remise à jour des applications pratiques d’une théorie qui en elle-même resterait actuelle. En fait, à chaque remembrement du monde correspond une réorganisation de la conscience et de la pensée. « La philosophie traduit d’âge en âge la prise en charge du réel par la pensée. » Cette idée de l’évolution conjuguée de la pensée et des conditions de l’existence est un des fils directeurs du livre de Georges Gusdorf, Signification humaine de la liberté (Payot, 1962). Car si la liberté est devenue la valeur, l’exigence fondamentale de la conscience moderne, il s’en fait de beaucoup que d’autres âges et d’autres civilisations y aient attaché autant d’importance, quand même l’idée ne leur en était complètement étrangère. Une histoire de la culture « Il ne saurait être question, en philosophie, d’éternels problèmes, car les problèmes se renouvellent en même temps que la face du monde et la conscience des hommes » (p. 7). Sous la constance des mots, les significations ne cessent de changer, et l’histoire de l’idée de liberté est indissociable d’une histoire de la culture. Ce n’est donc pas un traité de métaphysique, mais bien une vivante enquête sur le sens concret de la liberté à diverses étapes de l’histoire que nous propose G. Gusdorf dans son essai. Encore prend-il soin au départ de bien insister sur les types de cultures où le problème de la liberté ne se pose pas : le monde primitif, l’âge des grands empires, l’orient traditionnel. Et la psychologie contemporaine révèle clairement que l’homme moderne, lui aussi, ne s’arrache que difficilement dans son enfance à son unité indivise avec son entourage. C’est avec la culture grecque qu’émerge notre problème de la liberté. Au fur et à mesure que la réflexion antique se dégage des sagesses orientales, se précisent des thèmes qui feront autorité pour toute la philosophie occidentale : la prise de conscience de l’être humain en tant que réalité indépendante et centre d’intérêt, la réflexion rationnelle comme critère de vérité, l’affirmation de l’autonomie du jugement fondant l’autonomie d’une existence soumise à la seule raison. Riche héritage, mais facilement dénaturé : car tous ces thèmes ont pris vie dans le contexte spirituel d’une religion cosmologique qui diffère du tout au tout de l’espace mental moderne. De la fin de la culture hellénique à l’aube des temps modernes, il y a un long chemin, dont se dispensent volontiers bien des historiens universitaires, qui sautent cavalièrement de la Grèce à Descartes. Or, c’est une des contributions intéressantes de ce livre que de rendre justice à la réflexion du Moyen Âge et surtout aux découvertes passionnées de la Renaissance. Il y a un apport chrétien à la conscience de la liberté. Attribuant la liberté à Dieu, la tradition judéo-chrétienne promeut du même coup une méditation de la liberté, qui mènera à la revendication de la liberté par l’homme. Cette affirmation de la liberté s’appuie encore sur la notion biblique de création : la création étant jugée bonne, la liberté à laquelle elle est due se trouve mise en honneur. La valeur positive de la création donne un sens à l’histoire de la liberté et garde l’idée de progrès. L’individualisme renaissant – n’oublions pas que la Renaissance représente trois siècles de l’histoire de la pensée occidentale – n’ira pas jusqu’à rejeter l’idée de Dieu. L’homme cependant prend une importance croissante. L’individu qui se dégage et s’affirme devient point de départ et de référence. Le progrès des découvertes, des sciences et des techniques permet une attitude dynamique et conquérante en face du monde. « Jusque là dans l’histoire, et partout dans le monde, il n’y avait de liberté que dans l’obéissance à l’ordre. Elle sera recherchée désormais comme une rupture de l’ordre et un remembrement de l’homme et du monde, comme la création d’un ordre nouveau où l’homme affirme son droit d’initiative et de maîtrise. » (p. 151) D’objet de discussion, la liberté devient une donnée de la conscience et de l’action, un droit de l’homme et un devoir. Le mécanisme qui se développe au XVIIe siècle va approfondir et renouveler ces perspectives. Avec la raison scientifique naît une nouvelle conscience de la liberté. La science en formation invite au déploiement des énergies par l’augmentation des possibilités humaines. Elle s’insère dans les mécanismes du monde pour accroître sans cesse l’efficacité de l’action. L’homme libre, c’est à présent le technicien, la liberté signifie désormais intervention dans le monde et vérification de la théorie par la pratique. L’Encyclopédie représente un pas de plus dans cette conception pratique de la liberté. Si au XVIIe siècle l’homme se veut libre au milieu des choses, au siècle suivant il exigera sa liberté au milieu des hommes : la prise de conscience des implications éthiques, juridiques et politiques de l’idée de liberté se traduira par la revendication de celle-ci dans tous les domaines avec une énergie sans précédent. C’est le prélude à la Révolution de 1789. Lire la suite
Posted on: Sat, 16 Nov 2013 15:48:00 +0000

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