ARTICLE du JOURNAL : Quotidien dORAN du Jeudi 03 Octobre - TopicsExpress



          

ARTICLE du JOURNAL : Quotidien dORAN du Jeudi 03 Octobre 2013. Titre : L e b â t i q u i t u e par Mounir Azzoun * Le dramatique effondrement dune tribune du stade du 5 Juillet qui a coûté la vie à 2 jeunes supporters et les nombreuses catastrophes qui ont endeuillé lAlgérie au cours de ces 30 dernières années, mettent au devant de la scène le rôle de lingénierie civile dans le contrôle de la conformité des infrastructures publiques et privées et la prévention de ces catastrophes. Ils révèlent aussi les effets dévastateurs de la marginalisation de ce métier dans la maîtrise dœuvre, souvent confiée par méconnaissance ou sciemment, à des bureaux détude en architecture dont ce nest pas tout à fait le rôle. Lart de la construction requiert de multiples compétences et fait appel à de nombreux intervenants dans la conception, la réalisation et le contrôle de la qualité du bâti et des infrastructures. En Algérie, la maitrise dœuvre est souvent confiée par méconnaissance ou par réflexe pavlovien en exclusivité aux bureaux détudes en architecture. Il suffit ensuite que survienne une catastrophe un effondrement pour cause de séisme ou autres aléas de lhomme et de la nature pour que nos responsables se souviennent de lexistence de bureaux détudes en ingénierie civile qui, auparavant étaient exclus de la maitrise dœuvre. Pourquoi solliciter lexpertise dun ingénieur en génie-civil après une catastrophe ? Pour la simple raison que cest lui qui peut juger de la qualité dune construction ou dune bâtisse et, à travers un rapport, dire ce qui sest passé et pourquoi les gradins du stade du 5 juillet on cédé sous le poids des supporters, tuant deux dentre eux, et comment la qualité du ferraillage ou du béton des immeubles de Boumerdès ont cédé immédiatement sous la violence du tremblement de terre. Une anomalie à corriger en urgence Pourtant, la loi algérienne régissant la maîtrise douvrages publics est claire à ce sujet : « la maitrise dœuvre a pour objet dapporter une réponse architecturale, technique et économique à un programme défini par le maître douvrage ». Dans le cas où un projet présente une certaine complexité, lingénierie civile peut prendre en charge une maîtrise dœuvre partielle pour apporter des solutions aux aspects techniques et économiques. Cette tache incombe donc à lingénieur civil et non à larchitecte qui conçoit une partie de louvrage. Lerreur qui se répète le plus souvent en Algérie est que le maître de louvrage, cest-à-dire le commanditaire du projet, fait rarement appel aux bureaux détudes en ingénierie civile, préférant généralement les bureaux détudes en architecture, dont ce nest pas le cœur de métier. Cette exclusion apparait souvent dans les concours ou appels doffres relatifs à la maîtrise dœuvre, où les bureaux spécialisés en ingénierie civile sont systématiquement écartés, toujours au profit des bureaux darchitecture. Ces derniers sous traitent ensuite la partie génie-civile à des bureaux dingeniering pour des montants scandaleusement sous évalués. A titre dillustration, lors de la présentation dun ouvrage ou dun projet dinfrastructure publique, cest souvent le nom de larchitecte (ou du bureau détudes en architecture) qui la conçu qui est cité ou mis en avant. Par contre, le ou les ingénieurs qui sont intervenus dans la conception ne sont pratiquement jamais cités alors que leur rôle est essentiel dans le projet. En quoi consiste le travail de lingénieur C I V I L ? Lobjet de cette contribution nest pas de faire un procès dintention à mes confrères architectes et bureaux détudes en architecture. Au contraire, ce sont ces derniers qui donnent une première vie à un projet urbanistique et en façonnent les contours. Il sagit simplement de faire, de manière objective, la part des choses et définir le rôle de chacun des intervenants. Dans un projet dinfrastructure, les aspects structurels, climatiques, énergétiques, sécuritaires et environnementaux doivent être abordés dès le premier coup de crayon et développés tout au long du projet jusquà sa livraison, dautant plus quactuellement, la complexité des équipements techniques et des matériaux ne cesse de saccroître. Et cest lingénieur qui prend en charge ces aspects. Pour définir plus précisément le rôle de lingénieur civil, il convient den préciser les missions et prestations : 1 Études de faisabilité et de rentabilité ; 2 Études des risques techniques et financiers ; 2 Concevoir louvrage à réaliser : - management du projet, - études préliminaires, - études de conception, - projet dexécution. 3 Faire réaliser louvrage : - sélection des entreprises, - supervision des travaux, gestion administrative des marchés, - planification des travaux et ordonnancement des taches ; 4 Contrôler la réalisation de louvrage : - conformité de la réalisation par rapport à la conception, - respect des coûts, des délais et de la qualité, - maîtrise des risques divers. 5 Assister le maître douvrage pour : - la réception des ouvrages, - la formation du personnel dexploitation de louvrage, - les essais et les mises en service, - la préparation de la maintenance et de lexploitation du bâtiment Cette liste nest, bien sur, pas exhaustive mais couvre une grande partie des interventions possibles de lingénierie civile dont on peut noter le caractère pluridisciplinaire et la primauté des études. Un projet bien étudié et correctement suivi par un ingénieur civil présente les avantages dune meilleure qualité de la bâtisse, condition sine qua non de la prévention contre les risques sismiques ou deffondrement de ses structures. Une bonne étude présente aussi lavantage de réduire les coûts des constructions à travers une meilleure rationalisation des matériaux, de la main dœuvre et des délais. Comment se présente la situation des ingénieurs civils en Algérie ? Dans un pays comme lAlgérie, classé parmi les plus exposés aux risques sismiques et aux catastrophes naturelles provoquées par les bouleversements climatiques à léchelle planétaire, il était strictement convenu, particulièrement au lendemain du tremblement de terre ravageur de 2003 à Boumerdès, de limplication indiscutable de lingénieur civil, toutes spécialités confondues, dans la maîtrise dœuvre des constructions, des plus anodines aux plus complexes. Lintervention des ingénieurs civils doit couvrir les études sismologiques des zones, le sol, le système de fondations, la faisabilité et la stabilité des ouvrages vis-à-vis des chocs sismiques, climatiques etc. Dix années après cette catastrophe et plus de 30 ans après celle dEl Asnam, les maîtres douvrages publics et commanditaires de grands projets dinfrastructures continuent de faire appel exclusivement aux bureaux détudes en architecture pour effectuer cette tache. Pour les grands projets financés par l’État, il est même souvent fait appel à des bureaux détudes étrangers. Ces derniers, à leur tour, sous-traitent la quasi-totalité de leur plan de charges auprès des ingénieurs et architectes algériens, ce qui en soit est une reconnaissance de leur compétence, mais en contrepartie dhonoraires insignifiants comparés aux factures astronomiques présentées à l’État et réglées à coups de devises sonnantes et trébuchantes. Absence de statut Aujourdhui, ce sont des dizaines de milliers dingénieurs civils formés par lEtat dans les grandes écoles et instituts spécialisés du pays qui sont mis sur la touche car ils ne trouvent pas de travail ou de plan de charge conséquent. Pour les plus chanceux dentre eux et par résignation, ils sont forcés à chercher un travail au sein de ladministration et dans les collectivités pour assurer un revenu à leurs familles. Le ministère de lhabitat et de lurbanisme a certes fourni de gros efforts en délivrant des agréments à des bureaux dingénierie civile exerçant dans la profession libérale. Par cette initiative, il compte énormément sur les ingénieurs civils pour inculquer et introduire les nouvelles techniques de construction qui permettent duniformiser les constructions et dadapter leurs comportements aux multiples risques de la nature tout en réduisant leurs coûts. Mais en dépit de lexistence de textes de loi clairs, il existe une mauvaise interprétation de la part des maîtres douvrages, qui se traduit sur le terrain par loctroi de la maîtrise d’œuvre aux seuls bureaux darchitectes, laissant sur le carreau et sans plan de charge, les bureaux dingénierie civile. Des conséquences dramatiques sur le bâti et les vies humaines Les conséquences de cette marginalisation des bureaux dingénierie civile de la maitrise dœuvre se traduisent chaque année par des catastrophes à limage de celle du stade du 5 juillet et des précédentes catastrophes qui ont coûté la vie à des milliers dalgériens au cours des trois décennies écoulées, à cause de la mauvaise qualité du bâti et de la détérioration avancée du tissus urbain national. Devant lampleur des programmes dinfrastructures lancées par le gouvernement depuis des années visant à construire des millions de logements et des infrastructures de base telles que les hôpitaux, les écoles, etc., il est urgent de réhabiliter lingénieur civil dans sa mission de garantir une bonne qualité du patrimoine bâti national, préalable essentiel à la prévention contre les effets ravageurs des catastrophes naturelles. Cette réhabilitation ne peut intervenir quà travers une implication directe, par les maitres douvrages et ordonnateurs, des bureaux dingénierie civile dans la maitrise dœuvre. * Expert-ingénieur en bâtiment Diplômé de lINFORBA Délégué régional de lOrganisation algérienne des ingénieurs en construction et environnement
Posted on: Fri, 15 Nov 2013 14:47:22 +0000

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