cedh ZM C. FRANCE du 14 novembre 2013 requête 40042/11 UN - TopicsExpress



          

cedh ZM C. FRANCE du 14 novembre 2013 requête 40042/11 UN OPPOSANT DE KABILA NE PEUT ÊTRE RENVOYE EN RDC sans violer larticle 3 de la Convention a) Principes applicables 59. Sur le fond, la Cour se réfère aux principes applicables en la matière (voir, notamment, Saadi c. Italie [GC], no 37201/06, §§ 124-125, CEDH 2008). 60. En particulier, la Cour considère qu’il appartient en principe au requérant de produire des éléments susceptibles de démontrer qu’il serait exposé à un risque de traitements contraires à l’article 3, à charge ensuite pour le Gouvernement de dissiper les doutes éventuels au sujet de ces éléments (Saadi, précité, § 129). Elle rappelle également qu’il ne lui appartient pas normalement de substituer sa propre appréciation des faits à celle des juridictions internes, mieux placées pour évaluer les preuves produites devant elles (voir, entre autres, Klaas c. Allemagne, 22 septembre 1993, § 29, série A no 269). Elle reconnaît que, eu égard à la situation particulière dans laquelle se trouvent souvent les demandeurs d’asile, il convient dans de nombreux cas de leur accorder le bénéfice du doute lorsque l’on apprécie la crédibilité de leurs déclarations et des documents soumis à l’appui de celles‑ci. Toutefois, lorsque des informations sont soumises qui donnent de bonnes raisons de douter de la véracité des déclarations du demandeur d’asile, celui-ci est tenu de fournir une explication satisfaisante pour les incohérences de son récit (voir, notamment, Collins et Akaziebie c. Suède (déc.), no 23944/05, 8 mars 2007, et N. c. Suède, no 23505/09, § 53, 20 juillet 2010). De la même manière, il incombe au requérant de fournir une explication suffisante pour écarter d’éventuelles objections pertinentes quant à l’authenticité des documents par lui produits (Mo. P. c. France (déc.), no 55787/09, § 53, 30 avril 2013). 61. En outre, l’existence d’un risque de mauvais traitements doit être examinée à la lumière de la situation générale dans le pays de renvoi et des circonstances propres au cas de l’intéressé. Lorsque les sources dont la Cour dispose décrivent une situation générale, les allégations spécifiques du requérant doivent être corroborées par d’autres éléments de preuve (Saadi, précité, §§ 130-131). 62. Dans les affaires où un requérant allègue faire partie d’un groupe systématiquement exposé à une pratique de mauvais traitements, la Cour considère que la protection de l’article 3 de la Convention entre en jeu lorsque l’intéressé démontre qu’il y a des motifs sérieux et avérés de croire à l’existence de la pratique en question et à son appartenance au groupe visé (Saadi, précité, § 132). 63. Enfin, s’il convient de se référer en priorité aux circonstances dont l’Etat en cause avait connaissance au moment de l’expulsion, la date à prendre en compte pour l’examen du risque encouru est celle de la date de l’examen de l’affaire par la Cour (Chahal c. Royaume-Uni, 15 novembre 1996, § 86, Recueil 1996‑V). b) Application des principes 64. La Cour constate que le requérant allègue l’existence d’un risque de subir des traitements contraires à l’article 3 de la Convention en cas de renvoi vers la RDC, non en raison d’une situation de violence généralisée dans ce pays, mais du fait de sa situation personnelle en tant que militant au sein de l’opposition au gouvernement de Joseph Kabila. 65. Il appartient donc à la Cour de déterminer si le requérant, en sa qualité d’opposant politique, risque d’être exposé à des mauvais traitements. 66. Les rapports internationaux consultés (voir paragraphes 42-43) mentionnent que les ressortissants de la RDC renvoyés dans leur pays sont automatiquement interrogés à leur arrivée à l’aéroport par la DGM. Lorsqu’ils sont identifiés comme des opposants au gouvernement Kabila, que ce soit en raison de leur profil politique, militaire ou ethnique, ils risquent ensuite d’être envoyés au centre de détention de la DGM à Kinshasa ou à la prison de la direction des renseignements généraux et services spéciaux (DRGS) de Kin-Mazière. Les rapports font état de détentions pouvant durer de quelques jours à plusieurs mois durant lesquels les personnes incarcérées sont soumises à des traitements inhumains et dégradants, voire subissent des actes de torture. 67. Au regard de ces constatations, la Cour estime que, pour qu’entre en jeu la protection offerte par l’article 3, le requérant doit démontrer qu’il existe des motifs sérieux de croire qu’il présenterait un intérêt tel pour les autorités congolaises qu’il serait susceptible d’être détenu et interrogé par ces autorités à son retour (voir NA. c. Royaume-Uni, précité, § 133, et Mawaka c. Pays-Bas, no 29031/04, § 45, 1er juin 2010). 68. En l’espèce, le requérant allègue avoir eu des activités militantes en tant que caricaturiste au sein de l’opposition, en particulier pour le MLC et l’UDPS, à partir de 2005 et jusqu’en juin 2008, date à laquelle il se réfugia en France. 69. La Cour note que le Gouvernement conteste les dires du requérant selon lesquels il serait connu des autorités en raison de son engagement en tant que caricaturiste auprès des partis d’opposition et estime trop peu étayées ses allégations quant à ses conditions d’incarcération à la prison de Kin-Mazière. 70. La Cour admet que si le requérant a fourni des dessins signés de ses initiales et dénonçant les exactions commises par le gouvernement en place (voir paragraphes 9 et 18), rien ne permet d’établir avec certitude que ceux‑ci ont été effectivement rendus publics par voie d’affichage ou sous forme de tracts. 71. En revanche, la Cour constate que d’autres éléments viennent corroborer le récit du requérant. 72. En effet, pour ce qui est des traitements subis par le requérant durant sa détention en 2006, le certificat médical produit atteste des nombreuses cicatrices et des séquelles psychologiques dont il souffre, établit que ces cicatrices sont compatibles avec les faits rapportés (voir paragraphe 13) et témoigne de la gravité des sévices infligés. 73. De plus, le requérant fut incarcéré à la prison de Kin-Mazière, centre de détention dirigé par la DRGS, division de la police spécialisée dans le renseignement et chargée d’enquêter sur les activités des opposants au gouvernement Kabila (voir paragraphe 41), ce que le Gouvernement ne conteste pas. 74. En conséquence, la Cour estime avéré le passé politique du requérant et constate que sa détention apparaît directement liée à son activité militante au sein de l’opposition. 75. Quant à l’existence d’un risque actuel de subir des traitements contraires à l’article 3 de la Convention en cas de renvoi du requérant en RDC, le Gouvernement soutient que le contexte politique a changé en RDC et que les militants du MLC ne sont plus menacés. La Cour observe toutefois que cette organisation fait toujours partie de l’opposition parlementaire. Si la répression systématique des membres du MLC n’a plus cours, les rapports internationaux indiquent toutefois que certains membres du MLC ont été inquiétés jusqu’en 2011 (voir paragraphe 35). 76. Surtout, la Cour relève que le requérant allègue avoir également milité pour d’autres partis d’opposition, tels que l’UDPS, ce que met en doute le Gouvernement. La Cour observe que les dessins du requérant, en particulier ceux réalisés en 2007, comportent des slogans au nom de plusieurs partis d’opposition, dont l’UDPS (voir paragraphe 18). Or les sympathisants de ce parti font aujourd’hui l’objet d’une répression d’une particulière gravité, ceux-ci étant régulièrement soumis à des menaces, intimidations et arrestations arbitraires (voir paragraphe 36). 77. En tout état de cause, le requérant fournit un avis de recherche, dont l’authenticité n’est pas remise en cause par le Gouvernement, daté du 27 août 2010 à son nom et le désignant comme « artiste dessinateur, combattant de la rue, sympathisant de certains mouvements opposants à citer l’exemple MLC » et mentionnant qu’il est recherché pour « évasion de la prison de Kin-Mazière, non-respect des consignes de mise en liberté, atteinte à la sûreté de l’Etat et aux institutions de la République », faits constitutifs de l’infraction de « très haute trahison » sanctionnée par la peine de prison à perpétuité selon le code pénal militaire. Le requérant produit en outre une convocation en date du 3 septembre 2010, lui demandant de se rendre au tribunal de grande instance de Matete à Kinshasa (voir paragraphe 25). 78. La Cour constate que le Gouvernement cite dans ses observations la décision de l’OFPRA du 6 octobre 2010 selon laquelle cette dernière convocation ne comporterait pas « toutes les garanties d’authenticité » (voir paragraphe 26). La Cour observe cependant que l’OFPRA n’apporte aucune justification à l’appui de cette conclusion. Par conséquent, la Cour ne saurait se fonder sur l’appréciation faite par l’OFPRA dans la mesure où elle ne dispose, à cet égard, d’aucun élément explicatif (voir, mutatis mutandis, Mo. M. c. France, no 18372/10, § 41, 18 avril 2013). 79. Ainsi, la Cour estime, au vu du profil du requérant, et notamment de ses liens avec l’opposition, de son incarcération à la prison de Kin-Mazière, du certificat médical explicite corroborant son récit, de l’avis de recherche et de la convocation datés de 2010 émis à son encontre en raison de son engagement militant et indiquant qu’il est poursuivi pour des crimes passibles d’une peine de prison à perpétuité, qu’il existe des motifs sérieux de croire qu’il présente un intérêt tel pour les autorités congolaises qu’il serait susceptible d’être détenu et interrogé par ces autorités à son retour (a contrario voir Xa c. France (déc.), no 36457/08, 25 mai 2010, Mawaka, précité, § 67, M.M. c. France (déc.), no 49029/10, 11 septembre 2012). Il existe donc, dans les circonstances particulières de l’espèce, un risque réel qu’il soit soumis à des traitements contraires à l’article 3 de la Convention de la part des autorités congolaises en cas de mise à exécution de la mesure de renvoi. 80. Ces éléments suffisent à la Cour pour conclure qu’un renvoi du requérant vers la RDC emporterait violation de l’article 3 de la Convention. fbls.net/3expulsion.htm
Posted on: Thu, 14 Nov 2013 15:37:21 +0000

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